La tragédie algérienne des années 1990 aurait pu être évitée. Mais ni le pouvoir en place ni les islamistes du FIS ni une partie de « l'opposition » ni une grande partie des médias ni une grande partie des intellectuels n'ont été à la hauteur. Nous avons tous manqué de lucidité, de sagesse, de clairvoyance, d'amour, d'intelligence. C'est en reconnaissant nos erreurs que nous pouvons avancer. C'est en faisant des lectures objectives de notre Histoire récente que nous pouvons grandir. Trente ans après, cette tragédie peut s'avérer, à bien des égards, salvatrice. Cette tragédie peut nous guider sur les chemins de la liberté, de la démocratie, de la justice sociale. Il ne faut surtout pas que la junte militaire au pouvoir depuis le 9 septembre 1962 se serve de cette tragédie pour se maintenir. Le Hirak est une idée pacifique extraordinaire qui a réussi la prouesse de faire renaître la fraternité dans la société algérienne. Le Hirak est une conscience qui ne va pas mourir. Le Hirak est une chance pour le peuple algérien et son armée, expurgée de quelques dizaines de généraux mafieux. Le Hirak algérien, avec son pacifisme généreux, sera certainement un jour une référence planétaire pour les combattants de la liberté. Le Hirak algérien deviendra une précieuse référence car il se bat aussi contre l'ordre établi du monde qui soutient la junte militaire au pouvoir en Algérie. L'ordre établi du monde est constitué des grandes puissances lesquelles se font des concurrences féroces mais sont d'accord sur l'essentiel, tout en produisant des discours politiques de diversion pour la consommation interne. Les USA, l'Europe, La Russie et la Chine forment les grands blocs de cet ordre établi du monde. C'est un ordre qui n'est guère intéressé par la démocratisation de l'Afrique du Nord. Mais c'est un ordre qui ne peut pas empêcher le peuple algérien de conquérir sa souveraineté et sa liberté pour installer une vraie démocratie. Le Hirak algérien existe aussi en Europe et en Amérique. La diaspora algérienne s'est agréablement mobilisée depuis plus de deux ans pour accompagner le peuple algérien vers la dignité, la démocratie, le pluralisme, la justice sociale, l'état de droit. Cette diaspora a les capacités de minimiser les visées de l'ordre établi du monde. Cette diaspora est déjà arrivée à transmettre la réalité pacifique du Hirak aux dirigeants de l'ordre établi du monde. Mais il reste encore du travail à faire. Lorsque le Hirak réussira à faire sortir dans les rues de Paris plus de 100 000 marcheurs, la France officielle se posera des questions sur son soutien à la junte militaire algérienne. Rien n'est impossible mais le chemin est encore long ! Patience, union, solidarité, générosité, endurance, amour, pluralisme, intelligence, respect de l'autre ! La démocratie c'est aussi le vivre-ensemble. Dès qu'une partie de la population est exclue, il n'y a plus de vivre-ensemble, il n'y a plus de démocratie ! Youcef Zirem, écrivain