De l'acte de félonie à la traîtrise il n'y a qu'un pas. De nombreux pays arabes l'ont franchi en déniant au peuple sahraoui le droit de recouvrer son indépendance et en poignardant dans le dos une Algérie empreinte de valeurs autres. Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Ainsi, la Ligue arabe et l'Organisation de la coopération islamique (OCI) ont fait savoir qu'elles se dressaient aux côtés du Maroc dans la prétendue affaire du soutien du Hezbollah au Front Polisario. Nacer Bourita, le MAE de ce pays, avait annoncé mardi la rupture des relations avec l'Iran accusé d'avoir transféré des armes aux Sahraouis via son ambassade en Algérie. Cette dernière a nié en bloc les faits tout comme le gouvernement iranien et le Hezbollah qualifiant ces accusations de prétextes grossiers et infondés. Indirectement mise en cause, mais principalement ciblée, l'Algérie a réagi en convoquant l'ambassadeur du Maroc à Alger. Sur un ton très ferme, il lui a été signifié que de telles accusations ne pouvaient être tolérées car étant totalement infondées. Bizarrement, et alors que tous s'attendaient à une nouvelle escalade, le Maroc s'est contenté de maintenir ses propos en faisant dire, une fois de plus, à son ministre des Affaires étrangères qu'il détenait des preuves. Nacer Bourita s'exprimait ainsi fort du soutien qu'ont apporté à son pays les principales monarchies du Golfe dès l'éclatement de l'affaire. L'Arabie Saoudite, le Qatar, Bahreïn et les Emirats arabes unis ont publié des communiqués particulièrement virulents dans lesquels ils déclarent obéir aux principes de non-ingérence car le «Maroc se bat pour son intégrité territoriale». Le plus grave, mais néanmoins peu surprenant, est que ces pays ont été officiellement rejoints par la Ligue arabe et l'OCI. La première a exprimé jeudi sa solidarité «face aux interventions dangereuses de l'Iran dans les affaires internes du royaume». C'est ce qu'a fait également l'Organisation de la coopération islamique (OCI) soulignant «l'impératif pour l'ensemble des parties étrangères de ne pas interférer dans les affaires intérieures des Etats membres, en conformité avec les principes que stipule la charte de l'organisation, qui appelle au respect de la souveraineté, de l'indépendance et de l'intégrité des territoires des Etats membres et à la non-ingérence dans leurs affaires intérieures». Et comme pour faire plus fort, les monarchies du Golfe, dont dépendent essentiellement la Ligue arabe et l'OCI, ont publié un communiqué commun émanant du Conseil de coopération du Golfe. Composée de l'Arabie Saoudite, Oman, du Koweït, Bahreïn des Emirats arabes unis et du Koweït, la CCG a condamné la prétendue «ingérence iranienne» et usé en des termes réducteurs envers le Front Polisario. Notoirement connues pour être des caisses de résonance de Riyad, elle-même en rupture totale avec tous les principes ayant fait la grandeur des pays arabes autrefois, les organismes qui se sont ainsi exprimés ont commis une faute grave. Déjà en mal de crédibilité, la Ligue arabe et l'OCI ont indirectement poignardé dans le dos l'Algérie, pour sans doute lui faire payer son obstination à refuser d'intégrer le «front anti-chiite» mené par l'Arabie Saoudite elle-même soumise aux règles imposées par les Etats-Unis. A plusieurs reprises, Alger a en effet refusé d'intégrer des démarches militaires ou politiques initiées par les responsables saoudiens pour isoler davantage l'Iran. Cela les Saoudiens ne l'ont jamais pardonné aux Algériens même si ces derniers se sont astreints jusqu'au bout à respecter leurs engagements en prenant part au dernier sommet (Dhahran) où avait été avalisé un communiqué scandaleux uniquement axé vers «l'ennemi chiite». La réunion qui se déroulait au lendemain des frappes menées en Syrie a totalement occulté l'événement. Riyad et les monarchies du Golfe ont imposé leur loi. Leur stratégie actuelle consiste à faire intégrer un maximum de pays du monde arabo-musulman à leur démarche. Des pays comme l'Algérie ou l'Egypte s'y sont refusés. Mohammed VI y a perçu, au contraire, une aubaine qui lui permettrait de solides soutiens pour manœuvrer dans le dossier du Sahara Occidental. Car c'est de cela dont il s'agit en fait: œuvrer et manœuvrer pour échapper aux négociations avec les Sahraouis prévues en octobre prochain. De l'autre bout du monde, le Portugais Antonio Guterres (SG de l'ONU) et le Conseil de sécurité persistent pour la mise en œuvre du plan de paix devant aboutir à l'organisation d'un référendum d'autodétermination. Trahis par le monde arabe, les Sahraouis ont repris espoir. A. C.