J'ai rêvé d'un méga-concert de musique pop. A Oued-Stock ! Je ne sais si c'est les yeux. Ou alors les oreilles. Ou peut-être la sphère ORL dans son ensemble. Mais le constat est là : j'ai l'impression que nous ne voyons pas avec les mêmes yeux et n'entendons pas avec les mêmes oreilles. De partout, fusent des cris «ils revieeeeeeennent ! ». Qui ? Les intégristes ! Les «interdiseurs» de concerts. Les «fermeurs» de salles de spectacles. Les «refouleurs» de Japonais et de Dauphins. Comment ça, ils reviennent ? Pourquoi ? Ils étaient partis ? Que quelqu'un alors me montre la souche de leurs billets «aller», lorsqu'ils ont quitté le pays. Ou mieux, des images de leurs départs massifs aux ports et aéroports du pays. Que des douaniers, des Pafistes ou juste des bagagistes viennent témoigner ici qu'ils les ont bien vus s'en aller un jour de la Principauté. Et qu'ils témoignent surtout de leur retour soudain-tout-à-coup-subrepticement au bled, «afwadjan-afwadjan», par flots ininterrompus, avec dans l'idée de refoutre le barouf. Belle légende urbaine. Ou plutôt rurbaine ! Et donc, si je la gobe goulument cette légende, toutes ces dernières années, en l'absence de ces hordes intégristes, de ces panneaux d'interdiction humanoïdes, c'est moi et moi seul qui m'interdisais de tenir la main de ma compagne en pleine rue, yek ? C'est moi et moi seul qui devais accomplir des kilomètres pour m'acheter une mousseuse qui ait encore un peu le goût de la bonne mousse, yek ? C'est moi et moi seul qui essayais de remonter le moral de ma gamine lorsqu'elle revenait le soir à la maison, catastrophée par l'ignominieux cours d'éducation islamique, yek ? Bon ! J'ai épuisé mon quota de yek ! Et je me sens même épuisé de devoir faire semblant comme l'ensemble de la meute hurlante. Hou ! Hou ! Ils revieeeeeeeennent ! Eh ben, non ! Désolé compagnons de meute ! Je n'hurlerai pas de concert avec vous ce tube de l'été. Pour la seule et bonne raison que ceux qui ne sont jamais partis ne peuvent pas «miraculeusement» revenir dans un endroit qu'ils n'ont jamais quitté. Où étaient-ils alors ? Comme tout le monde, ou presque : nichés, cachés, à fumer du thé pour rester éveillés à ce cauchemar qui continue. H. L.