Le président du parti islamiste, le MSP (Mouvement de la société pour la paix), fait un véritable forcing pour le report de l'élection présidentielle d'avril 2019. Hier encore, Abderrezak Makri est revenu à la charge pour plaider un report d'une année de ces élections : «Période nécessaire pour réunir les conditions d'un consensus national et l'accomplissement des réformes nécessaires.» Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - C'était à l'occasion de la « conférence des structures» du parti tenue au Centre des artistes à Zeralda sous le thème «Idées clés autour de l'initiative de l'entente nationale et la question du report des élections». Un long document «qui sera soumis à la prochaine réunion du majlis echoura (le conseil consultatif)» a été présenté aux participants. Ce document détaille à l'extrême la position du parti par rapport à la présidentielle. Pour le MSP, «le 5e mandat n'aura pas lieu». En tout cas, «les chances de son avènement se sont considérablement diminuées». Dans ce document signé par Makri, le MSP considère que «ceux parmi les soutiens au pouvoir qui s'accrochent au 5e mandat ne le font que pour se barrer la route mutuellement, s'agissant des plus forts, et par simple opportunisme, pour préserver des privilèges pour les moins forts». Lors d'un point de presse, à l'issue de la cérémonie d'ouverture de cette conférence, Abderrezak Makri ira encore plus loin. «Oui, nous avons des craintes. Des craintes que l'on impose le statu quo, avec les même méthodes, à savoir la fraude électorale et l'utilisation des moyens de l'Etat.» Ici, il parle d'un cinquième mandat. Mais, surtout, «que des personnes, qui gravitent autour du pouvoir s'emparent de la présidence avec les mêmes méthodes». Ici, l'allusion au Premier ministre, Ahmed Ouyahia, est à peine voilée. Surtout lorsqu'il précisera, un peu plus loin, que «ces mêmes personnes, qui sont aux affaires depuis des années, ont prouvé leur incapacité à trouver des solutions aux problèmes économiques que traverse le pays». Ou encore lorsqu'il dira que «effectivement, quand on entend Ouyahia inciter les walis (à recourir à la force publique), comment ne pas avoir peur ?» Aussi, Makri, dans le même sillage, dit ne pas souhaiter «un scénario à l'égyptienne avec un militaire qui tenterait de profiter de cette occasion». Allusion, bien sûr, au chef de l'état-major, Ahmed Gaïd Salah. A l'évidence, Makri préfère, pour des considérations idéologiques avant tout, plutôt voir Bouteflika rempiler pour une année, même «en dehors des urnes», qu'un Ouyahia ou un Gaïd Salah comme nouveaux patrons d'El-Mouradia, y compris par la voie des élections. Il ne faut jamais perdre de vue, en effet, que le MSP est, avant toute autre considération, un parti islamiste, membre de l'organisation des Frères musulmans. Dans ses différentes déclarations, Makri et son parti condamnent définitivement Abdelaziz Bouteflika, c'est-à-dire l'option d'un cinquième mandat. En 2013, le même Makri disait exactement la même chose à propos du quatrième mandat. Toujours est-il, et à bien analyser le discours et la démarche du parti islamiste, il en ressort que ses véritables craintes ne sont pas tant que le «statu quo perdure», mais qu'une succession advienne sans qu'il soit concerné. D'où son insistance sur «une conférence nationale». Une conférence durant laquelle «tout peut être discuté entre toutes les parties. Après tout, les lois et la Constitution sont le fait de l'homme. Beaucoup de pays ont réussi à dépasser des crises graves lorsqu'ils ont réussi le consensus autour d'un objectif, un projet clair et transparent». Pour le leader du MSP, la fin justifie les moyens, y compris, en l'espèce, un report de la présidentielle et, donc, un prolongement de l'actuel mandat de Bouteflika en dehors des dispositions constitutionnelles. K. A.