Allant à l'encontre des revendications populaires, le congrès des deux Chambres du Parlement a donc intronisé le président du Sénat, Abdelkader Bensalah, à la tête de l'Etat suivant ainsi à la lettre la démarche dictée par la Constitution après la démission du président de la République. Que de chemin parcouru par cet homme qui ne pouvait, sans doute, imaginer un jour, ne serait-ce que pour trois petits mois, présider au destin du pays, lui qui, parmi tant d'autres, ne s'est jamais mis dans l'idée de prendre le relais du Président Bouteflika dans des circonstances aussi troubles. Bensalah, un de ces hommes qui, malgré son rang dans la hiérarchie de la République, n'a jamais joui de l'aura qui propulse à la tête d'un pays, même de façon temporaire. Une aura qu'il n'a peut-être pas recherchée, lui qui s'est mis tout au long de sa carrière à l'arrière, laissant les feux de la rampe à des personnages plus endurcis pour les chauds débats pour ne se contenter que du rôle de modérateur, notamment à l'Assemblée nationale puis au Conseil de la Nation. Pourtant, la mission dont il est chargé depuis hier est la première du genre, de par l'importance du rôle qui lui est assigné et de la conjoncture. Beaucoup, en effet, ne savent pas que cet homme de bientôt 78 ans a été appelé à gérer une période de transition entre 1994 et 1997 en qualité de président du Conseil national de transition (CNT), l'équivalent de l'APN dans une certaine mesure, dont s'était doté le pays après la Conférence de consensus national tenue en janvier 1994. Avant d'arriver à la tête du CNT, Abdelkader Bensalah a eu un parcours tranquille dans le monde de l'information en qualité, d'abord, de directeur du Centre de l'information et de la culture algérien de Beyrouth entre 1970 et 1974. Ceci, après avoir été journaliste au quotidien arabophone Echaâb pendant deux années à partir de 1968 et avant de prendre la direction du même journal entre 1974 et 1977, à son retour du Liban. Sa carrière de parlementaire, le nouveau chef de l'Etat par intérim l'a inaugurée en qualité de député pour la daïra de Nedroma, dans la wilaya de Tlemcen, et ce, pour trois mandats avec, en sus, la présidence de la Commission chargée des affaires étrangères à l'Assemblée nationale pendant une dizaine d'années pour ensuite se voir confier un poste de diplomate en qualité d'ambassadeur en Arabie Saoudite en 1989. Puis, intervenaient les années de feu qui verront l'Algérie opter pour des solutions d'urgence en guise de pouvoir législatif avec, entre autres, l'institution du CNT que Bensalah présidera entre 1994 et 1997, période durant laquelle il prendra part à l'initiative qui allait aboutir à la création du Rassemblement national démocratique (RND), dont il assurera la responsabilité de secrétaire général pendant une année, le temps que son parti rafle pas loin de la moitié des 380 sièges des élections législatives multipartites de 1997, lors desquelles il sera élu sur une liste à Oran et se faire confier la présidence de l'APN jusqu'en 2002, année où le Président Bouteflika le nommera sénateur au titre du tiers présidentiel, qualité de sénateur dont il ne se départira pas avec, en prime, la présidence du Sénat pour les trois mandats que le Président lui confiera pendant près de 17 ans, jusqu'à le remplacer, depuis hier, à la tête de l'Etat. Azedine Maktour