Sciemment marginalisée et torpillée, la société civile se retrouve aujourd'hui à jouer les premiers rôles dans une situation de crise politique inédite. Le dialogue qui s'impose après près de cinq mois de mouvement populaire ne se fera certainement pas sans l'implication d'une société civile qui se cherche des représentants crédibles. Nawal Imès - Alger (Le Soir) - Eparpillée, souvent ciblée par des mouvements de redressement, les syndicats autonomes et les associations tentent aujourd'hui de reprendre la place qui leur est due. Le mouvement populaire, en quête de représentativité, y puisera-t-il des noms jouissant d'assez de crédibilité pour être associé à un dialogue qui s'annonce imminent ? Le Forum civil pour le changement anticipe. Il proposera aujourd'hui des noms en mesure de mener une médiation avec le pouvoir en place. Depuis le début du mouvement populaire, la question de la représentativité est récurrente. Pour le D. Merabet, président du SNPSP et membre de la Confédération des syndicats autonomes (CSA), cette situation n'a rien d'étonnant. Il estime, en effet, que « le système, avec ses tendances liberticides, a fait le vide autour de lui. Résultat : on cherche aujourd'hui désespérément une personne pouvant représenter le mouvement populaire. Dès qu'un nom est proposé, il est aussitôt grillé ». Pourtant, estime le président du SNPSP, il n'y a pas d'autres solutions que d'arriver à ce stade et d'aller à un dialogue avec des préalables. Il explique, en effet, que « le dialogue en tant que démarche ne peut être que la seule voie pour solutionner une crise. Nous sommes dans une situation de crise absolue, qui a des retombées autant économiques que sociales. Nous sortons d'un système maffieux et corrupteur qui a, non seulement dévalué le dinar mais également l'ensemble des valeurs. C'est ce qui a mené à cette colère qui est antérieure au 22 février. Chaque année, nous recensons pas moins de 900 à 1 200 situations de conflits liés à des problèmes sociaux et professionnels. Nous sommes face à une crise du système ». Que faire ? Le D. Lyès Merabet répond « Continuer à sortir dans la rue et à dénoncer ? Oui, il faut le faire mais parallèlement, il faut penser au dialogue. Ce dernier ne peut en aucun cas se faire dans une situation où les opposants sont empêchés de s'exprimer et où le débat contradictoire est totalement absent. Le premier des préalables est la libération des détenus d'opinion. Si le dialogue est inévitable, il doit se faire dans un climat apaisé ». Comment le faire ? « Nous sommes dans une équation difficile. Le chef de l'Etat est refusé par la rue. D'un autre côté, les partis politiques de l'opposition sont éclatés. Ils n'arrivent pas à se hisser à la hauteur des enjeux ni à se rassembler. Nous ne sommes pas aujourd'hui dans une course pour des élections. La famille politique n'a pas été en mesure d'entamer un dialogue à son propre niveau, alors que la situation exige une unité autour de ce qu'on veut pour cette Algérie de demain », estime le président du SNPSP qui ajoute qu'« il reste une société civile qui se construit à l'occasion de ce mouvement. Il ne faut pas oublier que le système maffieux a cassé les syndicats, en a cloné beaucoup et empêché les gens de s'organiser ». En dépit de cette réalité, la société civile est visiblement en train de renaître de ses cendres, prenant le relais des partis politiques dont les décisions obéissent souvent à des considérations de positionnement stratégique. N. I.