Depuis le début du mouvement populaire, le RCD s'est engagé en rangs soudés derrière les Algériens mobilisés par millions contre le système politique. Mais ce ne sera plus le cas, dorénavant, puisqu'une crise de grande ampleur vient de le secouer. Des appels à un congrès extraordinaire commencent à être lancés. Karim Aimeur - Alger (Le Soir) - Dans une conjoncture révolutionnaire où le parti a plutôt besoin de stabilité, un vent de contestation a soufflé très fort, provoquant une profonde division des rangs qui risque d'avoir des conséquences graves sur la cohésion de cette formation. Engagée avec d'autres partis dans le pacte de l'alternative démocratique, la direction nationale du RCD, conduite par son président Mohcine Belabbas, doit faire face à une autre situation, presque semblable à celle du FFS, lui aussi membre des forces de l'Alternative démocratique. Des dizaines de cadres du parti, entre députés, élus locaux et membres du Conseil national se sont attaqués au chef du parti, dressant un bilan très sombre de ses activités. Désormais, les contestataires, accusés par la direction d'être au service du pouvoir et ayant pour mission de déstabiliser le parti, demandent l'organisation d'un congrès extraordinaire. C'est la première fois depuis sa création en 1989 que le RCD fait face à une crise d'une telle ampleur. Pendant son long règne à la tête du parti (1989-2013), Saïd Sadi n'a jamais été contesté comme l'est actuellement son successeur Mohcine Belabbas. Les observateurs s'interrogent sur les liens présumés entre l'ancien président et la crise qui vient de souffler sur le parti. Est-il pour quelque chose ? En tous les cas, la situation a commencé à «dégénérer» il y a juste quelques semaines. Publiquement, le désaccord est apparu au lendemain de l'appel des manifestants à la désobéissance civile. Saïd Sadi a pris position en faveur de l'action avant que son ancien parti ne prenne une position contraire. Tout le monde aura compris alors que quelque chose a changé dans les relations entre l'homme et le parti. Les choses vont s'éclaircir quelques jours plus tard lorsque la direction annonce le remaniement de l'exécutif. Les «fidèles» de Sadi, dont quelques députés et son fils, seront écartés. Jeudi passé, la crise éclate au grand jour avec la publication de la lettre des contestataires par Mohcine Belabbas et le chargé de communication, Atmane Mazouz. La guerre est à son comble sur les réseaux sociaux. Les contestataires poursuivent l'opération de collecte de signatures et la direction voit la déclaration de soutien (indéfectible ?) se multiplier. Ya-t-il une tentative de déstabilisation du parti ? Les contestataires se défendent en exprimant leur attachement au parti. «Ceux qui ont signé et qui continuent à signer dans les différentes wilayas la lettre publiée par Mohcine Belabbas et Atmane Mazouz sont les enfants purs du RCD», a soutenu le député de Tizi-Ouzou, Yassine Aïssiouane. Et d'accuser la direction d'avoir «donné des instructions à des structures remaniées avec des transfuges des partis du pouvoir pour dévoyer le vrai débat en s'attaquant vulgairement à des cadres et militants sincères». Ce député a accusé ouvertement la direction d'avoir livré le fondateur du parti au chef d'état-major dans un communiqué du RCD et, regrette-t-il, «on accuse les cadres insoumis d'être ses agents». «Le vrai débat portera sur des faits et les faits sont têtus. Celui qui a signé au nom du RCD avec Dhina, chef terroriste, n'a rien à faire avec nous. C'est une trahison des vivants et des martyrs du RCD. Il tombera. Nous avons tout notre temps pour cela», a-t-il ajouté dans une déclaration publiée sur sa page facebook. Cette menace «il tombera» signifie que les contestataires vont poursuivre la mobilisation pour la convocation d'un congrès extraordinaire. Dr Salah Belmekki, candidat à la présidence du parti lors du dernier congrès, a appelé à transformer «une crise d'egos surdimensionnés par une solution politique et démocratique», en allant «vers un congrès extraordinaire en adoptant de nouveaux statuts dans la sérénité, en donnant aux militants la possibilité de débattre démocratiquement. C'est à ce défi que nous devons nous mesurer pour préparer le parti à la deuxième République». Faut-il dire que la division du parti est, désormais, consommée puisque les échanges se font sur la place publique ? K. A.