Par Hassane Zerrouky Non, ce n�est pas une blague. C�est le r�sultat d�un sondage r�alis� en Afghanistan par le Conseil international sur la s�curit� et le d�veloppement (Icos) selon lequel 68% des Afghans souhaitent que les talibans et leur chef le mollah Omar entrent au gouvernement. Certes cela ne signifie pas qu�une majorit� d�Afghans adh�re � l�id�ologie talibane. Mais cette majorit� estime qu�il n�y a pas d�autre solution pour mettre fin � la guerre qui d�vaste le pays. Autrement dit, cette �guerre contre le terrorisme�, pr�texte avanc� par George Bush en septembre 2001 pour envahir l�Afghanistan, a eu les effets inverses des buts recherch�s. Neuf ans apr�s l�invasion de ce pays par Washington et ses alli�s, l�islamisme radical qui �tait en d�clin, rejet� par une majorit� d�Afghans, a �t� raviv�. Rappelons que ce sont ces m�mes Etats-Unis, de concert avec leurs alli�s saoudiens et pakistanais, qui avaient aid� financi�rement et militairement les islamistes afghans pour bouter hors du pays l�arm�e sovi�tique et renverser le gouvernement de Najibullah soutenu alors par Moscou. D�nomm�e �Cyclone�, cette op�ration mise au point par la CIA et supervis�e par Zbigniew Brzezinski, conseiller � la s�curit� nationale du pr�sident am�ricain Jimmy Carter, avait �galement pour but d�utiliser l�islamisme pour d�stabiliser les r�publiques sovi�tiques d�Asie centrale et d�instaurer des r�gimes islamiques dans les pays arabes consid�r�s comme des alli�s de l�URSS comme l�Alg�rie, la Libye, la Syrie, l�Irak et le Y�men du sud. Qualifi�s de �combattants de la libert� par le successeur de Jimmy Carter, le pr�sident Ronald Reagan, les �moudjahidine � afghans n�ont pas tard� � s�entred�chirer une fois Kaboul entre leurs mains en avril 1992 ! Mais comme entre temps, l�Union sovi�tique s��tait effondr�e, Washington et ses alli�s n�avaient plus besoin des �moudjahidine� afghans. Ils ont laiss� leurs anciens agents, les Gubuddin Hekmatiar, Shah Massoud, Abdul Haq, Jalluludin Haqani, s�entretuer pour le contr�le de Kaboul et le pouvoir. Toutefois, int�r�t g�o-�conomique oblige, la CIA et son alli� pakistanais, l�ISI, ont alors estim� qu�il fallait stabiliser l�Afghanistan en pariant sur une troisi�me force : les talibans. Pour la petite histoire afin de bien comprendre comment les talibans ont fait irruption sur la sc�ne afghane, il faut savoir que c�est sous le mandat de Bill Clinton que deux grands groupes p�troliers � l�am�ricain Unocal et le saoudien Delta Oil � ont d�cid� de d�senclaver le p�trole et le gaz turkm�nes en le faisant transiter par gazoduc et pipe-line par l�Afghanistan, avant d�atteindre le port de Karachi au Pakistan. Reste que cette solution a �t� contrari�e par les groupes islamistes afghans que cette m�me CIA avait aid�s par le pass� : ils exigeaient une taxe sur le transit, sinon pas de gazoduc. C�est alors qu�Unocal et le saoudien Delta Oil avec l�appui de la CIA et de l�ISI d�cident de jouer � fond la carte des talibans. Ces derniers n�auront alors aucun mal � chasser les forces de Hekmatyar et de Shah Massoud de Kaboul et � prendre le pouvoir en 1996. Toutefois, la coop�ration avec Unocal ne durera pas et sera rompue en 1998. Washington, qui fait mine de d�couvrir que les talibans aident Ben Laden, lui-m�me ancien agent de la CIA, d�cide de s�en d�barrasser. Les attentats du 11 septembre 2001 contre le World Trade Center lui en fournira l�occasion ! Aujourd�hui, neuf ans apr�s l�intervention US en Afghanistan, Washington fait pression sur le pr�sident afghan Hamid Karza� afin qu�il int�gre via un �programme pour la paix et la r�conciliation� les talibans acceptant de d�poser les armes. Moralit� : cet Occident capitaliste qui a mis en selle les islamistes avant que ces derniers ne se rebellent contre le ma�tre, est pr�t aujourd�hui � pactiser avec eux et � les r�installer au pouvoir. Car la donne a chang� aujourd�hui, l�ennemi a pour nom l�Iran. Et dans cette perspective, instrumentaliser les talibans sunnites contre l�Iran chiite consid�r� par la Maison Blanche et Isra�l comme autrement plus dangereux pour leurs int�r�ts, fait partie des r�gles du jeu. Quant aux femmes et aux d�mocrates afghans que Washington avait promis d'aider, ils devront attendre !