Le nouveau ministre de l'Industrie, Ferhat Aït Ali, semble démarrer ses activités à la tête de ce département sur les chapeaux de roues. En effet, lors de la passation de consignes avec l'ancienne locatrice de l'immeuble du boulevard Bougara, il dévoile d'emblée les grandes lignes de sa stratégie, à savoir «l'élaboration d'une politique industrielle et non la gestion des affaires courantes». Plus qu'un discours de circonstance, ce message se révèle en parfaite symbiose avec les positions de cet économiste qui n'a cessé depuis des années de dénoncer les dérives gravissimes de cette «fausse» industrie automobile pour l'économie du pays. Sur les plateaux de télévision, de radio ou sur les colonnes de journaux, Ferhat Aït Ali s'est effectivement distingué par une constante et profonde remise en cause de cette démarche dont les frasques ont fini par remonter à la surface et sont aujourd'hui traitées et condamnées par la justice. Le réquisitoire sans appel de cette dernière, confirme, non seulement les intentions malveillantes de Bouchouareb à travers ce détournement à grande échelle des deniers publics, mais aussi les craintes et les anticipations sur les retombées catastrophiques émises par le désormais ministre de l'Industrie. «L'aventure du montage automobile est un fiasco» S'il est vrai qu'il était parmi les tout premiers à révéler au grand public les dessous de cette arnaque, il n'en demeure pas moins que d'autres experts et professionnels du secteur ont tout aussi abondé dans le même sens en mettant en exergue la tendance de rapine et de prédation de cette opération qualifiée pompeusement «développement d'une industrie mécanique nationale». Ferhat Aït Ali, n'aura pas, néanmoins, emprunté des voies détournées pour dire clairement le fond de sa pensée. Pour lui, «l'aventure du montage automobile est un vrai fiasco et les hangars qui font office de semblant d'usines automobiles en Algérie, sont carrément à démonter». Précisant encore davantage, il ajoutait dans l'une de ces précédentes interventions médiatiques, «ce démantèlement sera surtout d'ordre juridique car il n'y a rien à désosser dans ces sortes de dépôts dont le bâti pourrait être orienté vers d'autres industries autrement plus rentables pour l'Algérie». C'est le cas selon lui, de l'industrie mécanique destinée aux véhicules utilitaires lourds, aux engins et aux bus et où l'Algérie cumule effectivement une longue expérience que vient consolider aujourd'hui le partenariat avec l'une des références mondiales dans le domaine, en l'occurrence, le label allemand, Mercedes. «Pourquoi, assénait-il, s'acharner à faire de l'industrie automobile (léger), alors que nous pouvons être compétitifs dans d'autres secteurs comme le poids lourd grâce à l'expérience acquise durant les années 70». «Rétablir les précédents concessionnaires dans leurs droits initiaux» Démontant l'argumentaire fallacieux des auteurs de cette gabegie, Aït Ali précisait dans un entretien à El Watan publié il y a quelques mois, que pour faire baisser les prix des véhicules neufs, comme c'était avancé par les anciens ministres de l'Industrie, «il aurait suffi de fermer ces combines dénommées usines, de libérer l'importation de véhicules neufs pour les concessionnaires respectant un cahier des charges en réimposant les mêmes droits de douane et la TVA qui avaient cours avant cette aventure de fausse industrie». Pour cela, il préconisait d'une part, de «rétablir les précédents concessionnaires sans exception dans leurs positions et droits initiaux en vue d'importer selon un cahier des charges de qualité et de fiabilité des véhicules, pour satisfaire les demandes des clients par le libre jeu de la concurrence» et d'autre part de «faire en urgence un audit des fameuses usines pour estimer le préjudice subi par le Trésor, l'économie et la clientèle algérienne». La fin d'une «aventure industrielle» ? Ceci étant, aujourd'hui que l'expert économique, aux positions aussi tranchées et radicales, se pare désormais du costume de ministre et de surcroît du département de l'industrie, ira-t-il jusqu'au bout de ses convictions publiquement affichées précédemment ? Mettra-t-il en application sa volonté de refonder le secteur sur des bases plus saines et revenir à un fonctionnement normalisé loin du monopole de fait imposé par l'ancien régime ? Serait-ce le clap de fin pour cette «fausse industrie» automobile ? Faudra-t-il pour autant jeter le bébé avec l'eau du bain sachant qu'un processus, certes embryonnaire, a été initié par certains, dont Renault et ses actionnaires publics algériens, en vue de développer une intégration locale ? Autant de question que se posent légitimement les citoyens désabusés par les politiques précédentes, l'amateurisme, l'aventurisme et l'incompétence de leurs auteurs qui étaient, à l'évidence, à mille lieues des soucis d'une réelle et véritable gestion du secteur. Il est à espérer, en tout état de cause, que le citoyen n'aura plus à payer son véhicule au double de son prix comme ce fut le cas durant cette «aventure industrielle». B. Bellil