De notre correspondante à Rome, Aïcha Abdeslem Chaque matin, l'Institut supérieur de la santé égrène le bilan inquiétant des victimes du Covid-19 : les malades hospitalisés et les personnes décédées. Le seuil des 10 000 contaminés a été atteint mardi et 631 patients n'ont pas survécu à l'infection. Malgré le confinement de toute la péninsule et l'interdiction imposée par le gouvernement de se déplacer entre les régions, l'épidémie du coronavirus ne cesse de s'étendre sur le territoire italien. Le gouverneur de la Lombardie (Milan), Luciano Fontana, a annoncé mercredi qu'en 24 heures, les hôpitaux de sa région ont enregistré 1500 nouveaux cas positifs au virus. Ce n'est plus seulement la Lombardie et la Vénétie qui sont isolées, mais désormais tout un pays est classé «zone rouge» et voit son quotidien bouleversé : écoles fermées jusqu'au 3 avril au moins, centres sportifs et culturels sommés de cesser leurs activités, employeurs qui prient leur personnel de demeurer chez eux. Le gouvernement de Giuseppe Conte, sous pression depuis le début de ce fléau, est passé à une phase plus drastique des restrictions visant à cerner les foyers de la maladie. C'est une course contre le temps pour réduire le nombre de contaminés au coronavirus et éviter au système sanitaire du pays de s'effondrer face au nombre impressionnant de malades nécessiteux des soins intensifs, voire la réanimation. Malgré les efforts de médecins et infirmiers mobilisés pour faire face à la demande, 135 patients sont décédés en Lombardie dans la seule journée de mardi. Les autorités multiplient leur appel à la population invitant, grands et petits, à ne pas sortir de chez eux et , effectivement, les villes se sont vidées de leurs habitants, y compris la capitale où touristes et passants ont déserté ses places. Le Vatican a même fermé la place Saint-Pierre et sa basilique au public. Après l'annonce de l'isolement de tout le pays, on avait assisté dans certaines régions de Naples et de Rome à la ruée vers les supermarchés ouverts de nuit pour s'approvisionner, mais les autorités ont rassuré les Italiens que les achats ne seront pas pénalisés par cette crise. Un pays dont l'économie est désormais au ralenti et qui brûle chaque jour plusieurs centaines de millions d'euros. Depuis le début de l'épidémie du coronavirus, l'Europe a perdu 600 milliards d'euros. Et ce n'est que le début de ce qui s'annonce comme une récession inévitable dans la péninsule. Le gouvernement de Giuseppe Conte a promis de dégager une enveloppe d'un montant de 25 milliards d'euros pour venir en aide à l'économie, car de plus en plus d'usines sont contraintes de suspendre leurs activités. Le constructeur automobile Fiat a fermé trois de ses usines dans le sud du pays, à Melfi notamment. Les grands groupes financiers ont fait des dons aux hôpitaux pour contribuer à résoudre cette crise, comme le patron de la marque Armani. Plusieurs compagnies aériennes ont bloqué leurs vols de et à destination de l'Italie. L'Autriche a bloqué le flux des voyageurs par train en provenance de la péninsule. Des milliers d'Italiens se trouvant à l'étranger sont empêchés de rentrer chez eux à cause de la suspension de leurs vols de retour. Les médecins craignent un scénario plus inquiétant, si la propagation du virus ne venait pas à être bloquée rapidement. «Nous serons obligés de choisir qui soigner. On optera pour ceux qui ont le plus de probabilité de survivre et on écartera les autres», ont laissé entendre des anesthésistes dépassés par la gravité de la situation. Selon des données publiées par le ministère de la Santé italien, 5% des malades atteint du Covid-19 ont moins de 30 ans. Jusqu'à présent, 43 enfants ont été contaminés, alors que 50% des infectés sont âgés de plus de 60 ans. Face à cette angoissante avancée de la maladie, les responsables des régions lombardes et vénitiennes exigent du gouvernement qu'il ordonne la fermeture des lieux de travail et des services publics et qu'il ne maintient actifs que les pharmacies et les magasins de distribution de denrées alimentaires. A. A.