La mouture de l'avant-projet de révision de la Constitution rendue publique, avant-hier jeudi, et donc, soumise à débat public, se veut «une plateforme de débat » pour doter le pays d'une «Constitution consensuelle à la hauteur des aspirations du peuple». M. Kebci -Alger (Le Soir) - Distribuée aux chefs de partis politiques, personnalités nationales, académiciens, responsables d'organisations professionnelles, syndicales et estudiantines, associations de la société civile ainsi qu'aux directeurs d'institutions médiatiques comme annoncé par le président de la République, lors de sa traditionnelle rencontre avec des patrons de médias, il y a une semaine, cette mouture fait sienne la «philosophie» du chef de l'Etat contenue dans sa lettre d'orientation au panel d'experts chargés de son élaboration en janvier dernier. Dont notamment l'exigence d'un Etat de droit déclinée sous nombre de propositions allant dans le sens de renforcer les droits fondamentaux et les libertés publiques, la séparation des pouvoirs, une justice indépendante ainsi que la moralisation de la vie publique. Régime déclaratif Ainsi, le texte propose l'introduction du régime déclaratif pour les réunions, les manifestations et la création des associations. Avec, en sus, des dispositions contraignant les institutions et les pouvoirs publics à respecter les dispositions de la Constitution en relation avec les libertés publiques et les droits fondamentaux. Autre nouveauté, toujours au chapitre des droits fondamentaux et des libertés publiques, l'administration qui ne pourra plus interdire la création des partis politiques. Toujours dans ce chapitre, le texte suggère une série d'amendements dont celui consacrant le droit à la vie, la pénalisation de la torture et la traite des êtres humains, le droit à la réparation pour toute arrestation ou garde à vue et ainsi que la protection de la vie privée. Le ministre de la Justice écarté du CSM Pour consacrer davantage l'indépendance de la justice, un des fondamentaux de l'Etat de droit, le «brouillon» de la nouvelle Constitution préconise la constitutionnalisation de l'inamovibilité du juge et les garanties y afférentes, et la constitutionnalisation de la composition du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), avec mise à l'écart du ministre de la Justice de son poste de vice-président et du procureur général auprès de la Cour suprême qui ne font plus partie du Conseil supérieur de la magistrature. Ceci dit, le texte comprend, entre autres «nouveautés» par rapport à la Constitution de février 2016, la dernière mijotée par le Président déchu, la proposition de la création du poste de vice-président de la République que le chef de l'Etat aura le loisir de choisir, la suppression du poste de Premier ministre avec le retour au poste du chef du gouvernement, suppression du droit au chef de l'Etat de légiférer par ordonnance durant les vacances parlementaires. Un droit que le président de la République sauvegarde en cas de vacance de l'APN ou durant l'état d'exception, avec obligation que les textes promulgués durant cette période soient soumis au Parlement dans les délais requis. Autre nouveauté de cet avant-projet, l'obligation faite au gouvernement d'accompagner les projets de loi par des textes d'application, faute de quoi ils ne seront pas programmés à l'ordre du jour de l'APN. Cour constitutionnelle et suppression du tiers présidentiel au Sénat Cette mouture consacre également la suppression du Conseil constitutionnel qui sera remplacé par une Cour constitutionnelle «dont les membres seront élus par leurs pairs». Aussi, le Conseil de la Nation dont les voix se font de plus en plus nombreuses quant à l'impératif de sa suppression, les motifs de sa création au milieu de la décennie rouge du terrorisme islamiste n'étant plus de mise, est «partiellement» touché par cette mouture. S'il le maintient, en effet, le texte propose la suppression du tiers présidentiel ou «tiers bloquant» avec élection de ses 144 membres au suffrage universel indirect. Quant à l'état d'urgence, sa durée est limitée à une période de 30 jours, renouvelable après quitus du Parlement qui aura également la prérogative de renouveler la durée de l'état d'exception, limitée, elle, à 60 jours. Tamazight, constante «immuable» La mouture de l'avant-projet de révision constitutionnelle soustrait également la langue amazighe de tout amendement constitutionnel ultérieur, elle qui était exclue de la liste des constantes nationales immuables de la Constitution en cours. Ainsi, le statut de la langue chère à feu Mammeri intégrera, à la faveur de cet amendement, la liste des constantes intangibles qui ne pourra jamais faire l'objet de révision. Tout comme il propose la constitutionnalisation du mouvement populaire du 22 février 2019 dans le préambule de la Constitution. Pas de trace du poste de médiateur de la République Une remarque, cependant, le texte qui constitutionnalise l'Autorité nationale indépendante des élections (Anie) ne fait aucune mention du poste de médiateur de la République qu'occupe Karim Younès depuis le 17 février écoulé sur décision du président de la République. M. K.