Plusieurs activités commerciales tombées sous le décret du mois de mars dernier font de la résistance. Cafés, enseignements parallèles de soutien et transports clandestins ont bravé les interdits et le respect du protocole sanitaire pour endiguer la propagation du Covid-19. Rym Nasri - Alger (Le Soir) - Depuis la levée graduelle du confinement, la plupart des commerces ont rouvert après plus de trois mois de chômage forcé. Ceux qui ne sont pas encore autorisés à reprendre le service, interpellent de temps à autre les pouvoirs publics sur leur situation. Ils espèrent voir leur activité relancée le plus tôt possible afin d'éviter la faillite. Une détresse qui, toujours est-il, ne les autorise pas à enfreindre les décisions fermes des autorités. Pourtant, ils sont nombreux les commerçants qui ont forcé la restriction de fermeture. Pour certains, notamment ceux dont les magasins sont situés loin des artères très fréquentées et à l'abri des regards, cette fermeture n'a pas été de longue durée. C'est le cas des cafetiers qui se sont aventurés à ouvrir leurs rideaux à moitié. À peine les premières semaines du confinement écoulées, des cafés ont manifesté une résistance certaine. À rideaux mi-clos, ils ont repris leur activité dans la clandestinité. Comme des voleurs, ces commerçants servent leurs clients en cachette, au grand bonheur des adeptes du café-presse. Un par un, les clients se penchent et accèdent discrètement au magasin, sans éveiller les soupçons. Ils récupèrent ainsi leur breuvage et ressortent vite avant de s'éloigner. Aujourd'hui, cette pratique se poursuit au vu et au su de tout le monde. Désormais, personne ne se cache. Même s'il n'y a plus de chaises ni de tables sur les terrasses de ces cafés, les clients préfèrent consommer sur place. Adossés au mur du même commerce, ils sirotent en petits groupes leurs cafés, tout en discutant sur la pandémie du nouveau coronavirus et les consignes sanitaires. Ironie du sort, eux-mêmes sont les premiers à être dans le déni et à bafouer ces mesures barrières. Les gobelets en papier ou en plastique sont ensuite abandonnés sur place. Les innombrables emballages jonchant le sol renseignent sur le nombre de clients qui sont passés par là. Affiliée à l'Association nationale des commerçants et artisans (ANCA), la commission des restaurants et des cafés de la wilaya d'Alger a d'ailleurs dénoncé ces pratiques. Selon elle, il s'agit de «certains cafetiers indélicats» qui travaillent au noir à rideau demi-baissé. Les adeptes du café, eux, s'interrogent sur la non-réouverture des cafés. «Pourquoi ne pas ouvrir les cafés et les autoriser à vendre leurs consommations à emporter comme le font les fast-foods, au lieu de laisser l'anarchie sévir ?», dira un jeune trentenaire. Des enseignants jouent avec la santé Les enseignants dispensant des cours particuliers, eux aussi, bravent les interdits. Ils continuent à donner des cours de rattrapage aux élèves des classes d'examen, notamment ceux qui doivent passer le BEM et le BAC. Sans aucun scrupule, certains enseignants accueillent leurs «clients» dans des salles exiguës sans ventilation, des garages ou des caves dans la plupart du temps. Des lieux à ne pas en douter devenus un terreau qui favorise la propagation du virus SARS-CoV-2. En effet, ils sont une dizaine de collégiens ou lycéens à s'entasser dans ces espaces étroits et fermés. C'est dire que l'«inconscience» et la cupidité des enseignants justifient-elles la prise de risque encourue aussi bien par ces professeurs que leurs apprenants ? Pourtant, la fermeture des établissements scolaires depuis le 12 mars dernier intervenait justement pour parer à la contamination par le Covid-19. Les taxis clandestins prennent le relais Depuis l'interdiction de circulation des taxis, les chauffeurs clandestins ont pris la relève. Ils acceptent femmes et enfants et même toute la famille pour donner l'impression que c'est un «voyage» familial. Même après la reprise des taxis urbains, ces clandestins ont continué d'assurer le service des longs trajets. Toujours inactifs, les chauffeurs de taxi inter-wilayas qui chôment depuis plus de quatre mois ont, eux aussi, été suppléés par les taxis clandestins. La Coordination des chauffeurs taxi de la wilaya d'Alger, affiliée à l'UGTA (Union générale des travailleurs algériens), dénonce cette pratique illégale. «Ces clandestins ont saisi l'occasion de l'absence forcée des taxis et profitent de la situation en appliquant des tarifs exorbitants. D'ailleurs, aucune mesure barrière n'est observée ni respectée par ces intrus, sachant que ces transporteurs échappent à tout contrôle», déplore le secrétaire général de la coordination, Nasser Smida. Avec la récente mesure interdisant le trafic inter-wilayas, cette situation s'est plus au moins estompée, ces derniers jours. Ry. N.