Dans son intervention, le Dr Zerouala, spécialiste des maladies du sang, nous éclaire sur les différentes étapes par lesquelles l'Algérie est passée pour affronter la pandémie de coronavirus. Il explique l'efficacité des différents tests mais aussi comment le virus, qui a fait son apparition il y a près de 7 mois, a connu une baisse notoire des contaminations, mais le mal est toujours là et la vigilance reste de mise. Un conseil scientifique est mis en place dans notre pays. Il fait une évaluation quotidienne globale et dans chaque wilaya du nombre de sujets infectés, des malades hospitalisés et ceux admis dans les centres de réanimation, des décès et des sujets guéris. La tâche n'est pas facile, elle exige une énergie physique et mentale à toute épreuve. Il faut rendre hommage à ce conseil et le meilleur moyen de l'aider, c'est d'observer ses recommandations. Le Dr Zerouala, qui, à l'instar de beaucoup d'autres médecins exerçant dans le secteur privé qui ont gardé leurs cabinets ouverts aux patients durant la pire période de la pandémie, souligne : «Comparativement au rush de juillet et du début août, où sur 10 consultations 7 patients présentaient des signes cliniques de Covid-19 confirmés par le scanner thoracique, qui n'est en fait qu'un examen d'orientation et non de certitude, l'examen sérologique, une vingtaine de jours plus tard, voire quelques mois, vient entériner le diagnostic avec l'apparition des anticorps. Nous assistons fin août début septembre à une diminution sensible des malades qui viennent consulter.» Il avance un argumentaire à cette diminution, entre autres, «l'automédication. Les patients se rendent directement chez le pharmacien dès qu'ils ressentent des signes de suspicion de la maladie. Le pharmacien, à son tour, leur délivre tout le protocole thérapeutique symptomatique en passant par l'azithromycine, qui est un antibiotique qui ne peut être servi que sur prescription médicale. Je passe sur les compléments alimentaires, forts onéreux et souvent inutiles que le pharmacien remet. Zinc et vitamine C sont à l'honneur. Ils sont dans des combinaisons dont l'ensemble n'a aucune efficacité. Souvent, ils ne sont pas dans des concentrations optimales pour produire des effets. Aussi j'avertis le consommateur (le patient) pour qu'il exige un seul élément, voire deux dans un seul produit. Un surplus d'éléments vont se retrouver éliminés dans les matières fécales ou dans les urines ou plus dangereusement non métabolisés par le foie, accumulés dans le sang et devenir toxiques ». Ne voulant pas jeter la pierre à tous les pharmaciens, il précise : « J'invite le ministère de l'Industrie pharmaceutique à protéger le consommateur en mettant un terme à l'importation de produits sensibles par des gens non qualifiés. La tâche du médecin est de prescrire un traitement et non des compléments alimentaires qui ne remplacent jamais un régime alimentaire sain. À l'instar des pays occidentaux, les compléments alimentaires peuvent être distribués dans les grandes surfaces commerciales sous l'œil attentif de conseillers commerciaux. Deuxième explication, à mon humble avis, de la diminution des cas de Covid : la prise de conscience de la grande partie de la population qui arrive à intérioriser la dangerosité du fléau et qui se protège en appliquant les recommandations du personnel médical. Distanciation, lavages fréquents au savon des mains et port du masque en toute circonstance. Le virus corona n'a pas dit son dernier mot. Il nous faut vivre avec et continuer à appliquer les gestes barrières». Naïma Yachir Dans un entretien express, le Dr Zérouala, spécialiste des maladies du sang, explique les différents diagnostics du Covid-19 et les éléments biologiques de son évolution. Le Soir d'Algérie : Quels sont les tests et leur efficacité ? Dr Zérouala : La PCR est l'examen au laboratoire qui est un test virologique qui montre si on est contagieux ou pas. Il s'agit de mettre un bâtonnet au fond du nez pour aller chercher des sécrétions que le laboratoire étudiera à la recherche du virus. Ce test n'est pas fiable à 100%. Il y a des marges d'erreur qui peuvent être dues à un mauvais prélèvement. Le test sûr est le prélèvement salivaire que le patient peut faire lui-même, la technique n'est pas encore courante. Qui est candidat à la PCR ? C'est le patient qui présente des signes cliniques évoquant le corona-virus : fatigue, maux de tête, fièvre, perte de l'odorat, perte du goût, diarrhée, toux, plus gravement gêne respiratoire avec suffocation, des éruptions sont décrites aussi. Le test intéresse également les sujets-contacts. Ce sont les personnes qui étaient en contact avec celui qui est infecté. Cela permet de les répertorier, de les séparer des sujets sains en les confinant en quatorzaine, voire, on parle de plus en plus de huitaine. Les sujets «test-positif» sont isolés pendant quelques jours qui correspondent à la période où ils peuvent être contagieux. Cela peut être huit jours, quatorze jours... l'on n'est pas encore certain de la période où le sujet reste encore contagieux. Pour pallier cette incertitude, les testés positifs doivent continuer à respecter les gestes barrières au même titre que toute la population. Quel est l'intérêt de la PCR ? Un test positif confirme le diagnostic de Covid-19. Il est souvent réalisé en ambulatoire. Si le test est négatif, et devant une forte suspicion de Covid, il doit être refait entre le deuxième et le septième jour. Après, la sensibilité du test s'amenuise et l'on passera à une autre technique qui va être développée. Devant toute agression infectieuse, virale, bactérienne... l'individu se défend en produisant des anticorps. Dans le cas du Covid-19, il produit des anticorps quelques jours ou plusieurs jours après le contact. Il s'agit de la sérologie qui confirme que le patient a été en contact avec le virus. Ces anticorps sont les IgM, les premiers qui sont sécrétés en première intention. Leur présence indique une infection en cours. Le laboratoire identifie aussi les anticorps IgG. Si les IgM augmentent vers la première semaine qui suit l'infection, les IgG plus tard et peuvent durer plusieurs mois. Ces derniers sont-ils témoins d'une immunité durable ? Difficile de répondre à cette question. Le sujet infecté auparavant, qui montre une sérologie positive plusieurs jours après avoir été infecté, est-il contagieux ? Difficile à l'heure actuelle de trancher. Y-a-il une solution ? Oui. C'est de continuer à appliquer les gestes barrières, masque, lavages au savon et distanciation. Je voudrais signaler que chez certains patients atteints formellement de Covid, la sérologie peut être négative. Ce sont des patients qui n'ont plus d'immunité, porteurs de certaines affections chroniques comme les cancers ou certaines maladies dites de système. Ce sont des patients qui ont été très réceptifs au coronavirus. Quelle est la place du scanner thoracique ? Est-il utile ? Mon expérience me dit oui. Un bon examen d'orientation. À l'heure où le test PCR n'est pas très répandu, le scanner thoracique reste un bon outil diagnostique confirmé quelques jours plus tard par la sérologie. Un bon point pour les centres d'imagerie qui nous ont aidés, nous les cliniciens, à prendre en charge correctement les patients Covid. Un bon point également pour les laboratoires biologiques qui ont confirmé leur performance au même niveau que les laboratoires internationaux. Notre souhait, c'est que cette couverture médicale s'étende à tout notre pays. Le but de ma contribution est de dire stop à l'alarmisme et à la panique. Stop également aux rumeurs et aux fake news. Il faut, en revanche, rester vigilant. Ce virus a une vitesse de propagation surprenante. Il est dangereux et peut causer des dégâts parfois irréversibles, voire entraîner la mort. Enfin, je voudrais signaler qu'il n'y a pas de traitement antiviral. Les médicaments que nous utilisons pour traiter nos malades sont dirigés contre les symptômes. Ils améliorent le confort du patient et préviennent les complications. Au fur et à mesure de l'observation de ce virus quant à sa morbidité, des progrès ont été faits à travers le monde entier, y compris notre pays pour la prise en charge des malades dont la mortalité a fortement diminué. Nous attendons le traitement ultime qui est le vaccin. N. Y.