L�enclavement, le ch�mage, la malvie, le d�ficit en �quipements publics sont autant d�insuffisances dont souffre la population du patelin de Sidi-Abdellah Moulay Chekfa, ce marabout venu du Maroc qui s�est �tabli au milieu du XVe si�cle dans cette r�gion. Le visiteur de cette commune est frapp� par l��tat d�plorable des lieux : un village colonial compos� essentiellement d�un amas d�habitations et de commerces avec des toitures en tuile qui menacent ruine, des ordures jonchant le sol, des trottoirs d�fonc�s, des routes non am�nag�es, les quelques �difices publics attendent d�sesp�r�ment depuis belle lurette quelques coups de peinture. Une ancienne �cole primaire qui menace ruine sert de �refuge� pour certains services techniques qui ont du mal � trouver �un g�te� pour s�installer et accomplir leur mission en d�pit de l�expertise du CTC exigeant l��vacuation des lieux. Faute d�un march� de fruits et l�gumes et r�pondant aux exigences d�une activit� commerciale saine, des �tals de fortune sont dress�s sur les trottoirs par des vendeurs � la sauvette dont l��ge varie entre 15 et 60 ans. Sous une chaleur suffocante, ils vendent des l�gumes, des fruits et de la galette maison pour aider leurs familles fortement touch�es par la crise. En parcourant les ruelles de certaines localit�s comme Bou�sfour, Belouta, Dridra, nous avons �t� surpris par la mis�re qui y r�gne : plus de 40 ans apr�s l�ind�pendance, des familles s�entassent encore dans des taudis d�pourvus des conditions les plus �l�mentaires. Hormis quelques habitations en cours de r�alisation, le renouveau rural initi� par le d�partement de Rachid Bena�ssa est un vain mot. D�ficit en �quipements publics Il convient de signaler qu�en d�pit de son statut de chef-lieu de da�ra depuis 1991, Chekfa demeure d�pourvue de certains �quipements publics, comme une antenne locale de la Sonelgaz, une banque... Par ailleurs, faute d�un bloc administratif abritant les services techniques, ceux-ci sont entass�s dans un ancien si�ge de kasma et dans l�ex-�cole primaire Boughrira-Allaoua mena�ant ruine elle aussi. Depuis l�ind�pendance� 300 logements sociaux En mati�re de d�veloppement local, les citoyens avec lesquels nous nous sommes entretenus sont unanimes � dire que beaucoup reste � faire pour l�am�lioration du cadre de vie des citoyens : l�am�nagement des quartiers, le d�senclavement des mechtas, la r�habilitation des �coles primaires et la r�alisation de nouveaux �quipements publics dont un h�pital et un bloc administratif. Il convient de signaler que le logement et l�emploi constituent les pr�occupations majeures des citoyens de cette commune. Selon certaines indiscr�tions, on affirme que depuis l�ind�pendance la commune n�a b�n�fici� que d�environ 300 logements sociaux locatifs. Des r�alisations en de�� des attentes de la population locale. On avance le chiffre de 3 000 demandeurs de logement social. D�autre part, la r�novation du centre du village qui semble �tre une pr�occupation des responsables locaux et des citoyens bute sur le probl�me de l�indivision et l�inexistence d�assiettes fonci�res pour la r�alisation d�un nouveau centre. Un facteur qui constitue un obstacle majeur pour l�extension urbanistique de la commune qui, curieusement, est �encercl�e � par des cimeti�res. Selon certains, le patelin de Sidi-Abdellah Moulay Chekfa est sous l�effet d�une mal�diction. Tirant profit de notre pr�sence dans cette r�gion o� le terrorisme a fait environ 100 victimes, un membre du comit� du quartier de Boughten nous a exprim� son m�contentement quant aux lenteurs du projet de recasement de 30 familles habitant des baraques de fortune dans la cit� jouxtant la si�ge de la s�ret� de da�ra. Il tra�ne en d�pit des engagements tenus par la direction du logement et des �quipements publics. D�autre part et concernant les recettes communales, Chekfa dispose de l�important march� de gros de fruits et l�gumes de Djimar, une importante source pour la recette de la commune ; mais malheureusement, il se trouve dans un �tat d�abandon total : un terrain vague d�pourvu de toutes commodit�s exig�es par ce genre d�espace. Selon des sources locales, il est lou� � plus de 850 millions de centimes. On apprend �galement que l�abattoir est ferm� depuis plus de deux ans pour manque d�hygi�ne, ce qui constitue un manque � gagner pour une commune dont l�actuelle r�alit� de son parc r�sume � lui seul sa sant� financi�re. La sant�... malade La nouvelle r�organisation des structures sanitaires �labor�e par le minist�re de la Sant� a, selon un praticien de la r�gion, fortement p�nalis� Chekfa. Comment se fait-il qu�une commune montagneuse de 5 000 �mes soit d�sign�e pour abriter le si�ge de la direction de l��tablissement public de sant� de proximit� (EPSP) au d�triment du chef-lieu de da�ra dont la population est estim�e 30 000 �mes ? �C�est un non-sens de la part de nos d�cideurs�, a-t-il ajout�. Par ailleurs, la polyclinique Chibout-Mohamed est d�pourvue d�un service de maternit� et d�un point de garde nocturne, ce qui contraint les habitants des communes de Chekfa et Bordj Thar � se d�placer vers l��tablissement public hospitalier de Taher pour un �ventuel accouchement ou pour une urgence m�dicale avec tous les risques encourus, notamment la nuit. Un groupe d�habitants rencontr� nous a expos� le probl�me des salles de soins qui demeurent toujours ferm�es dans un certain nombre de localit�s et hameaux comme � Sbet et Dridra. La mis�re au quotidien Faute de zone d�activit�, le ch�mage constitue une bombe � retardement dans une r�gion � vocation agropastorale. Au milieu des ann�es 1990, le terrorisme a provoqu� un exode massif des habitants des r�gions montagneuses qui disposaient d�une importante �conomie de subsistance vers Taher et Jijel. Les localit�s de Ouled Messaoud, Amercha, Ourtane, Briri, Boumelihe, Belouta, El-Ghbar ont �t� fortement touch�es par cete situation qui a provoqu� la propagation des poches de mis�re, les agriculteurs ont vendu leur b�tail et abandonn� leurs terres pour aller avec armes et bagages s�installer dans des cit�s-dortoirs � Taher et Jijel. A l�instar d�autres r�gions du pays, Chekfa a �t� fortement touch�e par le processus de dissolution des entreprises publiques qui a eu lieu au milieu des ann�es 1990 suite au plan d�ajustement structurel impos� par le FMI. Celui-ci a laiss�, selon certaines sources locales, plus de 1 500 personnes sur le carreau. Une situation qui a accentu� la pr�carit� dans une r�gion o� la vie d�une bonne partie de la population locale demeure tributaire des pensions. Un g�rant de commerce connu sur la place locale nous a affirm� que l�activit� de son �tablissement a nettement baiss� ces derni�res ann�es. �Si �a continue comme �a, je risque de fermer mon commerce et de changer de bled�, a-t-il ajout�, m�content. Un sentiment partag� par un grand nombre de commer�ants avec qui nous avons discut� lors de notre passage dans cette commune, ou plut�t cit�-dortoir, pour reprendre l�expression de Hussein, ex-�tudiant en sociologie, chauffeur de bus chez un transporteur priv�. En parcourant les routes et ruelles du chef-lieu de la commune, nous avons �t� surpris par la mis�re qui r�gne en ma�tresse des lieux. Des gosses aux visages p�les, un corps ch�tif, modestement habill�s exposent sous un soleil de plomb, sur le trottoir, des l�gumes et des fruits, de la galette maison et des figues de Barbarie. Sur les visages de ces vendeurs � la sauvette, dont un grand nombre a quitt� les bancs de l��cole pr�matur�ment, constamment harcel�s par les agents de l�ordre, se lit une profonde tristesse. Un tableau �mouvant qui contredit les discours optimistes d�velopp�s par les officiels. Faute d�opportunit�s d�embauche, un grand nombre de jeunes ont quitt� leur bourgade vers d�autres cieux, principalement Alger, � la recherche d�un poste d�emploi qui se fait de plus en plus rare en cette conjoncture �conomique des plus difficiles. Selon certaines sources, le nombre de coiffeurs originaires de Chekfa qui se sont �tablis en France avoisine les 100. Nous avons �t� frapp�s par l��tat d�abandon dans lequel se trouvent les locaux r�alis�s dans le cadre du projet initi� par le pr�sident de la R�publique. Le caf�, un refuge forc� Le secteur de la culture souffre d�un d�ficit, la commune ne comptant qu�un centre culturel dont la gestion est assur�e par la direction de la jeunesse et des sports. Il convient de signaler que la fonctionnalit� de cet �tablissement culturel bute sur un nombre de contraintes dont l�absence d�un statut et de fiables subventions financi�res. Faute d�espaces de loisirs, les caf�s demeurent le refuge forc� des jeunes o� les parties de domino sont le lot quotidien des jeunes. Sur le chemin du retour vers Jijel, l�image d�une fillette vendant du metlou�, dont le corps fr�le et le visage p�le r�sument le v�cu quotidien de ces morts-vivants de cette bourgade� hant�e par la mal�diction des cimeti�res.