Un procès très attendu est programmé ce mercredi au tribunal de Dar-el-Beïda. Ali Ghediri, général major à la retraite et ancien candidat à la présidentielle de 2019, comparaîtra devant un juge après deux années d'incarcération. C'est donc un moment très spécial pour ses avocats, sa famille et son comité de soutien, très actif, car tous militent depuis tous ces longs mois en faveur de l'organisation d'un procès qui permettra à Ghediri de pouvoir s'exprimer, se défendre face à un tribunal. Son collectif de défense espère bien sûr un non-lieu et appelle à «rendre justice à un homme poursuivi sur la base d'un dossier vide», un dossier sans «consistance», affirment-ils «car toutes les charges retenues contre lui sont tombées». Explications : Ali Ghediri a été arrêté le 12 juin 2019 et placé le lendemain sous mandat de dépôt pour «intelligence avec l'étranger et entreprise de démoralisation de l'armée». L'opinion voit à ce moment en lui l'homme, le militaire qui s'était porté candidat à des élections périlleuses, incertaines, impossibles compte tenu de la période extrêmement sensible dans laquelle elles survenaient. Le candidat promet une Algérie meilleure, mais l'avènement du Hirak du 22 février laisse son projet inachevé. Les chefs d'accusation pour lesquels il se trouve en prison sont lourds, mais le principal grief finit par tomber quelques mois plus tard. Un appel introduit par ses avocats est examiné en juin 2020 par la chambre d'accusation d'Alger et cette dernière décide l'accusation « d'intelligence avec l'étranger et remise de documents à un Etat étranger visant à porter atteinte à la défense nationale et à l'économie nationale». Lors d'une conférence de presse tenue sur le sujet, Me Khaled Bourayou livrait un éclairage au sujet de cette accusation. «Ali Ghediri était accusé d'avoir transmis des documents de nature à porter atteinte à l'ANP et à l'économie nationale à un faussaire qui avait falsifié ses papiers, son identité pour devenir président d'un parti politique, une personne malhonnête qui l'avait contacté par téléphone, elle est en prison aujourd'hui et son jeu découvert.» Le dossier Ghediri contient désormais un seul chef d'accusation : «Participation en temps de paix à la démoralisation de l'armée.» Les avocats engagent un nouveau combat pour obtenir la libération de l'ancien candidat à la présidentielle de 2019. Un appel est déposé auprès de la Cour suprême qui tranche en sa faveur le 16 décembre dernier. Après examen du dossier, cette haute instance de justice relève le «ton péremptoire du juge qui a traité l'affaire». «En termes juridiques, cela veut dire que le magistrat a dépassé ses prérogatives et qu'il fallait au contraire aller vers la recherche de preuves», expliquent ses avocats. Le dossier est renvoyé vers la chambre d'accusation. Un vent d'espoir souffle. «Il n'y a plus rien à plaider dans ce dossier», déclare Me Bourayou. L'optimisme est de courte durée : le 13 juin 2021, la chambre d'accusation rejette une nouvelle fois la mise en liberté de Ali Ghediri et décide de renvoyer son dossier devant le tribunal criminel de Dar-el-Beïda. De prison, le mis en cause écrit une lettre (la seconde depuis son incarcération) dans laquelle il affirme à nouveau payer les conséquences de son engagement en faveur d'une Algérie meilleure, il se surnomme le «confiné politique». Me Aouicha Bekhti relate ses moments en prison : «Il lit beaucoup, il lit et relit, c'est sa passion, il n'attend rien, ne demande rien, il réclame juste un procès équitable.» Demain, Ali Ghediri sera face au juge... A. C.