La famille est rest�e sans nouvelles toute la matin�e quant � l�heure de l�arriv�e du corps de Abdelfateh de l�h�pital de Blida. A 15h pass�es, le corps arrive. Il a �t� difficile de frayer un chemin � l�ambulance. Djamel, aid� par des proches, implore la foule d�amis et de voisins, qui encercle la maison, de rester sereine. Irane Belkhedim-Alger (Le Soir) - �Nous voulons l�enterrer dans le calme�, dit-il. Des tentatives vaines puisque, d�s que les ambulanciers sortent le corps pour le mettre dans le cercueil, on l�enveloppe dans un drapeau alg�rien, des youyous fusent de partout. �Allah akbar�, �Allah akbar�, crient hommes et femmes, en pleurant. Le cordon de s�curit� improvis� par des habitants est vite bris� par la foule qui s�approche de la maison. La voiture du maire de la ville et du chef de da�ra est rest�e gar�e derri�re l�ambulance. Une fois le cercueil dans la maison, les portes sont ferm�es. Moment difficile ! L��motion est vive et la tension est grande, tout peut basculer � tout moment. Ammi Hocine, le p�re de Abdelfateh, �g� de 65 ans, sort, �puis�, et tente de calmer les jeunes d�cha�n�s et en col�re. Personne ne l�entend, personne ne le voit, la douleur est si grande. Le pr�sence des photographes et des cam�ras �trang�res amplifie la tension. Des citoyens hurlent l�injustice qu�ils vivent. �Il a �t� assassin� ! Ce n�est pas un criminel, ce n�est pas un enfant des rues !�, lance-t-on. Les propos du ministre de l�Int�rieur et des Collectivit�s locales, Dahou Ould Kablia, ont attis� la col�re de la population. �Il a �t� tu� par balle ; nous avons vu le corps. Nous le certifions, notre enfant n�est pas un casseur�, soutient Djamel, son oncle. La vue du corps l��meut et il laisse �chapper ses larmes. Quelques minutes � peine et le cercueil ressort, port� par la foule, sous les cris et les hurlements des jeunes, jusqu�� la mosqu�e Bilili, distante d�un kilom�tre. La pri�re du mort sera accomplie dans le calme et le corps est enterr� ensuite au cimeti�re, pas tr�s loin. Ould Kablia irrite la famille et la population locale D�s que la foule emporte le cercueil de Abdelfateh et dispara�t, la m�re de la victime sort jeter un dernier regard avant de s�effondrer. Farida, la s�ur, accourt pieds nus et hurle hyst�riquement. �Laissez-moi voir mon fr�re ! Ramenez-le, ramenez-le ! Je ne l�ai pas vu�. Un proche la rattrape et tente de la raisonner ; elle se d�bat, sa douleur est immense. Farida revit la m�me sc�ne, quand elle a appris la mort de son fr�re, elle a couru comme une folle dans la rue, pieds nus. Au m�me moment, son fr�re Djilali, celui que Abdelfateh allait chercher, s�affale contre un mur en pleurant, il explose, il s�est trop retenu. �Maman, je veux voir maman, maman o� es tu ?� Son cousin Fay�al r�ussit difficilement � le calmer et � le convaincre de ne pas aller vers sa m�re qui est malade, et lui propose d�aller se recueillir sur le corps � la mosqu�e. Ilham, la s�ur a�n�e, pleure dans la cour, Mohamed son autre fr�re a craqu� ce matin� Sa m�re allong�e sur son lit pleure doucement, elle est fatigu�e. Le matin, elle a fait sa s�ance d�h�modialyse, elle ne voulait pas y aller mais son m�decin a insist�, elle ne doit pas rater ses trois s�ances par semaine. �Quel courage ma fille ? D�o� vais-je puiser ce courage ? Mon enfant est parti si jeune !� dit-elle en pleurant. Ses bras rid�s sont tach�s de sang ; ce sont les traces de l�h�modialyse. Un drame que la famille tente de surmonter difficilement. �Abdelfateh �tait un gentil gar�on, pourquoi a-t-on dit que c�est un criminel ?� Des femmes en larmes l�entourent et ne l�aident pas trop � se calmer. Des voisines, des enseignantes, des amies et des proches sont venues se solidariser avec la famille Akriche qui se sent abandonn�e. Ici, tout le monde d�ment les propos du ministre de l�Int�rieur, largement diffus�s par les m�dias, la veille. Des propos qui ont attis� la douleur, la col�re et la rage de la population. �Nous voulons que l�on dise la v�rit�, c�est tout ce que nous demandons ! Abdelfateh a �t� tu� par balle. Ould Kablia doit faire un d�menti�, soutient son oncle Djamel, d�pass� par la situation. Il pr�cise que l�on ne peut pas certifier, pour le moment, qui a tu� Abdelfateh. De jeunes habitants t�moignent que l�agent de s�curit�, �g� de 32 ans, a re�u une balle perdue tir�e par un policier � la rue des Arabes. Une enqu�te a �t� ouverte pour d�terminer les coupables. Les Akriche n�en savent pas plus. Nous sommes sortis de Bou- Isma�l dans un climat de tension. Des jeunes laissent entendre qu�ils prendront leur revanche. Le silence des officiels exacerbe leur rage et leur sentiment d�abandon.