Par Hassane Zerrouky �Un clou chasse l�autre� dit-on. Apr�s la Tunisie, c�est l��gypte qui fait la une des m�dias. L�actualit� est peut-�tre ainsi faite, il n�en reste pas moins qu�en d�pit de l�alarmisme occidental, on assiste bien au cr�puscule des autocrates et des dictatures de ce monde arabe qui voulait rester en marge du vent de libert� qui souffle sur le monde. Il n�y a pas de raison que l�Am�rique latine soit parvenue � se d�barrasser de ses dictateurs, que l�Asie ait suivi le m�me chemin � la Cor�e du Sud, les Philippines, la Tha�lande � et que les pays arabes et certains r�gimes islamiques comme l�Iran y �chappent. Et ce, au nom d�une philosophie aussi vaseuse que ses promoteurs selon laquelle les principes de d�mocratie et de libert�, parce que n�s en Occident, seraient des valeurs �trang�res aux soci�t�s arabes et islamiques. A ce jeu-l� � si on pousse ce raisonnement jusqu�� l�absurde � on devrait rejeter la technologie et les derniers d�veloppements de la science, et tout ce qui va avec, parce que n�s et d�velopp�s en Occident ! Pour en revenir � l��gypte, de nombreux commentateurs agitent la menace islamiste en raison du poids de la confr�rie des Fr�res musulmans dans ce pays. A les suivre, les �gyptiens ont bien tort d�exiger le d�part de Hosni Moubarak. C�est vite oublier que le Ra�s a poursuivi la politique d�Anouar Sadate en encourageant le retour du religieux en �gypte tout en combattant d�une main de fer les mouvements nass�riens, progressistes, la�cs et de gauche. Ces derniers ont vu leur espace d�expression r�duit � presque rien. Mettant � profit cette situation, les Fr�res musulmans ont relev� la t�te, d�velopp� leurs r�seaux associatifs, l�aide sociale et scolaire, mis en place des r�seaux bancaires et financiers, fait main basse sur les organisations professionnelles et l�universit� �gyptienne. Au point o� ils sont presque parvenus � islamiser la soci�t� �gyptienne. Le tout sous le regard complaisant des Etats- Unis et de ses alli�s occidentaux pour qui la priorit� �tait de contrer l�ex-URSS et la menace �communiste� ! Les voil�, depuis l�effondrement de l�URSS et des pays socialistes de l�Europe de l�Est, qui feignent de d�couvrir la menace islamiste. Une menace dont a us� et abus� leur pion Hosni Moubarak pour se maintenir � vie au pouvoir. Or, ce ne sont pas les Fr�res musulmans qui sont � l�origine du vent de cette r�volte populaire en �gypte. En outre, personne ne conna�t leur poids r�el en �gypte, et ce, m�me s�ils repr�sentent une force importante. Qui plus est, ouverture politique aidant, les �Fr�res� seront incontournables, et ce, m�me si fid�les � leurs habitudes, ils h�siteront � se mettre en avant, pr�f�rant attendre de voir comment �voluera la situation. Et puis, il y a ces forces politiques de gauche, de centre-gauche et lib�rales, r�duites � l��tat de groupuscules par la r�pression du r�gime Moubarak mais qui peuvent, � la faveur du mouvement socio-politique actuel, gagner en visibilit� et rebondir. Enfin, il y a ces acteurs de la soci�t� civile, majoritairement jeunes, � l�origine de cette formidable mobilisation populaire par le bais d�internet, et qui ne vont pas se laisser voler la victoire. Comme en Tunisie, leurs mots d�ordre sont de nature la�que et d�mocratique. Peu ou pas de slogans islamistes. Et ce, sans compter que ce pays renferme des �lites � intellectuels, �crivains, artistes, universitaires, journalistes, avocats, comp�tences scientifiques � organis�es et non isol�es, comme c�est le cas en Alg�rie, qui vont peser sur le devenir de l��gypte. Mieux encore, vendredi dernier, jour de grande pri�re quand les Fr�res musulmans, s�rs de leur force, avaient donn� un ultimatum � Moubarak pour d�gager, chacun a bien vu que le �million� de personnes n��tait pas au rendez-vous. Le �vous allez voir ce que vous allez voir� n�a pas eu lieu ! En �gypte, comme chez nous, les choses ne sont pas simples : la crise actuelle ne peut �tre r�duite � un affrontement entre le r�gime et les islamistes comme tendent � le montrer certains m�dias occidentaux. Les Fr�res musulmans, tout comme l�aile lib�rale du PND (Parti national d�mocratique) au pouvoir, le savent : la partie est loin d��tre gagn�e.