Par Mourad N. Le Festival de Cannes a baiss� rideau. D�apr�s les sp�cialistes, sur place, ce fut un grand cru et l�une des meilleures �ditions de ces derni�res ann�es. L�actualit� politico-m�diatique (affaire DSK, notamment), le scandale du Danois Lars Von Trier (� propos d�Hitler), des starlettes de moins en moins �habill�es� (les robes transparentes...) et toutes les querelles de palais ne sont que du pass�... Le cin�ma, le vrai �tait au rendez- vous. La famille, les enfants, les p�res, les m�res ont souvent �t� au c�ur de ce cin�ma-l� et entre drames, com�dies sociales, road-movies, polars, film muet ou hallucin�, le jury pr�sid� par De Niro aura fait son bon choix. L�Am�ricain Terrence Malick a rafl� la Palme d�or avec son The tree of live (arbre de vie) et tout le monde aura reconnu l� une valeur refuge. Terrence Malick c�est du solide, de l�install�, de l�inattaquable. Sorte d'ermite aupr�s duquel le solitaire Clint Eastwood passerait pour un exhibitionniste branch�, le Malick aura �t� invisible � Cannes et celui qui n�aura tourn� que quatre films en presque 40 ans de carri�re suscite encore bien des myst�res en choisissant d�lib�r�ment de se taire. Les joyeux drilles du festival (Canal +, BFM, Paris Premi�re, etc.) avaient beau �chauffer le bendir� avant la projo du film, rien ne filtrait. Digne h�ritier des Griffith, Welles ou Kubrick, c�est en fait le seul cin�aste vivant encore capable de pousser les magnats � aligner des dizaines de millions de dollars pour des m�ditations lyriques � des brouillards philosophiques qui �chappent � toute logique et laissent parfois de marbre le grand public... Et le couperet est donc tomb� : apr�s la projection du film, deux grandes stars masculines, Sean Penn et Brad Pitt, ont perdu tout le clinquant hollywoodien et se sont fondues dans le grand dessein du ma�tre et ses ellipses vertigineuses ! Un roman familial avec ses m�sententes, ses inqui�tudes, ses d�ceptions, etc., aura �t� mis sur grand �cran et le grand Festival de Cannes (avec ses fragrances anglo-saxonnes, cette ann�e encore) l�aura couronn� sans que personne ou presque trouve � redire... Idem pour ce qui est des fr�res Dardenne et leur Grand Prix du jury (seconde r�compense cannoise apr�s la Palme d�or) pour le Gamin au v�lo. Un film para�t-il �mouvant et lumineux sur l�enfance en mal d�amour. Les r�alisateurs li�geois qui ne sont jamais rentr�s bredouilles de Cannes (deux Palmes d�or, un prix du jury et plusieurs prix d�interpr�tation auparavant) confirment l� leur int�r�t pour la jeunesse et poursuivent leur �uvre singuli�re alliant suspense fa�on thriller et sobre �motion sur les questions de famille d�chiquet�e. Il nous tarde donc de voir ces deux films o� de prime abord la r�alit� d�passe la fiction, et ce, avec talent ! Reste que, personnellement, je ne comprends toujours pas pourquoi le prix d�interpr�tation masculine � Jean Dujardin dans The artist, un film muet qui repose sur des haussements de sourcils et des mines de s�ducteur gomin�. Cela dit, l�ascension de ce Dujardin (r�v�l� dans le r�le de Loulou dans la s�rie Une gars, une fille) va faire du bruit chez les petits com�diens des s�ries TV. Passer du petit �cran au grand, �a ne tient pas qu�au talent, para�t-il... Soumis � une sorte de loi du silence �agr�ment�e� de connivences int�ress�es, les journalistes fran�ais (tous supports confondus) ont de quoi d�passer la fiction par la r�alit� des �choses�. Et l�, on revient � l�affaire DSK et � son traitement m�diatique. Diff�rences culturelles Dans la foul�e de son inculpation � New York, le d�sormais ex-patron du FMI aura �t� dans toutes les sauces. Entre vie priv�e et vie publique, une ligne jaune aurait �t� franchie par certains et comme de bien entendu, les Am�ricains n�auraient pas d� montrer le DSK menott�, le DSK dans ses petits souliers... La transparence � l�am�ricaine serait une folie ! Sur France 2, sur LCP, sur BFM, etc., que de vierges effarouch�es alors que l�on tait le nouveau b�b� de Sarko avec Carla, alors que l�on chuchote des rumeurs de chiottes sur des couples politico-m�diatiques (Montbourg-Pulvar, Borloo- Sch�nberg, Kouchner, Ockrent, etc.), alors que l�on cache encore la relation de Roland Dumas (en tant que ministre des AE) avec la fille du ministre syrien de la D�fense, alors que l�on minimise encore l�affaire Mazarine ou l�hypocrisie d�un couple s�par�, Hollande-Royal, en pleine campagne �lectorale... Cette fois-ci, faut surtout pas aller chercher midi � quatorze heures entre les draps sales du couple DSK-Sinclaire, la r�alit� d�passerait la fiction. Et la fiction, c�est secondaire, d�apr�s les donneurs de le�ons d�mocratique, journalistique, de dignit� humaine. �Tout ne doit pas �tre public�, ont scand� les �offusqu�s�, les sid�r�s par la mani�re dont leur Dominique a �t� trait�. Pourtant, comme pour Madoff ou plus r�cemment Ben Laden, la totalit� des m�dias mondiaux ont accept� les r�gles des Am�ricains et ont tous repris leurs st�r�otypes. En fait, et vu d�ici, le probl�me des Fran�ais est purement culturel. Ils tiennent encore � leur fameuse exception et pour eux, s�duire n�est pas violer, trahir n�est pas mentir et du moment qu�il n�y a pas mort d�homme� (dixit l�inusable Jack Lang) faut pas trop en rajouter... Enqu�ter, montrer ou s�arr�ter ne serait-ce un instant sur �l�objet du scandale�, la Nafissatou de Guin�e n�est pas la priorit� des m�dias fran�ais. Le �droit � l'information� aurait des limites dans un univers satur� d�informations et... il pourrait m�me raisonner avec le voyeurisme et la d�magogie. On croit r�ver ! Au pays o� le d�nigrement de l�autre est un sport national (bien plus que notre t�menchir ), fallait pas succomber � la transparence � l�am�ricaine. La grandeur et �le risque� du m�tier de journaliste � la fran�aise sont de ne pas tout dire... On appr�ciera selon notre culture � nous qui n�avons malheureusement pas d�affaires � la DSK � nous mettre sous la dent. Dommage. C�est peut-�tre pour �a qu�on reste bloqu�s dans la fiction alors que des r�alit�s peuvent tr�s bien la d�passer pour peu qu'on dise vrai !