Par Ammar Belhimer [email protected] Apr�s avoir brillamment r�ussi son examen d�autosaisine sur la soci�t� civile et la d�mocratie participative en juin dernier, le Conseil national �conomique et social s�est aussit�t remis � l��uvre, � la demande du pr�sident de la R�publique (dans le langage consacr� on parle de �saisine�) pour mener � terme �une concertation nationale sur la gouvernance du d�veloppement local�. Le communiqu� du Conseil des ministres du 28 ao�t dernier comporte deux longs paragraphes qui explicitent la saisine : il est explicitement attendu de lui qu�il anime un �large d�bat national� pour aboutir avant la fin de l�ann�e en cours � des assises nationales sur la gouvernance du d�veloppement local�. Suivent deux instructions majeures qui indiquent que les conclusions de ces assises sont partie int�grante du �programme national de r�formes� et que le gouvernement est �comptable de leur mise en �uvre�. Les observateurs avertis ont soulign� la mise en perspective historique in�dite des r�formes politiques initi�es, puisqu�qu�il s�agit de �faire progresser davantage le syst�me politique d�mocratique et pluraliste que les Alg�riennes et Alg�riens ont institu� voil� deux d�cennies�. D�aucuns verront, au moins, la r�habilitation des r�formes Hamrouche, longtemps et injustement rendues coupables de toutes nos d�rives. Voil� que le pr�sident les assume, lui qui d�clare par ailleurs explicitement initier les prochaines �tapes des r�formes politiques, y compris le projet de r�vision de la Constitution. Courtisans, bouffons et laudateurs �duqu�s au r�flexe pavlovien de l�acquiescement spontan� peinent � retrouver la direction des vents � venir ! Plus s�rieusement, l�exercice de saisine, qui date d�une d�cision du 2 mai 2001, porte sur �une concertation nationale�. Le dictionnaire associe le verbe se concerter � �s�entendre pour agir ensemble�. Comment agir ensemble dans un moment historique o� les Alg�riens ont perdu y compris l�habitude et la capacit� � s��couter, sans recourir � la violence, quelle qu�en soit la forme. Dans le contexte historique particulier que traverse notre pays, l�entente en question vise � panser et � soigner � dans le prolongement de la politique de r�conciliation nationale � les lignes de fracture ayant affect� la soci�t� d�une part, ses rapports � l�Etat d�autre part. Ce faisant, elle consolide le front int�rieur � un moment de fortes tensions et menaces ext�rieures imm�diates (r�gionales) de fragmentation sociale et territoriale. La v�ritable menace vient de l�absence des populations dans l�acte de gouvernance. Il s�agit donc de �s�entendre�. Cela suppose que l�exercice soit accompli par les parties en pr�sence de bonne foi, hors de toutes �h�g�monies de vues�. En d�autres termes, il ne s�agit pas de faire le proc�s de qui que ce soit mais d�asseoir les termes d�un accord en vue d�une action concert�e. Dans le m�me temps, indique la note d�organisation de la concertation nationale, il convient de �s��carter des rencontres alibis, de la routine, de la vision bureaucratique, ainsi que de toute h�g�monie de vue des pouvoirs publics�. Il s�agit, indiquet-on, d�une �ing�nierie de contact direct� qui implique �d��tre en mode �coute optimum de sorte � �largir le spectre de r�fraction de la parole restitu�e � toutes les populations cibles r�pertori�es�. Les voix critiques qui continuent de s�exprimer dans le prolongement du scepticisme affich� lors des premi�res assises de la soci�t� civile sont moins visibles aujourd�hui, mais elles nourrissent l�espoir d�un �chec de la transition d�mocratique pour des solutions cataclysmiques qui c�l�breraient d�finitivement la victoire de l�h�g�monie �trang�re sur ce qui reste d�espaces de souverainet�, nationalisme ou d�ind�pendance. Elles participent d�une sorte de nihilisme inhibiteur A ce titre, la saisine sur la gouvernance du d�veloppement locale s�inscrit en droite ligne des espoirs exprim�s par la soci�t� civile, constitu�e ou �mergente, puisqu�il est attendu du Cnes �de concourir � l��mergence de solutions locales et r�gionales propres � restaurer les distorsions et dysfonctionnements des syst�mes de gouvernance au plus proche des v�cus citoyens�. Il n�est pas attendu du Cnes de refaire � m�me s�il ne peut les ignorer � l�exercice confi� � la Commission de r�forme des missions de l�Etat dont les conclusions et recommandations demeurent malheureusement toujours d�actualit�, lorsqu�elles n�ont �t� carr�ment contourn�es pour arriver au r�sulter inverse de celui escompt� : celui d�un Etat efficace, anticipateur, innovant, garant de la justice sociale et de l��galit�. Le d�veloppement local est � diagnostiquer ici en termes de gouvernance des fondements d�un Etat solidaire, fort et responsable. Il s�agit d�appr�cier de fa�on critique le mode de constitution, de gestion, d�affectation/mobilisation/ r�partition des ressources � que ces ressources soient de nature financi�re, humaine ou de pouvoirs/ pr�rogatives. 400 communes restent encore en d�ficit budg�taire et vivent de subventions d��quilibre, les postes communaux sont des voies de garage humiliantes, r�tribu�s au rabais et qui rebutent les comp�tences les moins exigentes. La d�ligitimation de l�Etat, la violation de son impartialit�, la d�sorganisation des services publics ont fini par faire baisser les bras aux plus optimistes. La performance du mode de gouvernance des ressources est mesur�e en termes d�impacts sur les territoires et les populations dont les attentes ne sont plus seulement vitales (de �basic needs�) mais qualitativement sup�rieures, li�es � la participation, � la transparence, en un mot � l�Etat de droit. A ce titre, un focus particulier est accord� � la d�mocratie participative (qui concourt � l�am�lioration du bien-�tre imm�diat et quotidien), d�une part, et aux besoins particuliers de la jeunesse, d�autre part, pour en faire un �l�ment incontournable dans toutes les �tapes de cette concertation. De m�me que la participation de la femme doit �tre r�elle et non figurative ; et sa pr�sence visible. Les premi�res r�actions qui ont suivi l�annonce de mesures contraignantes pour l��largissement de la repr�sentation des femmes au sein des assembl�es �lues montrent � quel point la misogynie et le machisme, l�int�grisme et l�obscurantisme ont fait de cet objectif leur ennemi sacr�. Pauvre cause !