Par Arezki Metref [email protected] Sans doute influenc� par le cin�ma hollywoodien servi at home par la t�l�, j'ai souvent imagin� une pi�ce en clairobscur, �clair�e par le simple rai de lumi�re d'une lampe halog�ne, dans laquelle cogite un homme au cr�ne d�garni portant des lunettes cercl�es de m�tal dor�. Et souvent aussi je me suis dit que si l'initiative de fomenter des troubles dans n�importe quelle r�gion du monde, faire tomber des pr�sidents, manipuler des frustrations sociales, t�l�commander des �r�volutions� devait germer dans un cerveau avant de devenir r�alit�, eh bien ce serait dans le cerveau de cet homme-l�. Clich� ? Fantasme ? Je l'imagine en bretelles fleuries, cal� confortablement dans un fauteuil Rockefeller, agitant un gla�on dans un verre de Bourbon. Il se l�ve, arpente son bureau l'air concentr� et jette de temps � autre des notes � en anglais, bien s�r ! � sur un carnet cod�, vigilant, parano, se m�fiant m�me de son ombre... Hoover? Kissinger? Brezinsky ? Dules ? Cet homme est une synth�se d'agent secret, de diplomate, de spin doctor, un �tre composite p�tri dans la conscience de la primaut� d'un unique int�r�t, celui de l'Oncle Sam. Est-ce lui qui, comme le subodorent les complotistes, a pens� le �printemps arabe� ? Est-ce dans sa t�te barbel�e qu'est n�e l'id�e de pousser Ben Ali � prendre la poudre d'escampette et � r�server son tr�ne encore ti�de aux cryptoislamistes mod�r�s mijot�s � la sauce turque, � faire payer � Moubarak toutes les conneries tant individuelles que collectives depuis Rams�s 2 (comme l��crivait ici l�ami Halli), � redistribuer les cartes au Moyen-Orient, � siffler la fin de jeu pour les dictatures socialisantes et nationalistes afin de c�der la place � un islamisme li� cul et chemise aux Etats-Unis ? Est-ce lui encore qui n�a de cesse de faire croire aux d�mocrates que la chute des dictateurs leur permettra de rafler la mise ? Est-ce lui enfin qui trouble leur vision au point de les emp�cher de regarder autour d�eux pour voir ce qu�il est advenu des �r�volutions� arabes ? Tu me diras que c'est trop facile d'imputer des �lans populaires lib�rateurs aux calculs fi�vreux du Grand Manipulateur, et tu me traiteras de cynique, de rabat-joie et de je ne sais quoi. On ne croit que ce qu�on voit et ces choses sont carr�ment invisibles. Certes, les peuples des pays o� r�gne la dictature en ont ras la ch�chia de ces r�gimes corrompus qui les m�nent par le bout de la cr�dulit� et de l'imposture patriotique. Oui, ils en ont ras les p�querettes de leurs �lites d�fendant mordicus ces r�gimes en pr�textant plaider pour l'ind�pendance, l'Etat national, etc., toutes choses confondues avec les int�r�ts de satrapes goulus et insatiables. Oui encore, les frustrations sociales des peuples sont r�elles et leurs aspirations � la libert� sont nobles. Seulement voil�, il est difficile de croire � la spontan�it� d'un mouvement d'ensemble aussi bien huil� qui converge quelques mois plus tard vers ce qui aurait d� para�tre comme une �vidence depuis le discours du Caire d'Obama, l'islamisation instrumentalis�e par les int�r�ts occidentaux. Le petit Monsieur � bretelles dans son bureau � la lumi�re tamis�e savait bien que les pouvoirs militaires exer�ant leur contr�le dans la plupart de ces pays en viendraient � s'articuler avec les islamistes comme le bras s'articule avec la main pour aller dans la m�me direction. Le petit homme dans son bureau clandestin, dont les pens�es se muent en s�isme pour les peuples, chacun de ses calculs aboutissant � des milliers de morts, a certainement pr�vu une issue � la situation dramatique qui se joue en Syrie. L�, plus qu'ailleurs peut-�tre, les islamistes phagocyteront le pouvoir au premier tr�buchement du r�gime. L'ampleur du mouvement islamiste est tel qu�Al Assad p�re avait d�, en 1982, an�antir Hama. Les islamistes �taient sorties dans la rue. Trois semaines durant, les combats avaient fait rage. Les canons, les tanks et les h�licopt�res de l�arm�e de Rifaat, le fr�re d�Assad, avaient ras� un tiers de la ville. 7 000, 10 000, 20 000 morts ? On ne le sait pas mais Hama fut un massacre sans nom... Les islamistes n�ont plus jamais relev� la t�te. Sont-ils morts pour autant ? Evidemment non ! La fronti�re commune avec la Turquie d'Erdogan complique la donne. Quel jeu joue-t-il celui-l� ? Je suis persuad� que le petit homme dans son bureau chichement �clair� a d� programmer jusqu'� ce dilemme entre le rejet sym�trique des dictatures et les manipulations g�ostrat�giques. Car vois-tu - et il doit bien le savoir - il a anticip� sur la r�action m�me que peut susciter la vigilance. Il sait que lorsqu'on argue d'un plan d'une telle ampleur, il y a toujours des quidams plus fut�s que la moyenne pour te faire un proc�s en parano�a. D'un autre c�t�, il sait aussi que quand tu dis qu'Al Assad dictateur d�conne un max, il y aura aussi des quidams plus �veill�s que la moyenne pour te traiter de vendu � l'imp�rialisme. J'aimerais bien pouvoir feuilleter le carnet cod� du petit homme � bretelles pour y d�busquer quelque chose qui indique ce qu'il pr�pare dans sa t�te de comploteur pour l'Alg�rie. Vraiment, je donnerais cher pour d�crypter ce qu�il nous cuisine et � quelle sauce, et avec qui, et pour quand� Des bruits courent comme quoi il sortirait de la naphtaline Anouar Haddam, de la s�nescence Abassi Madani, de sa r�serve le Qatar et la Turquie et avec tout �a, il nous ferait un destin ?� Clich� ? Fantasme. J��teins la t�l� !