Le tout sécuritaire cède le terrain à la velléité de réconciliation et à la recherche d'une solution politique négociée à la crise. Le ministre de l'Intérieur égyptien, le général Abdel Fattah Al Sissi, tend la main aux islamistes et sollicite un coup de pouce des Américains qu'il a exhortés d'user de leur influence sur les Frères musulmans. Sofiane Aït Iflis - Alger (Le Soir) Le processus politique, que le pouvoir de transition en Egypte essaie de mettre en branle, avec difficulté, il faut le dire, devant l'intransigeance des Frères musulmans qui s'estiment spoliés du pouvoir auquel ils ont accédé par les urnes, est souhaité par les Américains. Le secrétaire d'Etat à la défense, Chuck agel, a, depuis Washington, exhorté le général Al Sissi, l'homme fort du Caire, à aller dans la voie d'un processus politique sans exclusive, ouvert à tous. Le général Al Sissi le veut bien, mais faudra-t-il aussi que les frères musulmans acceptent de s'y inscrire, eux qui jurent maintenir leur bivouac jusqu'au retour de Mohamed Morsi aux commandes de l'Etat. La difficulté est surmontable, pense toutefois le général, l'homme qui a déposé Morsi le 3 juillet dernier, si les Américains s'y impliquent. Dans un entretien au Washington Post, publié le jour même où Hagel appelait à un processus ouvert, le général Al Sissi a demandé aux Etats-Unis d'user de leur «influence sur les Frères musulmans» pour mettre fin à la crise. En même temps, il a rassuré quant à la non-intervention de l'armée dans l'opération annoncée de dispersion des rassemblements des Frères musulmans. «Ceux qui mettront un terme à ces sit-in et nettoieront ces places, ce ne sont pas les militaires. Il y a une police civile qui est affectée à ces tâches.» L'assaut contre les sit-in que les partisans de Morsi poursuivent d'observer au Caire devrait intervenir avant la célébration de la fête de l'Aïd. Les risques d'affrontements et de nouveaux cadavres ne sont pas à écarter. Le général Al Sissi espère pouvoir réussir à dissuader les Frères musulmans de poursuivre leurs actions de protestation. Aussi at- il entamé dès dimanche des rencontres avec des responsables islamistes. L'homme fort du Caire tente de vendre sa nouvelle feuille de route, faite de dialogue, plaidant que la solution politique est possible à condition que toutes les parties rejettent les violences. Il s'engage ainsi pour l'armée qu'il représente. Les islamistes, notamment les Frères musulmans, restent réticents à cette offre de paix. Pour eux, c'est un marché de dupes que les militaires leur proposent. Aussi le commandant en chef de l'armée, qui mène les consultations, a dû se suffire, pour l'heure, de l'assentiment de quelques influents prédicateurs, dont des salafistes qui, les jours passés, avaient fait cause avec les pro-Morsi. Le général Al Sissi compte beaucoup sur ces prédicateurs, ainsi que sur les Américains, pour convaincre les Frères musulmans d'intégrer les négociations en cours. En rencontrant dimanche matin le secrétaire d'Etat américain adjoint William Burns, le PLJ, parti des Frères musulmans, a répété qu'il rejette toute solution qui ne se baserait pas sur «la légitimité institutionnelle et le rejet du coup d'Etat». Visiblement, Burns n'a pas réussi à exercer une influence sur les Frères musulmans. Le général Al Sissi devra faire avec.