[email protected] L'on doit à la vérité de rappeler que le rôle de boucliers des pouvoirs dévolus aux FLN, RND et MSP a bel et bien précédé l'arrivée aux affaires (de l'Etat s'entend) de Bouteflika. Estampillés fourriers du système, ces partis ont survécu au limogeage de Zeroual sans pour autant perdre de leur influence dans les tractations du sommet. D'un régime à l'autre n'ont-ils pas, du fait de cette pré-éminence, servi de «mécano» à l'impétrant de 1999 afin qu'il puisse asseoir une légitimité, précaire au départ ? Mieux encore, ne lui ont-ils pas permis de gouverner à l'abri du moindre contre-pouvoir susceptible d'émerger à partir du Parlement ? Or après plus de deux législatures, que reste-t-il de leur réputation de «verrouilleurs» attitrés après la série de décapitations dont ils firent l'objet ? De plus faible maillon de la triple alliance l'on sait déjà qu'il a choisi la rupture et le retour au giron de l'opposition. A la suite du débarquement de Soltani, le nouveau MSP de Mokri n'a pas hésité à recourir à la charrette de l'exclusion. Une opération d'épuration qui a, notamment, touché ceux parmi ses cadres qui ont opté pour les avantages d'un maroquin ministériel au détriment de la ligne du parti. Cela étant dit au sujet du courant islamo-collaborationniste, qu'en est-il par ailleurs du FLN et du RND qui, au «bon plaisir du prince», reçurent alternativement la grâce de conduire le gouvernement ? Ceux-là, bien plus affectés que ce qui se dit dans leur entourage, se contentent d'observer prudemment et sans commentaires l'évolution de la situation en haut lieu. Une expectative qui répond parfaitement à la nature de ces appareils et les contraint, en toute logique, à ne jamais caresser l'idée de la dissidence. Toujours présents dans le cabinet de transition que pilote Sellal, ils ne sont également pas avares de l'approbation lors des votes dans les deux Chambres. Sauf que cette discipline n'est qu'apparence et ne vaut guère celle du passé récent. Tout juste si elle ne relève pas de la ruse tactique, faute de bonnes boussoles leur indiquant le futur «nord» du pouvoir. En effet, en l'absence des Belkhadem et Ouyahia qui leur ont été d'excellents guides dans ce domaine, les caciques qui peuplent ces deux officines ont choisi le «Wait and see» leur donnant ainsi toute la latitude de ne pas «insulter», non pas l'avenir du pays, mais seulement le «devenir» de leurs carrières. En effet, en ces temps d'incertitudes, même les intérimaires qui les dirigent en sont réduits à aplanir les petites guerres de tranchées auxquelles se livrent, en interne, les clans. Alors que Belayat manie grossièrement la carotte et le bâton pour imposer ses choix dans la distribution des sinécures à l'APN, Bensalah, son alter ego au RND, lui, préfère gérer les impatiences par le huis clos. Un procédé qui, selon nos confrères,(1) lui vaut bien plus que des critiques mais une volée de bois vert de la part de tous les camps qui s'affrontent. Il est vrai qu'il existe une différence de culture politique entre le FLN et le RND. Et ce qui fait leur singularité se retrouve dans la façon d'aborder les crises structurelles ou parfois, de se repositionner dans l'échiquier des jeux de pouvoir. Autant le «frontisme» de vieille date est réfractaire à l'idée d'opposition et qu'il ne s'est que rarement accommodé de cet inconfort ; autant le «rassemblement» de fraîche création (1996) n'est qu'une machinerie, d'un système rénové au lendemain d'octobre 88, tout a fait disposé et disponible à des choix «iconoclastes». Anecdotiquement, cette tentation n'a-t-elle pas été illustrée justement par Ouyahia, lorsqu'en 2007 il fut à l'origine de ce qui, sur le moment, fut considéré comme un «dérapage et une assertion prématurée» quand il évoqua la succession de 2009 ! Un crime de lèse-majesté comme s'empressa d'en qualifier le sens un certain Belkhadem et que ne tardèrent pas à désavouer bruyamment les relais de campagne pour l'amendement de la Constitution. Cependant, loin d'être la marque d'un souci d'émancipation, l'affranchissement qui ne le «traverse» de l'intérieur que lors des cycles de changement, souligne plutôt le contraire. Hier républicain et éradicateur, frontalement opposé à l'islamisme politique, n'a-t-on pas redécouvert le RND dans un autre registre et dans une autre vie politique ? Celui de grand plaideur de la «fraternisation» pour le compte des référendums réconciliateur et amnistiant. Au plan de la gestion, n'était-il pas passé sans la moindre précaution d'usage d'un patriotisme économique et social au libéralisme le plus débridé et au bradage du tissu industriel ? A l'évidence la brutalité avec laquelle il a changé de cap sur tous les thèmes majeurs a fini par le vider de toute identité politique. En cela peut-il être encore comparable au FLN ou même prétendre à en être un antidote ? Bien qu'il ne sache cultiver que l'ambition de gouverner le FLN demeure, néanmoins, un appareil ayant préservé quelques pré-supposés doctrinaux qu'il fait valoir chaque fois qu'il se trouve en difficulté. C'est sûrement le cas actuellement de la mission d'un Belayat qui ne manque aucune occasion pour disserter sur ces fameux fondamentaux. A l'inverse et dans le même timing, que fait et dit Bensalah ? Rien. Lui, dont les approximations doctrinales sont notoires, se confine dans sa morgue de Président du Sénat, laissant les turbulences gagner en amplitude la maison du RND. Il est vrai que dans cette dernière, les conflits sont d'un tout autre ordre... B. H. (1) Lire ou relire les deux articles parus dans Le Soir d'Algérie du 18 août et relatifs au FLN et au RND.