Avec ce morceau de bravoure intitul� "Mise au point au SNPSSP" ( Le Soir D'Alg�rie du 07/11/04), le pr�sident du Syndicat National des Professeurs et Docents en Sciences M�dicales ( SNPDSM) a atteint certainement le point culminant de cette campagne de d�nigrement qui vise notre syndicat depuis sa derni�re gr�ve. Nous nous sommes bien relus, cherchant dans notre pr�c�dente mise au point (qui �tait destin�e � Mme Malika Boussouf pour son article du 27/10/04 et non pas au SNPDSM) ce qui a bien pu y d�noter d'une quelconque "agressivit� haineuse" pouvant justifier un tel �cart. En vain. Cependant, nous ne le suivrons pas sur le registre de l'insulte. Il nous para�t plus important, et surtout plus conforme � l'�thique de notre profession, de nous pencher sur les dessous de cette pol�mique qui enfle dans le champ m�diatique, et qui oppose, par syndicats interpos�s, certains praticiens hospitalo-universitaires aux praticiens sp�cialistes de sant� publique. Plus s�rieuse qu'une simple querelle de chapelle, elle traduit l'affrontement de deux conceptions, h�las inconciliables, de notre syst�me de sant� et dont l'issue sera d�terminante pour l'avenir de celui-ci. Les deux conceptions s'opposent certes sur la mani�re de concevoir l'organisation g�n�rale du syst�me de sant�, mais de mani�re plus aigu� encore, sur les rapports hi�rarchiques suppos�s r�gir ces deux corps de praticiens sp�cialistes exer�ant dans le secteur public, et subs�quemment leurs pr�rogatives et domaines d'intervention respectifs. Les �tudes de sp�cialit�, sanctionn�es par le dipl�me d'�tudes m�dicales sp�cialis�es (DEMS), d�bouchent sur deux carri�res diff�rentes dans le secteur public : - Aux praticiens sp�cialistes de sant� publique, incombe la mission principale d'assurer la couverture en soins sp�cialis�s � travers tout le territoire national. Cette mission s'inscrit en droite ligne de l'objectif de la "sant� pour tous" pr�n� par l'OMS, qui impose d'int�grer en tant qu'imp�ratifs incontournables dans l'organisation des services de sant� les principes de qualit�, de pertinence, de co�t-efficacit� et d'�quit�. Il suppose �galement l'�laboration de strat�gies innovantes aussi bien dans la pratique que dans la formation m�dicale, coh�rentes avec les efforts de r�forme du syst�me de sant� visant � atteindre ce m�me objectif. Libre au pr�sident du SNPDSM de consid�rer cela comme "slogans creux et dithyrambiques", il n'emp�che que ce n'est l� que la r�solution WHA 48.8 de l'Assembl�e mondiale de la sant� (mai 1995), et pour notre part, nous y croyons. C'est dans ce cadre que s'inscrit la lutte du SNPSSP pour donner au praticien sp�cialiste de sant� publique la place qui lui revient dans le syst�me de sant�, par la r�cup�ration de toutes ses pr�rogatives statutaires et par la mise en place d'un plan de carri�re propre. - Aux praticiens hospitalo-universitaires incombe une mission partag�e entre l'activit� hospitali�re et l' activit� universitaire (enseignement). Dans la conception du SNPSSP, qui se base tout simplement sur ce qui a cours partout ailleurs, les deux carri�res, si elles sont compl�mentaires par leurs missions sp�cifiques, sont parall�les et ind�pendantes, les deux corps se structurant s�par�ment chacun avec sa hi�rarchie propre. L'autre conception, pr�n�e par le SNPDSM, qui se fonde sur un �litisme corporatiste surann�, se r�f�rant de mani�re r�currente aux notions d'�establishment m�dical� et d'��chelle sociale des valeurs�, n'admet qu'une seule hi�rarchie, avec les praticiens hospitalo- universitaires � son sommet; la qualit� d'universitaire leur conf�rerait par essence une sup�riorit� sur tous les autres corps de praticiens, les habilitant � monopoliser la d�cision en mati�re de sant�. Dans ce mod�le alg�rien, unique au monde, la hi�rarchie universitaire, par d�finition valable uniquement � l'universit�, est impos�e aux autres corps de praticiens exer�ant dans le secteur de la sant�. Si l'on prend l'exemple de la France, un professeur de m�decine est professeur des universit�s et m�decin des h�pitaux. S'il doit s'installer dans le priv�, il exercera avec le titre de docteur, et non pas de professeur : il n'y a pas de confusion entre les deux titres. Un argument �voqu� pour �tayer cette vision consiste � confondre sciemment pyramide des soins et pyramide des personnels : effectivement, les soins sont hi�rarchis�s en fonction de leur complexit� croissante (soins primaires, secondaires et tertiaires). Le soin tertiaire se faisant pour l'essentiel dans les CHU (dont il ne repr�sente au demeurant qu'une infime part d'activit�), justifierait de placer les hospitalo-universitaires, �s qualit�s, au sommet de la pyramide des personnels de sant�. Pourtant, les professeurs de certaines disciplines ne relevant pas du soin tertiaire existant dans les CHU n'en sont pas moins hospitalo- universitaires � part enti�re. A l'inverse, un anesth�siste r�animateur non universitaire exer�ant dans un �tablissement hospitalier sp�cialis� ou dans un CHU ne pratique- t-il pas bel et bien du soin tertiaire? Bien s�r que si. Et cela ne fait pas de lui autre chose qu'un sp�cialiste de sant� publique. Car le soin dit tertiaire est avant tout une affaire de structures et de moyens, et n'est pas propre � une cat�gorie de praticiens sp�cialistes en particulier. Les nombreux hospitalo-universitaires exer�ant dans les secteurs sanitaires font-ils du soin tertiaire (qu'ils assureraient ainsi que le pr�tend le pr�sident du SNPDSM "sans moyens", l'on se demande comment ! Comment consid�rer alors les sp�cialistes de sant� publique exer�ant les m�mes activit�s dans les m�mes structures ? L'opposition entre soins pr�ventifs et soins curatifs peut-elle fonder une hi�rarchisation des personnel ? Si tel est le cas, un professeur en m�decine du travail "ne peut en aucun cas, � anciennet� �quivalente, se situer au m�me niveau" (selon la formule du pr�sident du SNPDSM) qu'un professeur en chirurgie. Ce serait bien �videmment absurde. Nous voyons bien l� les limites de ce raisonnement. Finalement, la pratique m�dicale sp�cialis�e, aussi bien dans son volet pr�ventif que curatif, est bien la m�me pour les deux corps. La hi�rarchisation des soins ne peut donc fonder une hi�rarchisation des personnels. Sous l'angle de la pratique m�dicale, affirmer une sup�riorit� par essence du praticien hospitalo-universitaire sur le praticien non universitaire rel�ve de l'a priori et du jugement de valeur sans base rationnelle. L'activit� d'enseignement estelle la "valeur ajout�e" qui justifierait cette sup�riorit� des hospitalouniversitaires ? Pourquoi n'est-elle pas alors reconnue pour les nombreux praticiens non universitaires qui participent � l'enseignement dans de nombreux services hospitalo- universitaires o� ils sont pr�sents, et auxquels est d�ni�e la qualit� d'enseignant associ�. La m�me remarque est valable pour la participation aux travaux de recherche. Pour illustrer la l�g�ret� de l'argument, un exemple concret : une formation organis�e par le tr�s officiel Institut national de la sant� publique, s'adressant en majorit� � des ma�tres-assistants, en particulier ceux planchant sur un projet de th�se de DESM. Les formateurs : non pas quelques hospitalo-universitaires de rang magistral, mais deux praticiens sp�cialistes de sant� publique. Le sujet ? "Initiation � la m�thodologie de la recherche clinique" ! Sans commentaire. Si l'enseignement � la facult�, � supposer qu'il soit pratiqu� par tous les hospitalo-universitaires, devait �tre cette valeur ajout�e qui fait la diff�rence, n'est-elle pas contrebalanc�e par l'investissement des praticiens de sant� publique dans la sant� communautaire ? La p�nibilit� des conditions d'exercice ne m�rite-t-elle pas aussi d'�tre prise en compte dans l'�chelle des valeurs? A en croire l'appr�ciation d�daigneuse qui est port�e par le pr�sident du SNPDSM sur les trois journ�es scientifiques organis�es par le SNPSSP (alors que la plupart des soci�t�s savantes se limitent � une journ�e annuelle), sans y avoir jamais assist� (alors que d'autres hospitalo-universitaires de haut rang, non rebut�s eux par le caract�re "r�gional" de ces manifestations, nous ont honor�s de leur participation) un foss� scientifique s�parerait les deux corps. Ignore-t-il que le temps o� l'universit� �tait l'unique d�positaire du savoir est r�volu : gr�ce au d�veloppement des nouvelles technologies de l'information et de l'Internet, la totalit� du savoir m�dical, sans aucune limite, est devenu accessible au m�decin le plus isol�, sans contraintes de temps ni de lieu? Plus encore, "tous les m�decins sont universitaires aussi bien le g�n�raliste que le sp�cialiste. La conception traditionnelle et r�ductrice de l'universit� est aujourd'hui d�pass�e. A l'�re du progr�s permanent, tout m�decin praticien doit avoir acc�s � la recherche clinique, notamment sur tout ce qui concerne la sant� publique (�tudes �pid�miologiques, recherche ambulatoire sur le terrain) qui, m�me se d�roulant tr�s loin des centres universitaires, n'en est pas moins n�cessaire, et n'en est pas moins d'essence universitaire". Le propos fera certainement bondir le pr�sident du SNPDSM qui criera � l'h�r�sie, pourtant cette citation n'est pas du pr�sident du SNPSSP, mais… d'un doyen de facult� de m�decine! ( M. BARZACH in Journ�es d'�tudes internationales OMS/ Conf�rence internationale des doyens des facult�s de m�decine de langue fran�aise, Bruxelles, avril 1996). Comment alors peut-on d�nier � ces praticiens la capacit� de progresser sur le plan scientifique, et d'acqu�rir une expertise praticienne de terrain, et de pouvoir �valuer leurs pairs ? Le pr�sident du SNPDSM affirme que les professeurs, en leur qualit� de ma�tres, sont les seuls aptes � pratiquer cette �valuation. Le titre de ma�tre, en usage dans le syst�me corporatif, tel qu'il existe dans les professions m�dicales, est donn� � celui qui" dirige le travail et enseigne aux disciples ou apprentis" (dictionnaire le Robert). Si cela est vrai pour les praticiens engag�s dans une carri�re universitaire, comment cela peut-il s'appliquer � des praticiens engag�s dans une carri�re diff�rente o� ils seraient encadr�s, ainsi que le pr�voit leur statut, non pas par des praticiens hospitalouniversitaires, mais par des praticiens sp�cialistes de sant� publique de grade sup�rieur ? Cette progression de carri�re en sant� publique a bel et bien exist� dans nos textes r�glementaires. Ceux-ci pr�voyaient m�me des passerelles horizontales vers la carri�re hospitalo-universitaire, mais ils ont �t� abrog�s sur la demande de la facult� de m�decine. Ce puritanisme scientifique pr�n� par le pr�sident du SNPDSM n'est-il pas simplement un alibi pour emp�cher les praticiens sp�cialistes de sant� publique de se voir reconna�tre une expertise justifiant leur pr�sence dans les structures de d�cision en sant�? A une certaine �poque o� presque tous les sp�cialistes du secteur public �taient de fait hospitalo- universitaires (les besoins de formation �taient alors la priorit�), ceux-ci ont d� assumer de pair leurs missions d'enseignement et de sant� publique praticienne, dans un mod�le exemplaire d'int�gration CHU-sant� communautaire, dont il reste peu d'exemples aujourd'hui (et il est regrettable d'ailleurs, que, parmi ceux-l�, nombreux sont ceux qui se sont vu mettre "sur la touche" pr�matur�ment.) La formation ayant fini par porter ses fruits, la d�mographie m�dicale a aujourd'hui bien chang�, et les sp�cialistes de sant� publique sont l� et sont majoritaires, pour remplir les missions pour lesquelles ils ont �t� form�s. Le moyen doit-il primer sur le but ? Si tel devait �tre le cas, ce serait au d�triment du syst�me de sant� tout entier. Quant � l'autre pomme de discorde, concernant la carte sanitaire et le statut des �tablissements de sant�, la question m�rite certainement d'�tre appr�hend�e autrement qu'� travers cette singuli�re fixation sur un seul service hospitalier de la capitale. Nous y reviendrons… P.-S. La r�f�rence au th� dans notre dernier droit de r�ponse se voulait un clin d'œil � la chronique de Hakim Laalam qui jouxte les �crits de Malika Boussouf (fumons du th�….) et ne comportait aucune autre insinuation. Si cela a pu donner lieu � des interpr�tations de nature � heurter la sensibilit� de Malika Boussouf, ce n'�tait nullement dans notre intention, et nous en sommes sinc�rement d�sol�s. Cela �tant, et pour revenir au fond du probl�me, en profane qu'elle admet �tre, Malika Boussouf n'est certainement pas qualifi�e pour statuer sur la recevabilit� ou non de nos arguments, pour l'essentiel, de nature technique, et en tout cas, les balayer comme elle l'a fait d'un revers de main sans prendre la peine d'en discuter, t�moigne pour le moins d'un parti pris qui confine � l'aveuglement, et qui la situe � mille lieues de "l'analyse objective". Quoi qu'en dise le pr�sident du SNPDSM. Par ailleurs, le SNPSSP vis� par l'article de Malika Boussouf est une personne morale, par d�finition "anonyme", car sans existence corporelle. Ceci explique que les d�clarations portant en-t�te et cachet du SNPSSP n'aient pas besoin de signature, encore moins de photo. Elles n'en sont pas moins assum�es par la totalit� du Bureau national. Conform�ment � ses statuts, le SNPSSP r�pond par la voix du pr�sident de son organe ex�cutif, qui n'en est que le porte-parole, et qui a d'ailleurs personnellement d�pos� le texte de la mise au point � la r�daction du Soir d' Alg�rie. Il n'y a donc aucun myst�re. Mais cela ne justifie pas de stigmatiser le pr�sident du SNPSSP, ainsi que le font aussi bien le pr�sident du SNPDSM que les repr�sentants du minist�re de la Sant� d'ailleurs, alors qu'il n'est que le porte-voix de ses adh�rents.