Le secrétaire général du Front de libération nationale, Amar Saâdani, s'en prend violemment à son prédécesseur, Abdelaziz Belkhadem, qu'il accuse ouvertement d'être celui qui «tire les ficelles» du mouvement de contestation qui le cible. Tentative de diversion ? Ce n'est pas exclu. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Mais alors, vraiment peu probable que l'ancien chef du gouvernement, très rompu aux mœurs du système auquel il a appartenu pendant des décennies, s'aventure à pareille manœuvre, après son «bannissement» spectaculaire par Abdelaziz Bouteflika, fin août dernier. En fait, ce que ne dit pas Saâdani publiquement, ce sont ses proches qui l'affirment en catimini : «Le véritable meneur de la contestation, ce n'est ni Belkhadem, ni Belayat, ni Abada. Il s'agit, bel et bien, de Tayeb Louh.» En réalité, c'est ce qui inquiète le plus Amar Saâdani. Car, auquel cas, il lui sera difficile de constituer «sa défense», sur le plan politique. Tayeb Louh, l'actuel ministre de la Justice, ne peut pas être accusé d'être un opposant à Abdelaziz Bouteflika, «le président de la République et du parti», comme aime à le répéter Saâdani. Loin s'en faut ! Il s'agit là, même, de l'un des plus proches et plus fidèles parmi les fidèles au patron d'El-Mouradia, comme l'atteste du reste si bien sa haute et si sensible fonction de ministre de la Justice, garde des Sceaux. Une fonction à laquelle Louh avait été propulsé à une période cruciale dans la carrière, voire même de la vie de Abdelaziz Bouteflika : à son retour du Val-de-Grâce et à la veille d'une présidentielle unique dans les annales. En septembre 2013, Bouteflika avait choisi Mourad Medelci au Conseil constitutionnel, Tayeb Belaïz au ministère de l'Intérieur, Tayeb Louh comme ministre de la Justice et ... Amar Saâdani à la tête du FLN, dans une sorte de dispositif de guerre en vue de se présenter comme candidat pour un quatrième mandat, dans les conditions que l'on sait. Lorsque, fin août 2013, Amar Saâdani avait été imposé de force à la tête de l'ex-parti unique par Bouteflika, Tayeb Louh était son principal appui. Il était même le seul ministre en exercice à l'être, contrairement à Amar Tou, Abdelaziz Ziari et Rachid Harraoubia par exemple. Un «manquement» à l'injonction venue d'El-Mouradia qui finira d'ailleurs par leur coûter leurs postes respectifs dans le gouvernement. Qu'est-ce qui aurait pu changer depuis, pour que Tayeb Louh change de position et d'attitude ? Car , dans l'entourage de Amar Saâdani, le doute n'est plus permis : «Tayeb Louh est bel et bien le meneur de la contestation pour la simple raison qu'il ambitionne de prendre la tête du parti.» Selon une source bien au fait des rouages du vieux parti, «ce ne sont pas les indices qui manquent : les contestataires viennent de louer une villa à El-Biar, sur les hauteurs d'Alger, à un jet de pierre seulement du siège du ministère de la Justice ! Certes, Louh ne s'implique pas encore publiquement mais il agit par le biais d'un proche à lui, un militant actuellement exerçant comme cadre au ministère du Travail, l'ancien département de Louh. Tandis qu'un conseiller à lui au ministère de la Justice est en train de contacter des membres du comité central auxquels il demande de signer une pétition contre le SG». Aussi, la couverture réservée aux activités du mouvement contestataire par certains médias proches du cercle présidentiel, conforte ce doute. Tout cela, même si Louh a pris le soin, via des émissaires, de rassurer Amar Saâdani. Mais à l'approche du congrès de l'ex-parti unique, la méfiance est de mise chez les uns et les autres.