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Variations sur une avant-première...
Publié dans Le Soir d'Algérie le 22 - 01 - 2015


Par Boualem Aïssaoui
Bien que huit décennies le séparent presque de sa date de naissance, si l'on s'en tient aux écritures de l'état civil, avec un front proéminent et finement dégarni qui ferait les beaux jours d'un héros d'une bande dessinée en ces temps de caricatures à l'infini, des cheveux qui ont su résister avec ou sans produits naturels à la grisaille de l'âge qui avance impitoyablement, un visage barré par une moustache délicatement taillée qui renvoie aux icônes du cinéma muet, des costumes sombres qui soulignent une allure discrètement entretenue, une démarche appliquée en tous lieux, une expression faciale sévère au premier abord, mais qui s'estompe aussitôt le premier échange et le premier signal bien reçus pour laisser place à un rire pudique propre aux gens de sa région natale rudement forgés par les rigueurs d'une géographie tourmentée, d'un climat aux températures souvent extrêmes et d'une histoire sans cesse en mouvement depuis les premiers signes de la préhistoire ; nul doute que l'homme, s'il devait répondre à des castings, pourrait, sans difficulté aucune, camper tout à la fois un inspecteur de police des «années noir et blanc» au palmarès bien rempli, un agent secret au long cours d'un pays du «grand froid» dont on échangerait cher la peau s'il était par hasard démasqué, un commissaire politique ou un procureur de la République qui s'impatiente d'être limogé pour rejoindre sa passion première faite d'images et de sons, un proviseur de lycée promis à une retraite méritée après «une mission parfaitement accomplie», un professeur de mathématiques capable de monter en un quart de tour une équation multiple comme on monterait un guet-apens, un auteur de romans policiers à succès qui répugnerait à «exploiter» le prénom de son épouse pour se faire publier clandestinement, et, à voir le personnage de si près, bien d'autres rôles qui lui iraient à merveille.
Tout, sauf cinéaste me diriez-vous ? Assurément non. Enfant des frontières qui n'aura pas eu le temps de vivre une adolescence insouciante, la guerre de Libération nationale ayant sonné la charge contre l'occupant colonial, la misère, l'injustice et la répression, et élevé très tôt sa région natale au rang d'une base de lancement et de repli pour ses assauts libérateurs, le voilà au gré d' une heureuse rencontre avec un «illuminé de la liberté et de la désobéissance» sorti tout droit, caméra au poing, des propres rangs du pays de l'adversaire, inscrit à la première école de cinéma de «l'Algérie en flammes».
Il grandit humainement et professionnellement au contact de l'Histoire qui s'écrit jour après jour, avec ses violences, ses turbulences, le combat des «damnés de la terre» et leurs héros connus ou anonymes, et c'est peut-être dans ce rapport précoce à «l'instant» historique, dans cet «instinct de l'instant», qu'il faut chercher et comprendre ses choix cinématographiques plus tard.
Précurseur dans le travail d'adaptation d'œuvres littéraires algériennes à l'écran au lendemain de l'indépendance, on sait combien l'œuvre de Mouloud Mammeri Thala connut des succès populaires après son passage au cinéma sous sa signature et sous un titre dont on dirait aujourd'hui qu'il emprunte à la langue de bois.
Avec plus de deux millions d'entrées selon les décomptes d'un critique averti, ce film, dont l'histoire met en scène un village héroïque et martyr, talonne jusqu'à ce jour en termes d'audience dans la mémoire collective La Bataille d'Alger, dédiée on le sait, avec une grande maîtrise de l'art cinématographique, au combat urbain jusqu'à faire douter plus d'un qu'il s'agit d'une fiction.
Pour avoir réalisé ce film dans l'exercice de ses fonctions, de directeur de l'Oncic (Office national pour le commerce et l'industrie cinématographique), on dit de lui qu'il aurait mobilisé, ou mieux, réquisitionné à son seul service tous les moyens techniques disponibles à l'époque, signant l'arrêt momentané ou définitif d'autres productions en cours de tournage, jugées de moindre importance, et qui trouveront bien plus tard un peu de réconfort en fournissant au moins pour l'une d'entre elles un beau prétexte pour la narration et la publication sous forme d'album chargé d'esquisses d'un parcours inachevé et davantage, une exposition photos fortement médiatisée, la première du genre, d'un film inabouti.
Sans vouloir monter un quelconque procès ou lever une polémique à titre rétroactif, disons aujourd'hui dans la sérénité qu'il n'y a pas eu, tout compte fait, sous cet angle-là, de perdant dans cette affaire.
De cette œuvre de fiction de moyenne durée, restée inachevée, qui se proposait de raconter une bataille célèbre menée conjointement et avec succès par des soldats de l'ALN et des fidayine au cœur d'une grande ville historique de l'Ouest algérien, œuvre qui devait faire partie d'un film à plusieurs volets, ceux qui ont vécu intensément les premières années de l'indépendance et approché les acteurs de la Révolution d'ici et d'ailleurs reconnaîtront sans nul doute avec émotion, parmi la masse des documents exposés et les photos des comédiens volontaires acquis selon les certitudes généreuses du moment, à la cause d'aider «un film révolutionnaire» à se faire, les visages des proches d'un grand serviteur de la cause algérienne, un Algérien d'origine espagnole qui avait fit la guerre d'Espagne du côté des Républicains, puis la guerre du Rif au Maroc contre les troupes espagnoles, et qui s'était rangé, ultime combat, dès les premières heures, aux côtés de l'Algérie dans sa lutte pour sa libération, une Algérie qui ne lui pardonnera pas plus tard son opposition à la rupture qui représentait à ses yeux l'avènement du 19 juin, mais qui finira par lui rendre hommage lors de son enterrement au cimetière d'El Alia où il repose enfin après une vie dense et intense qui mérite bien de se prolonger dans un scénario de film historique, afin que nul n'oublie que la Révolution algérienne était porteuse dans son essence d'un message universel.
Mais revenons à l'actualité et à notre propos et sans faire dans le faux suspense, parlons d'abord des conditions de réalisation d'un film sur l'Histoire de la guerre de Libération nationale, ses batailles et ses héros, dans l'Algérie d'aujourd'hui.
Si pour la loi sur le cinéma votée par le Parlement tout film traitant d'un sujet en rapport avec la Révolution devrait bénéficier obligatoirement en aval d'un accord du gouvernement avant sa réalisation, dans la réalité tout le monde a compris, malgré quelques protestations de circonstance, que c'est bien le ministère des Moudjahidine qui se substitue ici au ministère de la Culture en matière de production d'œuvres cinématographiques sur la lutte de Libération nationale. Est-il bien dans son rôle ?
Avec un peu de recul, la question qui fâche mérite d'être posée. Si le ministère des Moudjahidine, dans sa mission naturelle de contribution à la recherche historique, est parfaitement habilité à recourir au support film pour faire connaître, dans le cadre de productions audiovisuelles et cinématographiques institutionnelles à caractère éducatif et pédagogique, les fondements de la révolution de Novembre, ses grandes batailles, ses héros, ses conquêtes diplomatiques et son issue victorieuse, notamment auprès des jeunes et pour les besoins de la constitution des archives filmées du mouvement national et de la guerre de Libération nationale si utiles aux chercheurs, et si personne ne peut contester le fait que l'avis de ce département ministériel, au même titre que celui du ministère de la Défense nationale pour ce qui touche aux questions de sécurité nationale, soit nécessairement sollicité au moins du point de vue de l'éthique professionnelle dans l'étape de l'écriture de scénarios de films de fiction, et cette procédure existe, faut-il le rappeler à ceux qui s'en effarouchent, dans les pays de «la liberté d'expression et de la caricature à outrance » sans qu'elle soit criée sur tous les toits, il est temps de reconnaître que la production d'une œuvre cinématographique revêt un caractère artistique, industriel et commercial qui a ses propres exigences.
Il existe depuis longtemps une tradition dans l'action gouvernementale, qui a doté le ministère de la Culture d'établissements spécialisés et d'instances collégiales, sans cesse ajustés compte tenu de l'évolution des technologies, des objectifs et du renouvellement des ressources humaines, en charge de l'activité cinématographique de l'idée première d'un film, de l'écriture du scénario, de l'évaluation de son contenu et de ses coûts prévisionnels jusqu'à son financement, sa production, sa réalisation, son aboutissement et sa diffusion nationale et internationale, tradition en dehors de laquelle avec toutes ses limites, la voie serait ouverte, il est permis de le penser et de le craindre, à toutes les incohérences et interrogations et parfois même au doute. Qu'est-ce qui fait courir donc le Centre cational d'études et de recherches sur le mouvement national et la Révolution du 1er Novembre 1954 sous tutelle du ministère des Moudjahidine, pour s'encombrer, au-delà de la lecture légitime des scénarios avant d'accorder une aide à leur développement ou à leur réalisation, de tâches aussi complexes que spécifiques de préparation d'un budget aux dimensions souvent colossales, de mise en place d'équipes techniques pluridisciplinaires, de validation des lieux de tournage, de supervision de la réalisation, des activités de production, de gestion d'une régie en dinars et en devises, de démarches de transit, de douane, de transfert et d'assurances, de transport en plusieurs allers-retours des rushes à l'étranger et de suivi des travaux de laboratoire en Italie ou ailleurs, de contrôle des dépenses avec les justificatifs innombrables et divers d'une grosse production à la fin de toutes les opérations ? Alors que le ministère de la Culture dont c'est la mission et l'obligation, et par extension la Télévision algérienne pour la partie audiovisuelle, peinent à gérer dans la transparence et la maîtrise un secteur complexe, fort de puissants défis et de grandes attentes, peut-on imaginer un seul instant une entité, portée fondamentalement de par ses statuts sur les questions de la recherche historique, s'acquitter en toute tranquillité de tâches qui relèvent d'organismes publics essentiellement mis en place pour l'encadrement professionnel, le développement et le rayonnement du cinéma national ? Peut-on espérer revenir aux missions premières de chacun et voir le Centre national d'études et de recherche sur le mouvement national et la Révolution du 1er Novembre 1954 se constituer en fonds d'aide à la production pour les films historiques au lieu de se promouvoir producteur exclusif avec tous les risques techniques et financiers, sans compter les antagonismes d'ordre réglementaire qui peuvent survenir et desservir l'unité de l'action gouvernementale ?
Peut-on espérer voir créée à bref délai une commission interministérielle ou mixte entre les départements de la Culture, de la Communication ou les deux réunis, et le ministère des Moudjahidine, pour la lecture et l'évaluation des projets de films de fiction en rapport avec l'histoire du mouvement national et de la lutte de Libération nationale, loin de toute tentation monopolistique et dans la transparence la plus franche ? 0Les grands projets éligibles à une aide bénéficieraient, sitôt le budget de la production validé sur la base d'un barème de référence, d'un apport majoritaire du ministère des Moudjahidine, d'une contribution automatique du ministère de la Culture, d'une participation assurée de la Télévision algérienne, de soutiens logistiques en matière d'équipements spécialisés, et de l'aide des grands sponsors nationaux connus pour leur proximité avec le produit culturel, étant entendu que cette opération de coproduction exemplaire serait pilotée par les organes spécialisés sous tutelle du ministère de la Culture sous le contrôle de chacune des parties qui y délégueraient leurs représentants en qualité de producteurs délégués, selon la nomenclature des postes en usage dans l'activité cinématographique. Est-ce là une vue de l'esprit ou une invitation à une sérieuse réflexion destinée à remettre chacun à sa bonne place dans le sens où le travail sur l'Histoire et la mémoire quel que soit le support et davantage lorsqu'il s'agit du support cinématographique, le cinéma étant un art populaire par excellence mais aussi une industrie, a besoin de professionnalisme, de talents et de transparence, pour être en toutes circonstances en accord avec les valeurs sur lesquelles il se fonde. Ceci dit, avons-nous perdu en chemin celui dont nous esquissions le portrait et qui nous a servi de prétexte et de clé pour rouvrir le débat sur le rapport du cinéma à l'histoire ? Tout le monde aura compris que l'invité de cette chronique est bien Ahmed Rachedi, l'auteur de lOpium et le Bâton dont nous soulignions plus haut le succès populaire durable, et s'il serait injuste d'évoquer en peu de mots sa longue carrière depuis ses premiers pas à l'école de cinéma de l'ALN, il est en revanche de notoriété publique que l'ensemble de sa filmographie est traversé par des personnages et des actes fortement inspirés de la lutte de Libération nationale.
Sa dernière œuvre cinématographique présentée en avant-première à la salle El Mouggar à Alger le jeudi 15 janvier, intitulée Krim Belkacem, qui disparaît dans cette fiction à l'instant même de la signature historique des Accords d'Evian, est dans une certaine mesure dans la sous-lecture que l'on peut faire de ce choix, sans que les promoteurs de ce projet l'aient peut-être imaginé, une condamnation de sa mise à mort jamais élucidée quelques années plus tard sur une terre étrangère même si l'histoire n'a pas encore eu le temps de fournir tous ses secrets, tant l'homme, avec tous les reproches qu'une partie de la critique a adressés au film sur les plans technique et dramatique, a occupé la scène pleinement avec son engagement précoce dans le mouvement national, son courage de chef militaire et ses exploits, son sens du commandement, son talent de diplomate et de négociateur, les grandes étapes de la lutte de Libération nationale jusqu'à l'aboutissement victorieux de celle-ci. Que dire d'autre ?
Qu'en élevant la personnalité de Krim Belkacem, puisque le film lui était consacré, le réalisateur devait savoir qu'il courait le risque de réduire la taille de certains de ses proches compagnons dont l'Histoire a retenu la grandeur, la force des convictions, l'audace de leurs actions et leur courage à l'heure du sacrifice suprême, et en juxtaposant plusieurs séquences de la vie du «héros» qui pouvaient apparaître dans certains cas autonomes les unes des autres, il laissait le spectateur se poser instinctivement la question de savoir s'il n'aurait pas mieux fallu lui proposer à voir en priorité une série au lieu d'un film de fiction forcément réducteur.
Ahmed Rachedi, un vétéran du cinéma national et un pionnier dans la réalisation de films historiques, homme de culture et de débat d'une courtoisie rarement prise en défaut, saura-t-il écouter son public et ses critiques et entreprendre avec plus de précautions et de réussite de nouveaux chantiers aux côtés d'autres cinéastes en capacité d'apporter un autre regard et une autre esthétique sur le mouvement national et la révolution du 1er Novembre 1954 ? Il a assurément pour cela l'ancienneté dans le métier, la force de l'engagement, la maturité politique, l'ancrage nationaliste, des ressources artistiques insoupçonnées et les moyens, et ce, quelle que soit l'architecture de ses nouvelles productions.


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