C'est officiel. La maison d'arrêt de Serkadji sera transformée en musée. L'annonce a été faite avant-hier par le ministre de la Justice et garde des Sceaux à l'occasion d'une visite effectuée en compagnie de la ministre de la Culture et du wali d'Alger sur le site de cette prison de haute sécurité durant la période coloniale. Abder Bettache - Alger (Le Soir) La première annonce faite pour la transformation de la prison de Serkadji en musée remonte à la fin de l'année 2014. C'était lors d'une visite effectuée par le ministre de la Justice dans la ville de Koléa, inspectant l'état d'avancement des travaux de la nouvelle prison. «La prison de Serkadji sera fermée dans 2 à 3 mois, après le parachèvement de la réalisation d'un autre pénitencier dans la ville de Koléa (Tipasa)», avait indiqué le ministre, en ajoutant qu'il s'agit là d'un «objectif stratégique, lié à la mémoire nationale et à l'histoire de l'Algérie, qui nécessite que les autorités publiques mettent tout en œuvre en vue de sa transformation en musée, dans les plus brefs délais». Quelques mois plus tard, la décision est entrée en vigueur, coïncidant avec la célébration du 19 mars, date du cessez-le-feu entre l'armée française et l'ALN (armée de Libération nationale, 1954-1962). Devant les journalistes, le ministre de la Justice a indiqué qu'une «commission intersectorielle avait été chargée des études pour la reconversion des lieux, en adéquation avec le plan de mise en valeur du secteur sauvegardé de La Casbah d'Alger». Fermée puis classée site historique au lendemain de l'indépendance, la prison a été rouverte en 1965, avant d'être à nouveau fermée récemment. Selon le ministre, «tous les détenus ont été transférés en novembre 2014». Les résultats de ces études définiront la tutelle du futur musée ainsi que les délais nécessaires à la réhabilitation des lieux, avant son ouverture au public, a-t-il-dit, sans autre précision. Les trois ministres ont procédé à la visite de l'établissement et des cellules où étaient incarcérés Ahmed Zabana et Moufdi Zakaria. Symbole de la répression coloniale, l'établissement pénitentiaire de Serkadji avait été construit en 1856 sur une ancienne fortification datant de l'époque ottomane sur les hauteurs de La Casbah d'Alger, et baptisé «Prison de Barberousse» Prison de haute sécurité, l'établissement de sinistre mémoire a vu défiler dans ses geôles des milliers de militants politiques de la cause nationale, longtemps avant le déclenchement de la guerre de Libération, en 1954. Pendant la guerre de Libération, elle est devenue tristement célèbre par les 58, exécutions, dont 48 à la guillotine qui y ont eu lieu, dont celle de Ahmed Zabana, premier guillotiné le 19 juin 1956 ou celle de Fernand Iveton, seul militant algérien de la cause algérienne d'origine européenne à avoir été exécuté (13 février 1957). Outre Ahmed Zabana et Moufdi Zakaria, des figures emblématiques du mouvement national ont été emprisonnées dans cet établissement, parmi elles Abderrahmane Taleb, Abane Ramdane, Henri Alleg, Annie Steiner, Zohra Drif, Djamila Bouhired, Djamila Boupacha, Rabah Bitat, Benyoucef Benkhedda. Il est à rappeler qu'au lendemain de l'indépendance, dans la maison d'arrêt de Serkadji étaient détenues plusieurs personnes poursuivies dans des affaires de crimes, relevant du droit commun ou du terrorisme, et dont certaines sont condamnées à la peine capitale. Sa fermeture était programmée depuis longtemps. Mais elle a été repoussée en raison notamment de retards enregistrés dans la construction de nouvelles prisons.