Fatima Ali Messaiad est une femme artisan de 33 ans. Depuis mars 2015, elle a conçu manuellement une vaisselle à base de boue. 4 verres, 4 soucoupes, 1 cuillère et 1 fourchette composent son premier premier lot d'ustensiles. Une vaisselle en poterie qui désormais garnira sa table. En attendant d'autres innovations, les ustensiles modernes, à base d'inox et de verre, ont été jetés ou tout simplement offerts. Sa famille, composée de la maman et de 5 sœurs et un frère, semble suivre, elle aussi, le même chemin. Peu à peu, on accorde un intérêt exponentiel à tout ce qui semble archaïque aux yeux des adeptes de la modernité. Ali-Messaiad Fatima, nous l'avons rencontrée lors de l'exposition de «El anamil al dahabia», qui s'est tenue les 13, 14 et 15 juin à la Bibliothèque communale de Chréa, à Collo. Timide et à l'approche conservatrice, Fatima réalise des produits artisanaux pour subvenir aux besoins de sa famille et profite de l'organisation de ces événements pour écouler sa marchandise. «C'est aussi pour des raisons thérapeutiques, que j'ai affiné ma maîtrise de l'artisanat. Après une auscultation chez un médecin, dont les résultats n'ont été guère encourageants, je me suis rabattue, prenant en considération les conseils des uns et des autres, sur un guérisseur par les plantes médicinales, basé dans la commune de Collo. Mon problème est hormonal. Deux recommandations pratiques m'ont été prescrites. La première est une lotion à base de miel, de curcuma et de nigelle, et un verre de gingembre, que je devais prendre séparément et à des moments bien déterminés durant la journée. La deuxième est de mettre un terme à l'utilisation des ustensiles à base de verre et d'inox, et de la remplacer par ceux fabriqués avec de la boue. Etant une malade disciplinée, je me suis acquittée de cette tâche avec un engagement sans pareil», indique notre interlocutrice. Et d'ajouter : «Mon déploiement pour réussir a été facile et difficile à la fois. Facile, car depuis l'âge de 18 ans je me suis passionnée avec mes ascendants à l'artisanat. Sédentarité et oisiveté aidant, je me suis appliquée à rendre notre quotidien dynamique, et marquer notre journée par des petites créations de nature à dévier notre contrainte de la modernité vers notre goût de l'original et l'originel. Difficile, car il fallait veiller au bon choix de la terre à utiliser. Toutes les boues sont-elles bonnes à assurer une bonne cuisson et résister au feu de bois ? Sont-elles les mêmes à employer comme réceptacle à l'eau et à l'huile ? Non, d'où la sollicitation de vieilles personnes et des connaisseurs, pour guider nos pas et assurer notre orientation fructueuse. Après un choix, qui s'est avéré incompatible à 100%, avec la parcelle de terre située en amont de ma demeure, dans la commune de Chréa, qui semble uniquement destinée aux ustensiles intolérants à l'eau, j'ai opté, avec succès cette fois-ci, à la boue de la localité de Irsen et de Tamanart, où se trouve l'une des plus belles plages d'Algérie. Depuis, avec l'aide de mes proches, je ramène régulièrement des bouts de terre pour en faire des accessoires de cuisine.» La préparation se fait à l'aide d'une pierre pour limer le produit et d'une mechta, forme de couteau en bois, pour affiner les contours et les formes. Le liège est utilisé, quant à lui, comme support sur le kanoun. La cuisson durera, elle, une heure, un peu plus quand les vents viennent la perturber, car, selon Fatima, l'opération se fait dans la cour de la maison. La santé de Ali-Messaiad est au beau fixe depuis que le matériel sophistiqué est tombé aux oubliettes !