La fiscalité des services pourrait être revue dans le cadre de la loi de finances 2016. C'est «ouvert», assurait hier le directeur général des Impôts, Abderrahmane Raouya, devant des membres du Forum des chefs d'entreprises (FCE) qui ont soulevé la persistance de la pression fiscale. Le ministère des Finances pourrait établir un premier bilan de l'opération de conformité fiscale volontaire d'ici la fin de l'année. Cherif Bennaceur - Alger (Le Soir) - «Il n'y aucune mesure d'austérité dans la loi de finances complémentaire pour 2015», affirmait hier le directeur général des impôts (DGI) devant des membres du Forum des chefs d'entreprises (FCE). Intervenant lors des premiers débats du FCE, Abderrahmane Raouya, qui a présenté les dispositions de la LFC 2015 — portant fondamentalement sur la réduction de charges fiscales au profit notable des producteurs et des entreprises, le réaménagement de plusieurs taxes fiscales économiques et sociales (foncière, d'habitation, sur les véhicules neufs...), l'allégement et la simplification de certaines procédures ainsi que l'institution d'un dispositif de conformité fiscale volontaire... —, a certes concédé le fait que la chute des cours du pétrole impacte les revenus du pays. Il indiquera ainsi que les recettes de la fiscalité pétrolière ont été évaluées à 1 243 milliards de dinars durant les six premiers mois de 2015 tandis que la fiscalité ordinaire recouvrée durant la même période a dépassé les 1 500 milliards de dinars. Toutefois, le DGI assurera que les mesures contenues dans cette loi complémentaire ont essentiellement une vocation de «réajustement» fiscal notamment, devant permettre à certains égards de générer d'autres recettes pour le pays et/ou contribuer à la réduction de l'importation. «S'il devait y avoir de l'austérité, cela supposerait d'autres mesures , dira M. Raouya qui mettra davantage en avant le caractère «d'annonces pour le long terme et non à effet immédiat» que revêtent les dispositions. Cela étant, le DGI réitérera la conviction des pouvoirs publics selon laquelle «la pression fiscale n'est pas très importante en Algérie» et qu'elle s'exerce dans « des proportions très raisonnables», permettant aux opérateurs de pouvoir produire et générer des richesses et des revenus. Une perception que moult opérateurs économiques, activant dans différents services, ne semblent pas partager. Voire, l'ancien président du FCE, Réda Hamiani, relèvera «l'aggravation de la fiscalité», en estimant notamment que la réduction de l'Impôt sur le bénéfice (IBS) de 23% à 19% pour les producteurs au titre de la LFC 2015 «ne concerne que 5% du PIB (Produit intérieur brut)» et que l'«ajustement» du taux de l'IBS à 26% pour le secteur des services comme fixé par la même LFC concerne quant à lui «25% du PIB». Mettant en parallèle cette aggravation de la fiscalité avec les mesures de simplification et «le glissement» de la parité du dinar, Réda Hamiani constatera que «l'économie algérienne vit une contradiction qui n'est pas si évidente, entre une quête de croissance économique et (le fait) qu'on coupe l'herbe sous les pieds des éléments qui créent !». Or, couplée aux mesures budgétaires prises, cette situation implique selon l'ancien président du FCE l'impossibilité «d'avoir un taux de croissance de 7%» d'ici 2019, voire d'atteindre un taux de croissance de 4,5% pour l'année prochaine. Cela même si l'ancien dirigeant de l'association patronale tiendra à faire le distinguo entre la réduction de l'IBS, un impôt «perçu une fois les résultats atteints, sans impact réel», et celle de la taxe sur l'activité professionnelle (TAP) qui constitue un «empêchement régulier, mensuel d'avoir des disponibilités de trésorerie» et dont «le mode de calcul est pénalisant». En ce sens, Réda Hamiani plaidera pour des mesures de «défiscalisation de l'investissement et la suppression de la TAP». A ce propos, le directeur général des Impôts rappellera que la TAP a été ramenée à 1% au profit des producteurs, à 1,75% pour le BTPH et maintenue à 2 pour les autres activités, au titre de la LFC 2015. Sans être rétif au principe d'un autre réaménagement, Abderrahmane Raouya précisera néanmoins qu'il s'agira de veiller à la préservation des équilibres financiers des collectivités locales, le produit de la TAP leur étant destiné. Cela étant, le FCE, dira son vice-président, Salah-Eddine Abdessmed, «reviendra à la charge» sur la question de la suppression de la TAP, notamment à l'occasion de la discussion sur le projet de loi de finances pour 2016. De même que ce dirigeant patronal considérera que les opérateurs économiques sont «extrêmement déçus» par l'ajustement du taux de l'IBS à 26% pour les entreprises de service et qu'il s'agit donc de ne pas pénaliser. De fait, plusieurs opérateurs contesteront le fait que les entreprises de services soient assujetties au même taux d'IBS que les sociétés d'importation pour la revente en l'état. A ce propos, le DG des Impôts tiendra à préciser que le projet de loi de finances pour 2016 dont certaines mesures ont été ébruitées, «n'est qu'un projet» qui est «en cours de discussion» et que «le processus reste encore long» avant de se prononcer sur son contenu. Mettant en avant la nécessité d'«éviter des moins-values» et de «trouver le juste milieu», Abderrahmane Raouya laissera néanmoins entendre que la fiscalité relative aux services pourrait être revue, «réexaminée». «Tout est ouvert», dira-t-il, favorable à la possibilité d'en discuter sans être davantage prolixe. Par ailleurs, le DG des Impôts a indiqué que le ministère des Finances pourrait établir un premier bilan de l'opération de conformité fiscale volontaire, instituée par la LFC 2015, d'ici la fin de l'année. En fait, Abderrahmane Raouya ne perçoit pas d'engouement «pour l'instant, mais il y a un certain nombre de personnes qui viennent s'informer ou déposer». Il récusera toutefois le fait que cette opération, étalée jusqu'à la fin de l'année prochaine, soit «une amnistie fiscale». Abderrahmane Raouya arguera plutôt qu'il ne s'agit pas d'un effacement de dettes mais d'un «acte volontaire de personnes qui déposent des sommes d'argent dans les banques, moyennant une taxe forfaitaire libératoire de 7%». Un argent qui provient d'activités informelles ou de l'épargne informelle et qui sera «capté» pour le financement économique.