Récemment, le ministère de l'Education a décidé de constituer un fichier national d'identification de tous les élèves des trois paliers, primaire, moyen et secondaire sur la base d'un questionnaire en trois volets distribué dans tous les établissements scolaires de la wilaya. Dans l'esprit des concepteurs de ce fichier, on vise à éliminer la multitude des documents administratifs constitutifs des dossiers que les parents doivent fournir à chaque niveau, nous a-t-on fait savoir, et ainsi faire l'économie d'une bureaucratie sclérosante et fastidieuse. Cependant, si le projet est jugé positif, il n'en demeure pas moins que son exécution souffre d'une préparation jugée non réfléchie par la majorité des responsables, non seulement du secteur lui-même mais qui met dans l'embarras et même dans des difficultés le secteur «impliqué sans être consulté», celui de la santé. En effet, parmi la multitude d'informations que doit comporter le dossier de cette enquête, il est exigé que le groupage sanguin de chaque élève doit figurer. La procédure adoptée s'est résumée à la distribution des formulaires aux élèves par les chefs d'établissements, sans qu'aucune explication ne leur a été notifiée, ni précision écrite, ni pour les chefs d'établissements eux-mêmes ni pour les parents d'élèves. Les responsables du secteur, dans leur très grande majorité pour ne pas dire tous, se sont attachés à «liquider cette tâche» à savoir collecter les formulaires et les transmettre à la Direction de l'éducation, avant la clôture de ce premier trimestre. Tout le monde a inscrit cette tâche à réaliser dans les plus brefs délais «pour être tranquilles». Il s'en est suivi des niveaux de pression qui se sont répercutés en chaîne. La Direction de l'éducation exerce une pression sur les inspecteurs, les inspecteurs sur les chefs d'établissements, ces derniers sur les élèves, les élèves sur les parents et les parents qui se sont rués sur les structures sanitaires pour que soit établi le groupage sanguin pour leur progéniture. Ce rush auquel le secteur de la santé n'était pas préparé parce que «non consulté», nous a-t-on affirmé, est mal vécu par les personnels de santé. Le secteur de la santé qui ne dispose pas des quantités nécessaires de réactifs n'a pu répondre à une telle poussée de la demande parentale. De ce fait, certains personnels de la santé ont été même malmenés par certains parents accusés de faire des blocages. Pourtant, interrogés à ce sujet, des responsables d'hôpitaux n'ont pas caché qu'ils disposent de quantités de réactifs juste pour répondre aux demandes d'urgence ou pour des malades hospitalisés. Pour ne plus subir la pression de leurs enfants, certains parents se sont adressés aux laboratoires privés en payant entre 300 et 600 DA le certificat établissant le groupage sanguin. Les laboratoires privés eux-mêmes pris au dépourvu par cette poussée de la demande, encaissent d'avance, font le prélèvement puis fournissent les résultats dans un délai allant de 4 à 6 jours. Cette perturbation n'a pas manqué d'engendrer des réactions chez nombre d'élèves qui ont préféré refuser d'aller à l'école pour échapper à la pression du directeur. On nous a affirmé aussi que dans certains établissements, des élèves ont été renvoyés parce qu'ils n'ont pas pu fournir ce fameux certificat de groupage et que des bambins censés être à l'école se sont rendus eux-mêmes dans les structures sanitaires subissant la cohue. Pour avoir des précisions sur cette «campagne», nous nous sommes adressés au S/G de la Direction de l'éducation, en l'absence du directeur «en séminaire pour une semaine», nous a-t-on déclaré. Le secrétaire général consulté nous a répondu le plus simplement du monde «je n'ai aucune information concernant cette campagne et je n'ai rien à vous dire». Pourtant, nous voulions seulement savoir si une date butoir était fixée pour l'achèvement de cette campagne. Même réponse, là aussi «je ne dispose d'aucune information à ce sujet». Au niveau du secteur de la santé, on avoue que la décision de constituer ce fichier a été prise unilatéralement par les responsables du secteur de l'éducation, décision qui a placé en mauvaise posture le secteur de la santé. Nous avons appris que les responsables de l'éducation ont été interpellés à ce sujet et qu'une réunion de concertation sur la conduite à adopter a été tenue, réunion à l'issue de laquelle un programme d'exécution progressive de cette tâche a été établi. Il nous a été précisé que tous les élèves solarisés ont subi la visite médicale annuelle dès la fin novembre et ce groupage n'était pas prévu. Telle est la situation qui sévit dans la wilaya de Aïn Defla, qu'en est-il de celle des autres wilayas du pays ? Par ailleurs, une proposition judicieuse a été avancée dans l'espoir qu'elle sera retenue à savoir «pourquoi ne pas établir ce fameux groupage, indispensable il faut le dire, en période postnatalité de façon systématique ?».