Plus aucun doute : la qualification de l'EN en phase finale, la dix-septième (chiffre magique qui rappelle que l'Algérie a remporté son unique titre africain en 1990 à l'occasion de la 17e édition de la CAN), est désormais acquise. L'éclatante démonstration face aux Antilopes Walyas d'éthiopie a effacé les dernières incertitudes quant à voir la sélection algérienne composter son billet pour Gabon-2017. Parade, balade ou magistrale symphonie : les superlatifs ne manquent plus pour qualifier la sortie des joueurs de Christian Gourcuff, vendredi soir à Blida, contre l'éthiopie. Un match à sens unique qui a fait taire les sourdes rumeurs de crise dans le vestiaire algérien. L'acte de reconnaissance des joueurs, qui viendront fêter le 1er but signé Feghouli sous les bras du Breton, envers le sélectionneur serait-il suffisant pour lever les malentendus ? Peut-être bien que Gourcuff est souvent cité par les médias français à la barre technique de clubs hexagonaux dès cet été, il est inconcevable que la démarche des détracteurs de l'ancien coach des Merlus atteigne ses objectifs alors que l'objectif fixé au Français est réalisé tandis que le projet global, construire une équipe conquérante et au jeu plaisant est en voie de concrétisation. Face aux éthiopiens, qui ne représentent, c'est vrai, pas cet adversaire qui fait peur ou qu'on peut mesurer sa puissance, les Verts de Gourcuff ont réussi presque dans toutes leurs entreprises. Physiquement à ras bord, en dépit de quelques signes d'essoufflement de nos «Portugais», Brahimi et Belkaroui, techniquement perfectionnistes malgré quelques flottements dans la relance, et surtout tactiquement appliqués, les Algériens ont produit le spectacle. Du début jusqu'à la fin alliant l'art à la manière, autant dans leurs menées offensives que dans la récupération du ballon ou dans le travail défensif. Il ne faut surtout pas fouiner dans les statistiques d'une partie de football rendue facile par le trop-plein de confiance des joueurs algériens. Comme pour répliquer à ceux qui en doutaient encore sur la possibilité de cet ensemble à aller au charbon. Pour preuve, le premier carton du match a été infligé à l'attaquant algérien Islam Slimani. Un avertissement que le Sud-Africain De Freitas pouvait également brandir au visage de Feghouli, Medjani, Mandi et autre Ghoulam dont l'engagement physique était parfois à la limite de la correction. Le plaisir de... se faire plaisir Cette agressivité prouve la dimension humaine d'un groupe solidaire à souhait et décidé à ne plus revivre les douloureux moments de «séparation» avec Coach Vahid pour le gros de l'effectif actuel ou, pour les plus anciens, avec Cheikh Saâdane. L'intrigue demeure, pourtant. A qui d'autres, en plus des critiques (presse et experts des plateaux), s'adressait cette «marque de solidarité et de communion» des joueurs de l'EN envers Gourcuff ? Certainement à l'employeur, la FAF en l'occurrence, en particulier son président Mohamed Raouraoua. Le chairman de la fédération qu'on dit adepte de la stabilité n'aurait pas apprécié quelques propos jugés maladroits du sélectionneur lors de ses sorties publiques au Canada où Gourcuff dissertait sur les notions du football moderne, celui qu'il tente avec beaucoup de bonheur d'ailleurs d'inculquer aux Verts. En particulier la manière dont est géré le dossier «DTN» : Gourcuff ayant reproché à la DTN de lui confier des tâches qu'il n'est pas censé accomplir, contractuellement parlant. L'absence de communication, Gourcuff boudant les médias algériens alors que la FAF passe pour la nouvelle «grande muette» en Algérie, les supputations et autres rumeurs ont atteint des niveaux jamais égalés de telle sorte à faire croire que la séparation entre Gourcuff et la FAF est imminente. Une perspective à laquelle les joueurs semblent déclarer la guerre. Dans le vestiaire mais également sur le terrain. Les éthiopiens ayant subi la «terreur» d'un groupe qui a livré son plus raffiné cocktail depuis que Gourcuff a mis en place son 4-4-2 mobile. Feghouli, leader et buteur ! Une mixture qui proposait notamment un Feghouli refaçonné, dans un rôle qu'il commence à peine à découvrir au sein du FC Valence. Aligné en meneur de jeu, Feghouli a apporté des solutions dans la construction du jeu offensif de la sélection. Une première plutôt réussie en dépit de quelques imperfections remarquées quand il s'est agi, par exemple, de chercher la profondeur réclamée par Slimani. Pourtant, cette «intrusion» a quelque peu effacé le virtuose Yacine Brahimi, l'un des rares éléments de l'équipe mise en place par Gourcuff à manquer de tempo à l'occasion de cette sortie officielle face aux éthiopiens. Le meneur du FC Porto a somnolé durant une longue partie du match, multipliant les passes à l'adversaire, avant de sauver son match grâce à un but «brahimisque». Dans une rencontre dominée de la tête aux épaules, durant laquelle l'équipe visiteuse n'a eu que deux opportunités de venir inquiéter M'Bolhi, il est bon de signaler le travail remarquable des récupérateurs, Medjani et Taïder en l'occurrence. Une paire inédite qui a mis sous l'éteignoir le compartiment médian adverse. Si la nouvelle recrue de Levante a fini par nettoyer son secteur de toute velléité éthiopienne, le milieu de Bologne, par trop maladroit pendant une bonne demi-heure, a également réalisé un travail de fourmis conclu par un but d'anthologie. Le festival offensif n'aurait pas été possible sans l'apport des latéraux, Ghoulam et Zeffane, très bons sur l'homme et actifs sur leurs couloirs, mais également celui des suppléants. Aussi, Boudebouz, Ghezzal et Benzia, qui fêtait sa première chez les Verts, ont été, à différents degrés, utiles, efficaces et aussi inspirés que les joueurs qu'ils avaient remplacés. Leur mérite est d'autant plus grand que le trio a regagné le terrain à un moment où le match était pratiquement plié (3-0). Le génie du Montpelliérain, l'efficacité du Lyonnais et le sens de l'orientation du Lillois ont permis à la sélection d'améliorer son score sans avoir à fournir des efforts contraignants. Et c'est là l'autre acquis du groupe Algérie : efficace face à la Tanzanie (7-0), l'EN a réédité son récital offensif en présentant un spectacle plus raffiné, attractif. Que veut le peuple ? M. B. Déclarations-express Saphir Taïder : «On doit rester concentrés» «Cette large victoire contre l'Ethiopie nous a fait énormément plaisir. Nous devons cependant vite nous remobiliser, car le match retour est prévu mardi prochain. On doit donc rester concentrés puisque ce match sera décisif pour la qualification. Je suis très content d'avoir contribué au succès de mon équipe, en marquant un joli but. Une reprise de volée, sans contrôle à l'entrée des 18 mètres, c'est comme ça que je les préfère.» Riyad Boudebouz : «Cela fait plaisir de marquer autant de buts» «Je suis content que nous ayons remporté cette victoire avec l'art et la manière, car même si le plus important est de gagner, cela fait toujours plaisir de marquer beaucoup de buts. C'est rassurant, autant sur le plan collectif qu'individuel, et ça donne de la confiance pour la suite du parcours. Le chemin est encore long, certes, mais avec trois victoires en autant de matchs, je considère que nous sommes sur la bonne voie.» Yacine Brahimi : «Nous mettre en confiance» «Nous avons dédié le premier but au coach, car Feghouli a ouvert le score au terme d'une belle action collective. Nous avons donc tenu à lui témoigner notre gratitude pour le travail qu'il a fait. Au final, nous l'emportons par sept buts à un, ce qui devrait nous mettre en confiance en prévision des autres matchs, à commencer par celui de mardi à Addis-Abeba.» Avis autorisés Christian Gourcuff : «Nous avons des joueurs de qualité» «L'objectif était de gagner et nous y sommes parvenus en y mettant la manière, car il n'est pas donné à tout le monde de l'emporter par un score aussi large. Nous avons exercé un pressing constant sur l'adversaire, ce qui s'est avéré déterminant. Nous avons des joueurs de qualité, qui ont marqué des buts extraordinaires, en utilisant au mieux leur potentiel technique individuel. Je sais que mardi prochain à Addis-Abeba (pour le match de la 4e journée, ndlr), les conditions de jeu ne seront pas les mêmes. Avec l'altitude et le mauvais état de la pelouse, nous serons probablement dans l'incapacité de développer la même qualité de jeu. Mais, on va quand même essayer d'adopter la même stratégie, avec l'espoir de gagner. Benzia et Ghezzal sont un peu timides dans la prise d'initiative, mais ils sont encore jeunes. Je pense que des matchs comme ceux d'aujourd'hui vont les aider à se libérer un peu plus.» Yohannes Sahle (sélectionneur de l'Ethiopie) : «L'espoir est permis» «Malgré l'ampleur du score, notre équipe n'a perdu que trois points contre l'Algérie et l'espoir d'une qualification reste permis, surtout que nous aurons la possibilité de nous relancer dès mardi, en recevant ce même adversaire chez nous. L'avantage du terrain et le soutien du public ont beaucoup aidé l'Algérie dans la réussite de cette large victoire et j'espère qu'il en sera de même pour nous au match retour. En tout cas, cette lourde défaite n'affecte pas notre moral outre mesure. Il s'agit de notre premier revers dans cette phase de groupes, et pour l'instant, nous sommes toujours 2es.»