Le retour des terroristes engagés dans les troupes de Daesh dans leur pays d'origine est un nouveau défi auquel font actuellement face de très nombreux Etats à travers le monde. Au Maghreb, en Europe, au Moyen-Orient, en Russie comme en Asie et même aux Balkans, leur arrivée est perçue comme étant une véritable menace pour la sécurité des Etats concernés et parfois même leurs voisins. Abla Cherif - Alger (Le Soir) - Des chiffres effrayants, publiés tout récemment par le Centre Soufan, une organisation internationale composée de chercheurs et d'analystes spécialisés dans les questions de sécurité mondiale et de risques liés aux menaces émergentes, en donnent un large aperçu. Tableaux, courbes et schémas basés sur des données sourcées assènent une vérité qui glace le sang. Plus aucune région au monde n'est désormais épargnée par le danger du retour de ces hommes, femmes et aussi enfants enrôlés dans la sinistre organisation Daesh. Partis avec un idéal, endoctrinés à distance, ou tout simplement pris par une envie d'aventure, ils sont actuellement des milliers à prendre le chemin du retour vers leur patrie originelle, soumettant ainsi les pays concernés et les régions qui les entourent à des risques d'attentats. Soufan Center en veut pour preuve le nombre élevé de personnes régulièrement arrêtées en Europe ou ailleurs pour leur implication dans des attentats. Toutes se sont avérées être liées à l'organisation terroriste internationale et ont agi sous sa bannière. Les chiffres récoltés et publiés par ces chercheurs démontrent la gravité de la situation. On apprend ainsi que le Maghreb a enregistré à lui seul le départ de 5 319 personnes volontairement inscrites dans les rangs des groupes terroristes activant en Syrie et en Irak. Les données, précise Soufan Center, sont issues des listes établies sur la base des données récoltées par les services de sécurité des Etats concernés. Les statistiques, indique la même source, pourraient s'avérer plus élevées en raison de la discrétion affichée par les membres de l'organisation. «Certains sont également emprisonnés ou ne fournissent aucune donnée», précise le rapport de Soufan Center. En tête des pays maghrébins les plus touchés par le phénomène se trouve la Tunisie. Un tableau détaillé indique que 2 926 Tunisiens ayant pris le chemin pour l'Irak et la Syrie ont été répertoriés en janvier 2016. 4 065 autres citoyens de ce même pays étaient à cette même époque stationnés aux frontières turques dans l'attente du moment opportun pour rejoindre les troupes de Daesh. Depuis, 800 Tunisiens sont retournés dans leur pays. En seconde position, s'affiche le Maroc avec 1 623 départs dont 275 femmes. En avril 2017, les autorités turques ont alerté les Etats concernés sur un important flux migratoire enregistré sur son territoire. 53,781 individus issus de 146 pays différents étaient, selon cette même source, dans l'attente d'un départ vers les territoires où Daesh tentait de s'imposer. Parmi ces personnes en attente, 2 831 Marocains. Depuis, 198 Marocains sont rentrés chez eux. Viennent ensuite la Libye et l'Egypte avec 600 départs chacune, mais aucun retour. L'Algérie est, quant à elle, classée en dernière position des pays maghrébins concernés par cette situation avec 170 départs et 87 retours en 2016. Comparé aux autres régions du monde confrontées au danger du retour de ces terroristes, la situation prévalant au Maghreb paraît cependant bien moins grave. Un graphe établit ainsi que les zones de l'ancienne République soviétique et du Moyen-Orient viennent en tête avec 8 717 départs à partir de la Russie et 7 045 pour le reste (Moyen-Orient). Vient ensuite l'Europe de l'Est, avec 5 781 départs ; 1 568 pour les régions Sud et Sud-Est de l'Asie ; 845 pour les Balkans et 439 départs pour l'Amérique du Nord. Quant aux retours, ils s'élèvent à 400 personnes en Russie, et autres données 750 retours (sur les 3 244 départs) en Arabie Saoudite. Parmi les chiffres rendus publics par Soufan Center, on apprend également que la France a enregistré à elle seule le départ de 1 910 personnes. 271 ont été déjà de retour. Il faut, d'autre part, savoir que le centre de recherches en question met l'accent sur la présence d'un nombre important de femmes, 2 447, et d'enfants, 1 574, provenant de 22 pays différents. Parmi eux, 275 Marocaines et 100 Tunisiennes. Les Algériennes ne figurent pas dans le classement. Comment s'explique le retour de ces terroristes ? Selon le Soufan Center, il est imputé à trois facteurs essentiels. Le premier est lié à la déception qu'éprouvent les aventuriers partis à la recherche de nouveaux horizons et d'émotions. La seconde catégorie est celle des personnes ayant été déçues et choquées par les violences dont fait preuve l'organisation islamique. La dernière tranche est composée de personnes ayant été sciemment renvoyées dans leur pays d'origine avec des missions précises. Celle de commettre des attentats sous la bannière de Daesh. Il y a quelques mois, indique enfin le Soufan Center, une liste retrouvée en Irak indiquait que 173 membres de l'organisation terroriste, dont le pays d'origine n'a pas été révélé, avaient reçu l'ordre de retourner chez eux pour y commettre des attentats à la bombe. Dans les exemples fournis, la France est fréquemment citée. Les chercheurs rappellent ainsi l'arrestation de trois femmes (début 2017) porteuses de bombes devant la cathédrale Notre-Dame-de-Paris. Les mises en cause avaient effectué un séjour dans des camps terroristes syriens et irakiens. La vague d'attentats qui secoue le territoire français et européen en général est analysée comme étant une conséquence directe du retour de tous ces hommes et de toutes ces femmes endoctrinés.