Dans un long article paru dans l��dition anglophone du Monde Diplomatique du mois de janvier 2006, Jacob Mundy a d�montr�, en se basant sur des documents d�classifi�s de l�administration am�ricaine, que les Etats-Unis ont aid� le roi Hassan II � s�emparer du Sahara occidental. Tarek Hafid - Alger (Le Soir) - �Le r�le du gouvernement des USA lors de la crise d'octobre-novembre 1975 a �t� le sujet de beaucoup de sp�culations, alors que peu de faits sont connus. Avec peu d'arguments, souvent circonstanciels, divers observateurs ont accus� les USA de toute une gamme d'attitudes, allant de la passivit� � la complicit�. Ces accusations de complicit� n'�taient pas totalement infond�es. Trois ans apr�s la crise, le Parlement espagnol a enqu�t� sur l'affaire. Plusieurs fonctionnaires ont d�clar� que la France et les USA avaient fait pression sur Madrid pour acc�der aux demandes de Hassan II. Et le directeur adjoint de la CIA � l'�poque, le lieutenant-g�n�ral Vernon Walters, a laiss� entendre qu'il �tait intervenu au nom des USA pendant la crise, d�claration reprise plus tard par d'autres sources dans le New York Times en 1981. Etant donn� les �troites relations de Walters avec Hassan II, datant du d�barquement alli� � Casablanca, le journaliste Bob Woodward l'a d�crit une fois comme l'agent personnel du monarque au sein de la CIA�, �crit Jacob Mundy dans cet article paru derni�rement dans la derni�re l��dition anglophone du Monde diplomatique. Selon Mundy, qui a repris des documents officiels de l�administration am�ricaine ainsi que des d�clarations de hautes personnalit�s, Hassan II aurait re�u le feu vert pour s�emparer du Sahara occidental durant l��t� 75 lors d�une rencontre avec Henry Kissinger. �Les documents officiels ne r�v�leront jamais toute la v�rit� (�) tout �tait possible � cette �poque�, note-t-il en rapportant les propos de Richard Parker, ambassadeur des USA en Alg�rie durant cette p�riode. Accord ou pas, l�administration Ford �tait au courant des vell�it�s du Maroc de s�approprier le Sahara occidental d�s le d�part de l�occupant espagnol. Rappelons que le Maroc avait requis un avis consultatif de la Cour internationale de justice (CIJ) portant sur l�existence de liens entre le Sahara occidental et le royaume du Maroc. Ce dernier a finalement �t� d�bout� par cette institution internationale qui a conclu que �les �l�ments et renseignements port�s � sa connaissance n'�tablissent l'existence d'aucun lien de souverainet� territoriale entre le territoire du Sahara occidental, d'une part, le royaume du Maroc ou l'ensemble mauritanien, d'autre part�. La �marche verte� de Hassan II est donc une r�ponse � l�avis formul� par la CIJ. �Rencontrant Hassan II lors d'un voyage pr�programm� pour discuter du conflit isra�lo- arabe, le vice-secr�taire d'Etat, Alfred Atherton, a rapport� le 22 octobre que le Maroc et l'Espagne avaient conclu un accord permettant la marche tout en sauvant la face. Ils utiliseraient par la suite l'Onu pour l�gitimer l'occupation marocaine au moyen d'un pl�biscite contr�l�, permettant ainsi � l'Espagne de se retirer avec �l�gance�, explique Mundy. Mais l�invasion des territoires sahraouis ne se d�roule pas comme l�avait pr�vu le commandement marocain. Les FAR et les marcheurs � plusieurs centaines de civils marocains � font face aux troupes du Polisario. La situation devient critique pour Hassan II. �Hassan II s'est retir� du Sahara. Mais s'il ne l'obtient pas, il est fini. Nous devrions maintenant travailler � ce qu'il l'obtienne. Nous allons agir au sein de l'Onu (pour) assurer un vote favorable�, a indiqu� Kissinger au pr�sident Ford, le 10 novembre 1975. �Malheureusement pour Kissinger, l'Onu n'a pas �t� capable d'organiser un vote �truqu� durant l'administration tripartite transitoire (Maroc, Maur�tanie et Espagne), qui a vu la moiti� de la population indig�ne fuir vers le d�sert avant le retrait de l'Espagne en f�vrier 1976. La sanction des urnes �tant refus�e, le Polisario a essay� de r�aliser l'autod�termination par le fusil�, indique Jacob Mundy. Il en conclut que les Etats- Unis ont largement favoris� le Maroc dans l�invasion du Sahara occidental. �En 1976, le sp�cialiste renomm� du droit international, Thomas Franck, a d�crit avec justesse la politique des USA pendant la crise comme �un acte d'opportunisme politique fond� sur des alliances est/ouest�. On pourrait en dire autant aujourd'hui de la politique am�ricaine de �neutralit� par rapport au conflit du Sahara occidental, ainsi qu'� d'autres conflits touchant � la n�gation de l'autod�termination nationale. La seule diff�rence entre 1975 et 2005 r�side dans le contexte g�opolitique justificateur. On est pass� de la guerre froide � la guerre contre le terrorisme, ce qui nous am�ne � croire que notre neutralit� proclam�e est un luxe que nous ne pouvons pas encore nous permettre. Mais la persistance du conflit du Sahara occidental d�montre les imperfections de la politique am�ricaine de �neutralit� au Sahara. Durant les 30 derni�res ann�es, Washington ne s'en est pas rendu compte�, conclut Jacob Mundy. T. H. Texte traduit de l�anglais par ARSO. Membre fondateur de l�association �Friends of the Western Sahara�, Jacob Mundy poursuit des �tudes en post-graduation � l�universit� de Washington. Il est coauteur, avec Stephen Zunes, de Western Sahara: war, nationalism and conflict irresolution, Sahara occidental: guerre, nationalisme et conflit irr�solu), � para�tre prochainement aux Editions Syracuse University Press.