Pour la premi�re �dition de son forum-d�bat, qui s�est tenue jeudi dernier, le quotidien El Watan a abord� la probl�matique du pass� colonial fran�ais en Alg�rie. Une rencontre anim�e par les historiens Gilles Manceron, Mohamed Harbi, Daho Djerbal et Hassan Remaoun, le r�le du mod�rateur �tant revenu au politologue Mohammed Hachemaoui. Tarek Hafid - Alger (Le Soir) - La salle principale de l�h�tel Mercure s�est r�v�l�e exigu� devant un public qui a r�pondu massivement � l�invitation lanc�e par El Watan. Bien que le th�me de la confrontation des m�moires alg�rienne et fran�aise soit des plus int�ressants, cette affluence s�explique aussi par l�absence d�espace de libre expression au sein de la soci�t� alg�rienne,. Premier conf�rencier � intervenir � cette occasion, l�historien et militant des droits de l�Homme, Gilles Manceron, a estim� que la r�conciliation en profondeur entre les opinions publiques fran�aise et alg�rienne n�a toujours pas abouti. �Dans un sondage rendu public � la mi-janvier, 60% de l�opinion publique fran�aise �tait favorable � l�article sur l�action positive de la colonisation, disposition inscrite dans la loi du 23 f�vrier 2005. Je pense qu�il n�y a pas de r�conciliation en profondeur entre les deux pays. On peut parler de coop�ration et de trait� d�amiti�, mais pas encore de normalisation�, expliquera-t-il. Selon lui, la loi du 23 f�vrier est le fruit d�une entreprise de lobbying op�r�e aupr�s de certains parlementaires par des associations de pieds-noirs nostalgiques de �l�Alg�rie fran�aise�. �Le d�classement, par Jacques Chirac, de la phrase qui positive le colonialisme n�a rien chang� au caract�re scandaleux de la loi du 23 f�vrier. L�article sur l�indemnisation des exil�s politique de l�OAS et celui relatif � la cr�ation d�une fondation pour l�histoire de la guerre d�Alg�rie, qui sera plac�e sous le contr�le d�associations de nostalgiques, n�ont pas �t� supprim�s�. Gilles Manceron estime cependant que l�adoption de cette loi a permis de relancer un d�bat sur l�histoire coloniale de la France. �Ce d�bat porte notamment sur la conformit� de l�action coloniale avec les principes fondateurs de la R�publique fran�aise que sont l��galit�, la citoyennet� et les droits de l�homme�, notera l�historien. Son confr�re Mohamed Harbi reviendra longuement sur la perception alg�rienne de son pass� de colonis�e. �La premi�re g�n�ration qui a �t� confront�e � l�invasion fran�aise a pris le fait colonial comme une reprise des croisades. La compr�hension du fait colonial n�a eu lieu qu�au d�but du XXe si�cle suite � l�action de personnages comme l�Emir Khaled. Quant � l�identit� nationale, elle ne s�est affirm�e r�ellement qu�au courant des ann�es 1930, les id�ologues de cette vision �taient des religieux. Mais leur vision �tait r�ductrice car elle �vacuait les composantes berb�re et africaine�, dira Mohamed Harbi. Le Manifeste du peuple alg�rien a pr�sent� une nouvelle interpr�tation du fait colonial. �Bien qu��quilibr�e, cette nouvelle vision n�a pas trouv� de r�els �chos au sein de la soci�t� alg�rienne du fait de son �litisme�, ajoutera Harbi. Ce dernier a �galement jug� que les historiens alg�riens confondent histoire et m�moire, ce qui, selon lui, a eu pour effet d�imposer des �silences� sur certains �pisodes graves qui se sont d�roul�s durant la r�volution. �Il faut aborder avec courage la question de l�arbitraire durant les diff�rentes p�riodes, que ce soit durant l��re coloniale, la r�volution et m�me de nos jours�. Sur ce sujet pr�cis, Daho Djerbal estime que l�action de l�Etat a �fossilis� l�histoire. �Combien de Abane Ramdane n�ont pas eu droit � un proc�s �quitable et ont �t� victimes de l�arbitraire ? Le conflit sanglant entre le FLN et le MNA sera-t-il un jour transcrit dans les manuels scolaires�, s�interrogera- t-il. Les questions de l�analogie entre le nazisme et le colonialisme ont �galement �t� abord�es par les conf�renciers. Gilles Manceron expliquera � l�assembl�e que de tels parall�les sont � �viter puisqu�il n�existe aucun rapport entre l�action de la France et une id�ologie politique comme le nazisme. �Des officiers fascistes et totalitaires �taient responsables de d�partements de l�arm�e coloniale. C�est le cas de certains officiers paras du 5e Bureau qui consid�raient leur action en Alg�rie comme une guerre contre le communisme�, notera pour sa part Mohamed Harbi. Intervenant sur ce point pr�cis lors des d�bats, Me Miloud Brahimi pr�sentera l�avis de l�homme de loi. �Le tribunal de Nuremberg, le Tribunal p�nal international, le Tribunal p�nal international pour le Rwanda et celui pour l�ex-Yougoslavie ont identifi� avec pr�cision les d�finitions de crimes contre l�humanit� et de g�nocide. Sur le plan du droit, les faits commis par la colonisation en Alg�rie r�pondent � ces d�finitions�, affirmera Me Brahimi.