Mohamed Benchicou a anim� jeudi, au si�ge du Matin une conf�rence de presse. Un contact qui lui permettait, d�une part, de retrouver la corporation et d��changer avec elle un d�bat sur les questions d�ordre g�n�ral, portant sur la situation sociale et politique du pays, et d�autre part, une occasion de renouer avec ses lecteurs qui sont rest�s sans nouvelles de lui durant toute cette p�riode. Avant de s��taler sur plusieurs sujets, Mohamed Benchicou a tenu � exprimer ses vifs remerciements � la presse alg�rienne et �trang�re, aux ONG qui se sont mobilis�es pour d�fendre sa cause. La question qui s�imposait � cette circonstance �tait, en toute �vidence, le devenir du Matin, maintenant que son patron a retrouv� sa libert�. A cette question, Mohamed Benchicou a soulev� deux contraintes pour la r�apparition du Matin. La premi�re �tant politique, le conf�rencier r�v�le que Le Matin a �t� victime d�un harc�lement politique qui ne dit pas son nom. �Nous attendons un signal politique qui affiche la volont� des pouvoirs politiques � lever sa main sur Le Matin et lui permette de retrouver ses lecteurs, sans ce signal on ne pourra rien faire�, dit-il. La difficult�, selon Benchicou, r�side dans le fait que cette contrainte politique n�est pas localis�e, elle n�est pas visible. Pour ce qui est de la contrainte financi�re qui est � l�origine de la suspension du Matin, Benchicou fait signaler que cette question �est abordable et ne pose pas de probl�me�. Il rappelle � cet effet que �la mise en faillite du Matin n�a pas r�ussi et que le journal a fonctionn� pendant une ann�e (2003-2004) sans compte bancaire�. Ce fait commercial a occasionn�, n�anmoins, des retards dans le paiement de l�imprimerie. �Si l�imprimerie avait appliqu� les m�mes restrictions sur les autres journaux, on aurait �t� aujourd�hui sans aucun titre sur les �tals�, a tenu � pr�ciser le directeur du Matin, en ironisant par des propos tenus par l�ex-chef du gouvernement, Ouyahia, qui disait que �l�imprimerie suspend qui elle veut�. Abordant la ligne �ditoriale du Matin, Mohamed Benchicou a d�clar�, contre vents et mar�es, qu�aucune concession ne sera faite sur ce plan. Une position ferme et indiscutable. Le Matin r�appara�tra un jour ou l�autre, avec les m�mes positions politiques. � Le Matin a une histoire qu�il ne trahira jamais. Je ne ferai aucun chantage sur la ligne �ditoriale de ce journal, aucune concession�, affirme-t-il. Benchicou ne va pas sans pr�ciser que, plus que jamais, les libert�s de la presse sont menac�es. Il a tenu � avoir une pens�e � tous les journalistes qui ont �t� emprisonn�s et harcel�s durant ces deux ann�es o� lui purgeait sa peine. A une question de savoir quelle serait la position du Matin s�il avait � se prononcer sur la loi sur la r�conciliation nationale, le conf�rencier a d�clar� qu�il n�avait pas �� servir de piment � une grosse farce�. �On aurait pris une position franche contre la r�conciliation nationale. M�me les d�tenus dans la prison ont pris cela comme une grande injustice�, ajoute-t- il. Benchicou et les d�tenus Evoquant, par ailleurs, les conditions de son emprisonnement, Mohamed Benchicou a racont�, avec beaucoup de compassion, ses deux ann�es pass�es dans la cellule. Il revient, d�sormais, avec une autre vision de la prison, des d�tenus et de toute la soci�t�. Cette exp�rience, aussi douloureuse soit-elle, a renforc� la personnalit� de Mohamed Benchicou, lui a ouvert les yeux sur d�autres r�alit�s, l�gu�es au second plan par la presse alg�rienne. Il profite de cette occasion, d�ailleurs, pour revenir sur le contenu de la presse, en disant que celle-ci doit r�viser sa fa�on d�aborder le milieu carc�ral, qui, selon lui, �est un produit d�une justice aux ordres�. �Les prisons comme elles sont d�crites n�existent pas. Les prisons ne forment pas. Il y a des prisons surpeupl�es o� r�gne la torture physique et psychique. Des maladies graves et incurables naissent dans ce milieu. Des mineurs sont abandonn�s � leur propre sort sans protection et sans prise en charge�, telle est la situation actuelle de la prison en Alg�rie, d�crite par Mohamed Benchicou. �C�est sur ce genre de th�mes que la presse devrait se pencher �, dit-il. Pour ce qui est de sa personne, le conf�rencier a signal� que le d�tenu d�opinion est prot�g� � l�int�rieur de la prison par les autres d�tenus qui lui apportent soutien et veillent sur son confort. Parlant de d�tenu d�opinion, Mohamed Benchicou a confirm� avoir rencontr� � plusieurs reprises Ali Benhadj � l�int�rieur de la prison et a d�clar� avoir m�me d�nonc� les conditions de son incarc�ration qui sont inhumaines. Cependant, l�orateur a pr�cis� n�avoir abord� aucune discussion politique avec le chef islamiste. Constat amer sur la libert� d�expression Revenant � l�actualit� politique, Benchicou a fait un constat des plus amers concernant la restriction de la libert� d�expression ces deux derni�res ann�es. Il d�clare que son emprisonnement a �t� fait dans cette m�me offensive men�e contre toutes les libert�s quelle que soit sa provenance, que ce soit de la presse, des syndicats, du mouvement associatif ou du mouvement social tout court. �Il y a une autocratie qui se dessine dans le pays. L�Alg�rie se transforme progressivement en un Etat bananier�, signale-t-il en tirant la sonnette d�alarme. �Les forces d�mocratiques doivent se mobiliser � chaque fois qu�un Alg�rien est emprisonn� pour ses �crits, son opinion ou pour ses activit�s syndicales�, mart�le-t-il. Benchicou illustre ses propos par, notamment, le harc�lement dont font l�objet, ces derni�res semaines, les syndicalistes de l�enseignement sup�rieur. Classe politique dite d�mocrate ? Sollicit� sur le mutisme de la classe politique concernant les d�rapages et les d�rives du pouvoir � l�encontre des forces d�mocratiques, Benchicou a affich� un sourire ironique. �Leur bilan n�est pas flatteur�, dit-il, en signalant que �ces m�mes partis ont trouv� leur soutien chez la presse libre. L�expression d�mocratique n�est plus port�e par ces partis dits d�mocratiques, elle est port�e par le contre-pouvoir que sont les syndicalistes�.