Parmi ses fulgurances po�tiques, Kateb Yacine a laiss� � la post�rit� un agencement de quelques lettres que la g�n�ration post-ind�pendance a scand� pour affirmer une identit� jadis ni�e. C�est � cet inconsolable patriote que l�on doit cette petite comptine qui se d�clinait en une phrase : �FLN�ALN : tel est notre alphabet�, comme pour dire de ce �polygone �toil� qu�il est assur�ment une nation. De cet ab�c�daire de la dignit� revendiqu�e il ne reste, h�las, qu�un fatras de regrets. Trop de raisons en furent � l�origine. D�abord un �front� devenu sectaire et ensuite une arm�e d�couvrant la r�pression malgr� ses nouveaux credo qui postulent � sa �popularit�. L�Alg�rie l�gale accoucha tr�s t�t d�un monstrueux corpus de censeurs et se dota d�un bras arm� qui ne surent faire des libert�s qu�en les muselant. Sch�matiquement, c�est ainsi que se d�finit le syst�me lequel excella, l�exp�rience aidant, dans la r�pression et l�exclusion. Celles qui marginalisent les t�tes qui d�passent, nivellent par le bas et brident le discours contradictoire. De saisons politiques en saisons de recyclage, nous voil� aujourd�hui, sous la coupe de m�diocres all�geances qui s�agitent sous un dr�le d�alphabet. Paradant au nom de la diversit�, ils ne sont en v�rit� que des succursales d�un m�me holding estampill� orthodoxe. FLN�RND-MSP, tel est le bon alphabet pour celui qui nourrit des ambitions de promotions politiques. En dehors de ces enseignes, il n�y a point d�autres dogmes. Les rites du pouvoir relay�s par ce triptyque accaparent l�essentiel de l�activit� partisane. Alli�s pour le meilleur des privil�ges, ces trois clochers diffusent les pires contrev�rit�s et notamment les m�mes. Car, enfin qui peut encore faire la diff�rence entre le propos de Belkhadem et celui de Ouyahia ? Et qui peut soup�onner Bouguerra de faire bande � part ? Solidaires dans la besogne de ge�liers des libert�s publiques, ils ne peuvent se d�marquer les uns des autres sans se retrouver au banc des accus�s. L�on a �crit ici et l� que l�alliance autour de Bouteflika s�effiloche. La belle affaire pour abuser les na�fs � qui l�on fait accroire qu�il y aurait une crise au sommet. Sauf que personne ne sait de quoi il en retourne et pourquoi de solides connivences se d�lieraient. Qu�il y ait des jalousies entre concubins ne constitue pas un risque s�rieux pour le s�rail o� tout le monde couche dans le lit de la compromission. A l�exemple de ce mystificateur, ex-Premier ministre r�pudi� entre deux portes, qui continue � courtiser bassement les r�seaux officiels, il ne faut donc pas pr�ter de l�importance aux gesticulations de ces marionnettes r�tribu�es. Elles ne s�opposent sur rien d�essentiel et n�assurent dans la r�alit� quotidienne que des r�les de fairevaloir. Pas plus que cet FLN usurp�, le RND et le MSP ne p�sent id�ologiquement sur le cours des choses. Ils ne sont que des fictions destin�es � peupler les institutions de la R�publique et � ob�ir en toutes circonstances. Cela est tellement vrai que cette tro�ka de leaders visibles (Belkhadem-Ouyahia et Bouguerra) n�a d� sa promotion qu�� la bonne recette du putschisme t�l�guid� d�en haut. Individuellement, aucun des trois n�a m�rit� son accession d�une quelconque base militante, si tant est que ces officines en poss�dent. Encore faut-il nuancer le jugement � propos de Hamas, m�me si la succession de Nahnah fut lourdement entach�e de manipulation. Une alliance de ce genre, loin d�exprimer une convergence doctrinale entre courants, traduit en fait la pr�dilection du syst�me � toujours verrouiller le champ politique � son profit tout en se donnant une image tronqu�e de l�exercice des libert�s politiques. Le r�gime de Bouteflika est tout sauf d�mocratique. M�me s�il n�est pas brutalement dictatorial, il demeure n�anmoins fortement marqu� par la culture de la r�pression et de la marginalisation. Durant huit ans, il multiplia les subterfuges pour appara�tre � son avantage, ce qu�il n�a jamais �t�, jusqu�� influencer la prose journalistique qui s�accommoda de la semi-libert� octroy�e. Car, si l�on peut faire tous les reproches � la st�rilit� du r�gime de la pens�e unique et se garder �galement de faire l��loge de la pagailleuse foire des 60 partis, il est par contre urgent de souligner la r�gression d�mocratique qui est la carte de visite de l�actuel chef de l�Etat. En effet, � l�heure de son bilan d�cennal, il ne pourra pas se pr�valoir de la qualit� d�homme de dialogue et d�ouverture. A moins qu�il consid�re que la seule promotion des libert�s publiques qui vaille la peine est de redonner, comme il fait actuellement, des tribunes � l�islamisme politique. De ce point de vue, l�on pourra alors tirer toutes les conclusions que l�on voudra sur son magist�re. Et par voie de cons�quence, l�on s�expliquera pourquoi Zeroual fut �placard� � � l��t� 1998 et comment le choix s�est port� sur un ancien ministre issu d�un vieux coup d�Etat. D�s l�instant o� toute la probl�matique de l�Alg�rie a �t� r�sum�e dans l��quation de l�islamisme, il fallait � cette �poque (septembre 98) d�nicher le profil de celui qui �tait susceptible de casser la dynamique r�publicaine et en m�me temps absorber le populisme des mollahs alg�riens. A l�homme idoine, il lui fallait adjoindre un appareillage adapt� � cette besogne de laminage. Le FLN reconfigur� sur le mod�le de la cohabitation si ch�re � Mehri, puis le MSP nettoy� du �cosmopolitisme � islamiste que revendiquait Nahnah ; et enfin un RND reconverti � la bonne cause, constitu�rent la t�te de pont de cette strat�gie qui a finalement abouti � l�impasse. Car, non seulement les contre-pouvoirs institutionnels furent tous �mascul�s, mais l�on c�da plus qu�il n�en faut aux exigences du radicalisme int�griste. Les cabinets noirs, � l�origine de tous ces plans, sur la com�te, firent �tout faux�, eux qui supputaient d�une alternative politique � l��radication d�un fascisme religieux. Dans les faits, ils ne sont parvenus qu�� d�sarmer l�Etat et � livrer les cercles du pouvoir � de perverses tractations.Belkhadem, au nom du F.L.N, a d�j� montr� la voie � ses comparses de l�alliance en rendant fr�quentables certains dirigeants du FIS. Bouguerra et Ouyahia ne voient d�j� plus d�inconv�nient � s�associer � ces r�habilitations obliques, m�me s�ils reprochent � leur alter ego de les avoir �doubl� dans cette op�ration. C�est � cela que se r�sume la �crise� de l�alliance. Un simple diff�rend dans le partage du butin islamiste dont chacun voudrait recycler le maximum de noms lors de renouvellement des assembl�es. Gr�ce � cet �alphabet� du pouvoir, des �diles et des parlementaires notoirement int�gristes si�geront en 2007. La promesse a d�j� �t� faite par Belkhadem et ce n�est s�rement pas Bouguerra qui en sera f�ch� ou Ouyahia, qui une fois de plus, retournera la veste sans �tats d��me.