Deux ans apr�s, la situation s�curitaire sollicite une �valuation sereine et objective de la charte pour la paix et la r�conciliation nationale. Le commun des Alg�riens a, en la mati�re, sa religion faite : l��chec est frappant. Le pouvoir, initiateur et promoteur de la d�marche, persiste � occulter cette r�alit�. A-t-il conscience des menaces r�elles que cet ent�tement fait peser sur l�Etat r�publicain ? Sofiane A�t-Iflis Alger - (Le Soir)- Le 29 septembre 2005, le pouvoir conviait le peuple � pl�bisciter par voie de r�f�rendum la graduation ajout�e dans sa d�marche r�conciliatrice. La charte pour la paix et la r�conciliation nationale, un projet compl�tant les deux dispositifs ant�rieurs, la rahma d�abord et la concorde civile ensuite, mis en place pour booster les redditions parmi les groupes terroristes, mais aussi donner une assise juridique � leur insertion sociale, re�ut ainsi la caution populaire, r�elle ou suppos�e. En tout cas, officiellement, une majorit� consistante d�Alg�riens s�y �tait exprim�e favorablement. Le texte objet de r�f�rendum, qui devint loi promulgu�e, s�riait le b�n�fice de la cl�mence, du moins il ne disposait dans aucune de ses mati�res que l�amnistie g�n�rale en faveur des repentis, allait �tre syst�matique. Depuis, pendant sa campagne pour le r�f�rendum et � l�occasion d�autres expressions publiques ou m�diatiques, le ma�tre d��uvre de la charte, le pr�sident de la R�publique, s�employait avec hardiesse, le ton souvent solennel, � rassurer ceux qui avertissaient contre une amnistie g�n�rale. �videmment, cela n��tait que ruse de campagne. La mise en application effective de la charte pour la paix et la r�conciliation nationale s��tait traduite par une amnistie g�n�rale. Le coup parti, les oppositions qui s��taient �lev�es n�eurent en d�finitive qu�� constater les d�g�ts. La charte pour la paix et la r�conciliation nationale connut, donc, cette extrapolation dangereuse qui �lisait, dans les faits, tout repenti au b�n�fice de l�amnistie g�n�rale, contrairement � la lettre de la loi elle-m�me. Quel bilan faudra- t-il en �tablir, deux ann�es apr�s ? Au plan de la quantification math�matique, la loi a induit des redditions parmi les groupes terroristes. Mais elle n�a pas pour autant mis un terme � la subversion. Preuve en est que les attentats n�ont jamais cess� depuis. M�me pire, ils ont connu une amplification et une nouvelle illustration dans des op�rations kamikazes. Celles perp�tr�es depuis avril dernier �tant les plus spectaculaires et les plus sanglantes. La charte pour la paix et la r�conciliation nationale, autant dire l�amnistie g�n�rale, a manqu� d�atteindre son objectif. Non seulement elle n�a pas eu trop d�effet sur le terrorisme qui garde sa nuisance quasi int�grale, mais elle a aussi et surtout g�n�r� une d�mobilisation des corps de s�curit� engag�s dans la lutte antiterroriste et affaibli en m�me temps la r�sistance citoyenne. Cens�e faire recouvrer la paix, la charte pour la paix et la r�conciliation nationale n�a r�ussi jusque-l� qu�� g�ner la lutte militaire contre le terrorisme qui, pour sa part, a poursuivi de s�vir acharnement. Car, s�il est vrai que le groupe islamique arm� (GIA) n�est plus autant op�rationnel qu�il l��tait au milieu des ann�es 1990, il ne reste pas moins que son excroissance, pour ne pas dire sa branche dissidente, le Groupe salafiste pour la pr�dication et le combat (GSPC) est demeur� actif. Sourd aux r�p�titifs appels � la reddition que le pouvoir et ses organisations politiques suppl�tives lui adressent, toujours au nom de la r�conciliation nationale, le GSPC commit, deux ans depuis, donc, attentat sur attentat. Et s�il a maintenu un tel degr� de nuisance et cette capacit� d�action c�est qu�il a profit� de la d�mobilisation g�n�rale pour � la fois se structurer, mais aussi enr�ler des candidats au �martyr�. Autrement dit, le GSPC a poursuivi de recruter des adeptes au djihad � l�ombre de la r�conciliation nationale. Il puise autant dans les franges juv�niles de la population que dans les rangs des anciens terroristes amnisti�s � la faveur de la charte. En effet, beaucoup parmi les repentis amnisti�s ou les �largis des prisons ont repris les chemins des maquis. Sans omettre ces nouvelles recrues, souvent candidates aux op�rations kamikazes. Peut-on raisonnablement encore parler de r�ussite quand les d�flagrations successives attestent d�un �chec patent ? Paradoxalement, il s�en trouve qui jureront par Dieu que jamais nulle autre d�marche que la r�conciliation nationale n�a abouti � sortir le pays de la violence terroriste. D�aucuns voudraient peut-�tre bien les croire n��tait cette r�alit� faite de sang et de psychose. Le pouvoir, qui ne consent toujours pas � proc�der � une �valuation objective et sereine de sa d�marche r�conciliatrice, va m�me jusqu�� trouver fantaisiste l�affiliation du GSPC � Al Qa�da. Il a fait le choix d�ainsi discourir pour, d�aucuns l�auraient saisi, ne pas avoir � se d�dire. Car reconna�tre le lien entre le groupe terroriste s�vissant en Alg�rie et Al Qa�da se voudrait un aveu de ce que l�effort r�conciliateur a �chou�. C�est-�-dire que non seulement les maquis terroristes ne sont pas d�garnis et que la violence a persist�, mais aussi que, � l��re de la r�conciliation nationale, le GSPC a int�gr� la matrice du terrorisme international. S�il reconna�t cet �tat de fait, il lui sera difficile de poursuivre dans sa politique de main tendue. C�est de l� que lui vient d�ailleurs cette attitude � s�empresser � d�nier au GSPC son all�geance � Al Qa�da et, cons�quemment, continuer � raisonner autour d�une r�alit� abstraite qui voudrait de voir la r�ussite au lieu et place du ratage. D�agir ainsi, le pouvoir ne peut que penser de fausses solutions. Elles le seront toutes tant qu�elles s�arriment � la r�conciliation nationale. Et d��vidence, le pays, qui a trop endur�, poursuivra de s�engouffrer dans l�impasse.