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Echange �pistolaire entre Chafik Mesbah et Yasmina Khadra
Publié dans Le Soir d'Algérie le 19 - 11 - 2007

CHAFIK MESBAH : � Je suis �tonn� par ta disponibilit� empress�e �

YASMINA KHADRA : � C'est un sacrifice pour moi d'accepter ce poste �
Notre ami et collaborateur Mohamed-Chafik Mesbah vient de f�liciter � tout en le r�primandant et en exprimant des craintes � son ami Yasmina Khadra � la suite de sa nomination au poste de directeur du Centre culturel alg�rien de Paris. Dans sa r�ponse, l�auteur de L�imposture des mots s�explique sur les raisons qui l�ont conduit � accepter de diriger l�institution culturelle parisienne tant convoit�e. Il a souhait�, par ailleurs, que sa r�ponse soit rendue publique. Dont acte. Nous publions les deux courriers, la lettre de Mohamed-Chafik Mesbah et la r�ponse de Mohamed Moulessehoul.
Chafik Mesbah : �Je suis �tonn� par ta disponibilit� empress�e�
1. Tout d�abord, je t�adresse mes f�licitations pour ta nomination aux fonctions de directeur du Centre culturel alg�rien de Paris. Je souhaite que ton passage � la t�te de cette institution t�offre l�opportunit� de laisser une empreinte durable sur l�histoire de ce lieu de culture, dans le sens, bien entendu, du renouveau et de l�ouverture.
2. Ceci dit, nous sommes tous deux militaires, du moins le suis-je rest� personnellement, dans mon habitus social et culturel. Pas question de nous raconter, mutuellement, �des histoires�. Autant que de nombreux intellectuels alg�riens, je suis pour le moins �tonn� par cette tournure des �v�nements, non pas tant, d�ailleurs, de l�offre qui t�a �t� faite que de ta disponibilit� empress�e � assumer la t�che.
3. Je me refuse par rigueur morale de juger des d�cisions des uns et des autres, m�me s�il s�agit d�amis chers. A l�apog�e du terrorisme, justement, certains d�entre eux s��taient exil�s � l��tranger pour �chapper � la violence. Je n��tais pas d�accord avec leur comportement, mais je ne les ai jamais condamn�s. Dans l�affaire Khalifa, mon ami Abdelwahab Keramane, ancien gouverneur de la Banque centrale d�Alg�rie, ayant �t� entra�n� dans cette triste histoire, a cru bon de ne pas r�pondre � l�appel de la justice alg�rienne. M�me si, en mon �me et conscience, je suis convaincu que l�histoire �tablira son innocence, je n�ai pas �t� d�accord avec le choix de l�exil. Je le lui ai signifi� sans -jamais me permettre de l�en bl�mer. C�est dire que ton cas, aussi bien, je ne me consid�re pas habilit� � juger de tes d�cisions m�me si, effectivement, je suis un peu bless�, au fond de moi-m�me, que tu aies accept� cette offre. Tu es, apr�s tout, seul responsable devant ta conscience.
4. C�est � ton bilan, au demeurant, que le peuple alg�rien, et plus s�rement, l�histoire auront � te juger. J�ai appris par la bande que cette d�signation avait �t� initi�e par des contacts pr�alables entre le pr�sident de la R�publique et toi-m�me. J�ignore de quoi vous avez discut�, mais je suppose qu�il y a eu un plan de charges adopt� qui agr�e les deux parties. C�est ce plan de charges, implicite ou explicite, qui me pr�occupe.
5. J��voque, sans transition, le plan de charges pour exclure l�hypoth�se triviale que certains milieux avancent pour expliquer ta nomination. Ceux-l� supposent, en effet, que ta nomination r�pondrait � une pure logique de clan que conforterait un soubassement r�gionaliste. Le cercle pr�sidentiel veut quelqu�un � lui � un poste jug� important pour l�image du r�gime, voil� tout. Te connaissant suffisamment, gr�ce � nos �changes intellectuels, gr�ce � nos rencontres et surtout, gr�ce � l�avis autoris� de ceux qui t�ont fr�quent� sur les bancs de l��cole des cadets de la R�volution ou au sein des unit�s de combat de l�ANP, je suis enclin � penser que tu es inaccessible � cette logique d�incultes ou, pour le mieux, de �ripailleurs�. On ne transite pas impun�ment par les �coles des cadets de la R�volution si ch�res aux yeux du d�funt pr�sident Boumediene. Devisant, tant�t, avec un ancien de tes condisciples, je lui ai, � cet �gard, pos�, brutalement, cette question : �Actuellement, la cha�ne de commandement militaire est compos�e, essentiellement, d�officiers issus des �coles des cadets de la R�volution. Penses-tu que l�origine g�ographique des uns et des autres puisse affecter la coh�sion de leur groupe ?� La r�ponse a fus� d�un jet : �Non, certainement pas !�
6. Il reste, alors, le plan de charges en lui-m�me. La �carte blanche� du pr�sident de la R�publique �voqu�e par la presse nationale, ce serait, en somme, la garantie d�un projet de port�e strat�gique pour le renouveau de la culture alg�rienne ? Quitte � faire transiter un tel projet par Paris ? J�aurais tant voulu que cela soit vrai, apr�s tout l�Etoile nord africaine, pr�curseur du mouvement nationaliste en Alg�rie, a bien pris naissance dans les milieux ouvriers de l��migration alg�rienne en France. C�est l�, h�las, un simple raccourci. Ma religion est faite en ce qui concerne la possibilit� pour le syst�me de se r�former de l�int�rieur. L�hypoth�se la plus vraisemblable, c�est une collision frontale entre la soci�t� virtuelle (le syst�me, ses appareils et ses instruments) et la soci�t� r�elle (la majorit� de la population d�laiss�e � son sort et subissant des conditions d�existence de plus en plus p�nibles). Dans le processus qui m�ne � cette issue fatale, c�est l��tranger, bien plus que les �lites nationales, qui disposera d�une influence significative. Comment un syst�me tomb� en obsolescence clinique � quoique encore r�sistant aux assauts qui lui sont donn�s de l�int�rieur � pourra m�nager cette fen�tre dont tu peux, de bonne foi, r�ver ? La libert� est indissociable, il est impossible de verrouiller l�espace politique, de fermer le paysage m�diatique puis de laisser croire que la culture va conna�tre sa r�volution !
7. De mani�re plus pesante, je suis saisi par la crainte, � propos de ce plan de charges, que ta notori�t� ne soit d�tourn�e � des fins politiciennes. Nous avons eu, tous deux, l�occasion de discuter de nos fortes pr�ventions contre la hi�rarchie militaire. Autant que toi, je suis constern� par le niveau d�inaptitude intellectuelle et, parfois m�me, l�incurie morale de certains de nos si vaillants chefs. Cela dit, je refuse d��tre la main par laquelle on brandira le couteau destin� � poignarder la famille. Accepteras-tu de l��tre ? Je ne nourris pas d�a priori id�ologique, ni d�animosit� personnelle, je sais bien que la politique c�est l�art du possible. L�un des seuls domaines, d�ailleurs, o� le bilan du pr�sident de la R�publique trouve gr�ce � mes yeux, c�est bien l�image de cette bouff�e d�oxyg�ne introduite dans la hi�rarchie militaire o�, d�sormais, tes compagnons cadets peuvent aspirer � acc�der aux v�ritables commandes, je dis bien aux v�ritables commandes. En attendant, cependant, le tour de mes propres anciens compagnons, lorsque le souffle de rajeunissement et de professionnalisation frappera fort aux portes de leur corporation.
8. Ce n�est pas une d�marche id�ologique qui me conduit � t�interpeller. C�est une pure d�duction empirique. J�ai toujours affirm� que la d�marche du pr�sident de la R�publique se distinguait par l�absence d�un projet national de port�e strat�gique. Sans jamais nier, pour autant, l�habilit� tactique de l�homme ni sa capacit� man�uvri�re. Je suppose qu�il n�ignore rien de ton v�ritable �tat d�esprit concernant les usages pass�s au sein de nos forces arm�es. Il suffit de bien lire tes romans pour s�en impr�gner car, nous en avons d�j� parl�, chaque �uvre que tu as produite est un fragment de ta vie. Il existe, par cons�quent, le risque que ta fougue de romancier, ta verve d��crivain et ta candeur de militaire � oui je dis bien ta candeur de militaire � ne soient mobilis�es pour discr�diter l�ancienne hi�rarchie militaire. A travers la contre-image que tu produirais toi-m�me et l��cho qui r�sonnerait des plumes et voix incontestables que tu pourras rassembler.
9. J�ai tenu � m�exprimer avec toi de la mani�re la plus franche, en esp�rant ne pas t�avoir bless� et, en te recommandant, excuse-moi l�expression, �de ne pas vendre ton �me au diable�, si tant est que cela soit � l�ordre du jour. Je crains que tu ne sois, � ton corps d�fendant, entra�n� � faire �la sale besogne�, exactement comme tel personnage se targue du bonheur de l�effectuer, dans l�autre sens. Pour le reste, je veux te rassurer. Mon amiti� t�est acquise ainsi que ma sympathie, en toutes circonstances.
Cordialement, Mohamed-Chafik Mesbah
Yasmina Khadra : �C�est un sacrifice pour moi d�accepter ce poste�
Ta franchise me rassure, cher fr�re. Et me touche. Ainsi s'inqui�tent les amis pour leurs amis. Mais, crois-moi, il n'y a pas le feu. Cette nomination m'a surpris, moi le premier. Je l'ai accept�e par humilit�. Elle ne m'apporte rien de bon, � tous les niveaux. Mais elle est une t�che comme tant d'autres, et j'ai accept� de l'assumer POUR TOUS LES ARTISTES ET LES INTELLECTUELS qui ont besoin de mes services. TOUS LES ARTISTES ET INTELLECTUELS ind�sirables, persona non grata comme je l'ai �t�, moi-m�me, dans ce centre. Tu ne peux pas imaginer ni mesurer le soulagement de cette �lite tant marginalis�e depuis qu'elle a appris que j'�tais � la direction du CCA. Je re�ois tous les jours des appels enthousiastes, des projets ressuscit�s, des espoirs fous. Comment peut-on �tre si bas et si stupide pour croire ou faire croire que cette nomination me profiterait personnellement lorsque mon lectorat et mon �diteur craignent de voir leur auteur d�tourn� ? Comment peut-on �tre si exp�ditif en parlant de course au "koursi", moi qui dispose d'un tr�ne plus beau que celui des rois : Ma Libert�! ? Comment peut-on soup�onner une quelconque tentation p�cuniaire, � ce poste, quand, en restant au chaud chez moi, confortablement install� dans ma paresse, dormant quand je veux et me levant comme bon me semble, je gagne largement ma vie. Mon probl�me est que j'aime mon pays. Je n'en ai pas d'autre et je l'ai toujours servi avec mes tripes et mes r�ves les plus ridicules. C'est un sacr� sacrifice pour moi que d'accepter ce poste, sauf qu'il se trouve que d'autres ont donn� plus que leur libert� pour nous tous, qu'ils ont donn� leur VIE, en nous l�guant leurs veuves et leurs orphelins. J'ignore comment fonctionne l'esprit des n�tres, de certains des n�tres car ils sont nombreux ceux qui ont compris mon geste et s'en r�jouissent. Mais ne l'ai-je pas dit mille fois, �crit noir sur blanc ? On ne peut redresser les esprits retors sans les casser. Les gens nobles reconnaissent tout de suite la beaut� des engagements sains. Quant aux minables, ils ne sauront d�celer la grandeur chez les autres. Ils ignorent ce que c'est. Ils ne peuvent m�me pas acc�der � l'estime qu'ils devraient avoir pour leurs propres personnes. Je suis ce que j'ai toujours �t� : un brave fils de l'Alg�rie. Je n'ai jamais trahi, jamais trich�, jamais reni� les miens, et j'ai toujours eu le courage de mes convictions. Ce n'est pas le Centre culturel alg�rien qui rehausse le prestige d'un �crivain comme moi, c'est moi qui lui donne une allure, une vocation, une cr�dibilit� en le ravissant aux pr�dateurs de tout poil et aux fonctionnaires encro�t�s, aussi enclav�s culturellement que les enclos � bestiaux. Par ailleurs, la confiance que m'accorde le pr�sident de la R�publique est, � elle seule, une r�volution. C'est historique. C'est la premi�re fois qu'un chef d'Etat alg�rien confie une t�che importante � un �crivain qui n'est pas du s�rail et qui a toujours �t� virulent � l'encontre du r�gime. Je n'ai pas le droit de condamner cette ouverture. Peut-�tre sommes-nous enfin en train d'acc�der � la maturit� ? Peut-�tre le pouvoir se rend-il enfin compte que l'�lite est l� pour l'�clairer et non pour le vilipender, qu'il est temps de la mobiliser autour d'un id�al commun au lieu de la marginaliser avant de la livrer poings et pieds li�s � la manipulation �trang�re comme c'est le cas d'un important contingent de nos intellectuels en France, d�pit�s d'�tre ignor�s et trait�s en parias par ceux-l� m�mes qui devraient les porter aux nues ? Etonnant que l'on change d'avis du c�t� du pouvoir, et pas du c�t� de ceux qui sont cens�s incarner l'intelligence et la g�n�rosit� ? Je ne suis l'ennemi de personne. Ma col�re est saine, sans haine ni frustrations. Je suis aussi libre que le vent, aussi int�gre que mes serments. Je ne suis ni � vendre ni � louer. Je suis tellement s�r de mon honn�tet� que je ne crains ni les pi�ges ni les r�cup�rations. Je vais l� o� mon c�ur me dit d'aller, d�sint�ress� parce aucunement dans le besoin, entier parce que j'aime mon pays. Je sais, c'est une rengaine vieille comme le plus vieux m�tier du monde, mais il se trouve que je suis aussi vieux que la na�vet�, aussi vieux que la puret� aussi. Tu me ferais un grand plaisir si tu publiais cette lettre dans le Soir d�Alg�rie. Il faut que les choses soient claires m�me si, forc�ment, les nuisances et les infamies rel�vent de la noirceur et des opacit�s.
Ton ami, Mohammed Moulessehoul,
alias Yasmina Khadra,
b�douin parce qu'authentique,
Alg�rien parce qu'il sait ce que �a signifie


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