Dans notre chronique de la semaine pass�e nous avons montr�, sur la base de donn�es chiffr�es officielles, combien l�industrie alg�rienne �tait en perdition et combien l�enjeu industriel �tait important pour l�avenir de l��conomie nationale. Renouer avec notre ambition industrielle n�est plus un choix. C�est un imp�ratif. Mais il ne suffit pas de le proclamer. Comment relancer l�industrialisation du pays ? Quelle strat�gie de relance adopter aujourd�hui ? Quels devront en �tre les principaux acteurs ? Nous ne pouvons pas envisager de r�ponses ad�quates � ces questions si nous n�avons pas rappel� au pr�alable ce qu�est le processus en cours actuellement de mondialisation de l��conomie. Tr�s rapidement, la mondialisation de l��conomie a rev�tu trois formes historiques : 1/ La sp�cialisation : les nations se sp�cialisent dans les productions o� elles sont le plus avantag�es : le commerce international s�effectue sur la base des avantages comparatifs. On date cette p�riode entre la seconde moiti� des ann�es 18000 et la fin de la premi�re moiti� des ann�es 1900 (1860-1940). 2/ La multinationalisation : le d�veloppement du protectionnisme �conomique a entra�n� les grandes entreprises � se multinationaliser pour contourner les barri�res tarifaires et non tarifaires �rig�es par les nations, les grandes entreprises vont produire sur le site m�me o� se trouvent le march� et la demande. Naissance et d�veloppement des firmes multinationales (1950-1980). 3/ L�int�gration : � partir des ann�es 1980, naissance de la firme globale : nous avons affaire � �l�entreprise sans usine�, �la grande firme �clate son proc�s de production en diff�rents endroits par la sous-traitance, l��outsourcing � : tout est fait �ailleurs�, sauf le marketing (l�image) mais y compris, et de plus en plus, la recherche-d�veloppement. La fabrication de produits de haute technologie, les activit�s manufacturi�res et de service sont r�alis�es par des partenaires � l��tranger. M�me les universit�s d�excellence, et la recherche-d�veloppement sont d�localis�es. (rentabilit� plus grande, co�ts plus faibles�). Mais les firmes internationales externalisent leurs activit�s dans les pays qui ont les capacit�s de les accueillir. Elles ne cherchent plus � contr�ler la gestion des partenaires �trangers par des prises majoritaires dans leur capital. A la place, elles s�installent ou bien passent des contrats avec les entreprises locales lorsque celles-ci sont performantes. Les firmes internationales deviennent des firmes r�seaux. Pour les pays du Sud, cette mondialisation impose des restructurations industrielles. Pour ne pas �tre laiss� au bord de la route, il faut renoncer � certaines activit�s et en d�velopper d�autres plus performantes, plus novatrices, moins concurrenc�es. L�avantage comp�titif ne repose plus sur l�avantage comparatif et les politiques industrielles et technologiques nationales d�inspiration colbertiste qui constituaient la pratique habituelle des gouvernements. La politique industrielle nationale devient une politique de l�attractivit� qui doit r�pondre � la question de savoir comment faire pour attirer les firmes �trang�res sur le territoire national soit en tant que producteur soit en tant que donneur d�ordre. Bien �videmment, attirer les firmes �trang�res sur le territoire national ne signifie pas se d�sint�resser et d�laisser les entreprises locales. Attirer les firmes �trang�res c�est au contraire les int�resser par des partenariats de production, de services et de recherched�veloppement avec les entreprises locales. Attirer les firmes �trang�res, c�est leur offrir des capacit�s nationales de sous-traitance, d�outsourcing. D�autre part la sp�cialisation des �conomies �mergentes ne se fait plus ex-ant� (�� l�avance�) en fonction de leurs dotations en facteurs (capital, travail et ressources naturelles) mais ex-post, en fonction des choix de localisation que font les firmes internationales. Les Sud-Cor�ens et les Japonais d�cident de s�installer en Alg�rie et notre pays devient sp�cialis� en �lectronique alors qu�au d�part, il n�y avait l� aucun avantage comparatif. Ainsi, les avantages comp�titifs se construisent par l�attractivit�. La politique industrielle devient la politique d�attractivit� et ce sont les ph�nom�nes nouveaux de globalisation des firmes, de g�n�ralisation du mod�le d�organisation en r�seaux, horizontalis�, les d�marches d�externalisation qui imposent ce nouveau paradigme de d�veloppement industriel. Les mod�les d�industrialisation par substitution d�importation et d�industries industrialisantes sont abandonn�s pour les mod�les �d�export-promotion �, c�est-�-dire les d�marches qui permettent aux entreprises des pays du Sud et avec elles, � toute l��conomie, d�occuper des segments de la cha�ne de valeurs internationale mises en place par les firmes internationales et les firmes globales. C�est ainsi que l�on peut comprendre les �politiques industrielles� du Maroc ou de la Tunisie, par exemple qui occupent aujourd�hui pour l�un, des segments d��quipementiers pour les grands avionneurs mondiaux (Airbus, Boeing) et pour l�autre pour les grands constructeurs automobiles. De m�me, l�Inde a fait de sa ville de Bangalore le p�le d�excellence mondiale de formation dans la haute technologie, notamment informatique. C�est le professeur Charles Albert Michalet qui rappelle : �De nouvelles opportunit�s pour le d�veloppement industriel du Sud sont offertes par les nouvelles modalit�s de la globalisation. La segmentation de la cha�ne de valeurs ajout�e par les op�rations d�externalisation risque de se montrer plus efficace que les �plans de d�veloppement � lanc�s autrefois en grande pompe par les autorit�s �tatiques du Sud.� Ainsi, il appartient aujourd�hui � l�Etat de construire les conditions n�cessaires pour l�accueil des investisseurs qu�ils soient �trangers ou domestiques. Une politique audacieuse d�infrastructures de transport et de t�l�communication permettant de relier efficacement l��conomie nationale au reste du monde. Une l�gislation immobili�re assouplie, un syst�me de formation adapt� o� l�Etat donne � l��cole, � l�universit� et � la recherche les moyens n�cessaires � la formation d�une main-d��uvre qualifi�e capable d�utiliser, voire de perfectionner les technologies les plus sophistiqu�es, une administration au service des entreprises constituent autant de facteurs d�attractivit� qui vont faciliter l�implantation sur le sol national des grandes firmes internationales. Penser une strat�gie de relance industrielle ne peut plus se faire en autarcie, c�est-�-dire en ignorant ce qui se passe dans le monde, comment l�industrie mondiale est en train de se reconfigurer non plus par le fait des Etats mais par celui des firmes globales et les fonds d�investissements.