L�association des jeunes entrepreneurs CARE a organis�, mercredi, � l'h�tel Sofitel d�Alger, un int�ressant d�bat sur �les moteurs et les acteurs de la croissance�. Comment fabriquer la croissance est bien la question cruciale � laquelle l'Alg�rie n�a pas encore r�pondu de mani�re claire. L�accord est maintenant �tabli entre �conomistes, entrepreneurs et autres observateurs de l��conomie alg�rienne, qu�ici, le r�gime de croissance en �uvre n�est pas efficace. Du point de vue des moteurs de la croissance, seule la d�pense publique agit. Du point des acteurs de la croissance, l'ambigu�t� est grande et les h�sitations nombreuses entre un retour aux entreprises publiques des ann�es 1970 et un pas, qu�on n�ose pas encore franchir, vers un soutien franc aux entreprises priv�es et leur accompagnement dans une dynamique d�investissement, de production et d�exportation. Question Faut-il se lancer aujourd'hui dans la construction de grands groupes industriels publics � l�image de celui qui vient d��tre constitu� dans la branche ciment. Des grands groupes publics pour aller vers quoi ? L�industrie mondiale est d�j� en proie � de grandes batailles de comp�titivit� et de parts de march�, et les protagonistes sont des champions mondiaux (non pas publics mais � capitaux priv�s, faut-il le rappeler) en perp�tuelle restructuration, d�localisation, externalisation, champions mondiaux qu�il sera bien difficile de concurrencer, cela va de soi ! Notre �nouvelle� option industrielle, vraisemblablement inspir�e de l�exp�rience sud-cor�enne des �chabols� (qui a d�marr� voil� pr�s de 40 ans !) peut-elle se payer le luxe de refaire l�histoire et �chouer une nouvelle fois surtout que le contexte industriel mondial est aujourd'hui encore plus difficile, �voluant � un rythme tr�s rapide. Combien de temps nous faudrait-il pour construire des grands groupes performants et pourra-t-on le faire avec des entreprises publiques dont on sait maintenant qu�elles ne peuvent �tre g�r�es sous contrainte d�efficacit� � cause notamment de leur exposition aux in�vitables immixions du pouvoir politique ? Ne vaudrait-il pas mieux chercher � ouvrir le capital de nos entreprises publiques industrielles dans le cadre d�une strat�gie d�int�gration aux cha�nes de valeur internationales dont les grands champions mondiaux localisent aujourd'hui des segments entiers sur diff�rents sites (et dans diff�rents pays) par des strat�gies d�externalisation, d�out sourcing et que les pays �mergents cherchent � accueillir en rivalisant d�ing�niosit�. L�Alg�rie a d�j� une exp�rience en mati�re de grands groupes industriels publics. Rappelons-nous : notre industrie manufacturi�re toute enti�re �tait organis�e pour l�essentiel en une dizaine de grands groupes : Sonacome, Sonelec, SNMC, Sonic, SNS, Sogedia, Snic... On insistait � l��poque d�j� sur l�effet taille pour aider nos grandes soci�t�s nationales � devenir des champions m�me dans le cadre d�une gestion �tatique et planifi�e. Cette dynamique, dont on ne saura jamais si elle allait r�ussir ou pas, a �t� cass�e par la fameuse restructuration organique des entreprises publiques du d�but des ann�es 1980. Aujourd�hui, bien �videmment, le contexte national mais surtout mondial a compl�tement chang� et le rythme d��volution infernal impos� par les multinationales � l�industrie mondiale a compl�tement d�class� la d�marche adopt�e dans les ann�es 1970. Une nouvelle strat�gie industrielle A l��re de �l�entreprise sans usine�, de l�out sourcing, de la sous-traitance et des �call centers�, devrions-nous en Alg�rie revenir � l�industrialisation de type sovi�tique organis�e en grands combinats et recherchant l�effet taille ? Devrions-nous solliciter comme acteur principal du d�veloppement, d�abord l�Etat malgr� l�inefficacit� dont il a fait preuve, ici et ailleurs, en mati�re de gestion sous contrainte ? Ne devrions-nous pas aller plut�t � la petite et moyenne entreprise plus flexible, plus innovante pour peu que l�Etat la soutienne, l�accompagne et l�anime ? Ne devrions-nous pas lib�rer les initiatives, d�velopper l�esprit d�entreprise, mobiliser les capacit�s entrepreneuriales priv�es ? Mettre en �uvre un v�ritable �plan PMI priv�es� L�Alg�rie attend toujours son �small business act� qui soutient nos petites et moyennes entreprises et les aide � devenir des �gazelles�, c�est-�-dire des entreprises � forte croissance, innovantes et comp�titives � la fois sur le march� int�rieur et sur les march�s d�exportation. Un �small business act�, c�est bien �videmment une s�rie de mesures et d�actions en faveur de la petite entreprise qui ne sauraient se limiter � l�actuel programme de mise � niveau bien timide ou � l�actuel minist�re de la PME et ses faibles moyens. C�est en 1953 que le gouvernement am�ricain adopte et met en �uvre le �small business act� (SBA), programme d�di� � la petite entreprise, qui stipule que �le gouvernement doit aider, conseiller et prot�ger dans toute la mesure du possible, les int�r�ts de la petite entreprise�. Ainsi �le lib�ralisme �conomique n�est pas toujours l� o� on l�attend�.C�est le gouvernement am�ricain qui a mis en place de nombreuses aides en faveur des petites entreprises priv�es et cr�e la �small business administration� (SBA), employant 3 000 agents et dirig�e par un membre du cabinet du pr�sident am�ricain, administration charg�e de l�application de ce programme d�aide � la petite entreprise. Ces aides touchent � quatre volets : 1) L�acc�s aux march�s publics La loi impose que les march�s publics inf�rieurs � 100 000 dollars soient mis de c�t� pour �tre r�serv�s aux petites entreprises. Ainsi, 62 milliards de dollars de march�s publics sont attribu�s annuellement aux petites entreprises sur un total de 200 milliards de dollars pass�s par l�Etat f�d�ral. La SBA d�livre pour ce faire et � ce titre aux PME, un certificat de comp�tence qui atteste de leur capacit� � soumissionner. 2) La d�fense des PME Au sein de la SBA, il y a un bureau de d�fense de la PME (�Office of advocary�) mandat� pour �tre �les yeux et les oreilles� des PME. Ce bureau propose des dispositions en faveur des PME. Il est aussi le porte-parole des PME quand elles rencontrent des difficult�s. 3) La formation, le conseil, l�assistance La SBA d�veloppe de tr�s nombreuses actions pour former et conseiller les chefs d�entreprise. Il a �t� mis en place 57 centres de d�veloppement d�di�s � ces missions. 13 000 formateurs, essentiellement d�anciens dirigeants d�entreprises � la retraite, exercent dans ce cadre. 4) Les aides au financement Le gouvernement am�ricain, par l�interm�diaire de la SBA, met en place des programmes financiers qui r�pondent aux besoins des petites entreprises. Il s�agit principalement de garanties de pr�ts (quelque 11 milliards de dollars annuellement) et de soutien � l�industrie du capital risque par le biais du programme SBIC (small business investissement act). Le �small business act� a largement contribu� au d�veloppement des PME et les Etats-Unis disposent de 22 millions de petites entreprises qui emploient 52 % de la population active et contribuent pour 50 % du PIB. Ces PME ont cr�� depuis 1993, 10 millions d�emplois nouveaux. Pour sa part, et s�inspirant de l�exp�rience am�ricaine, la France a mis en �uvre en juillet 2006, le �plan gazelle�, d�di� aussi aux PME (de 20 � 249 salari�s). Rappelons que nous devons cette appellation de �gazelle� pour les PME � l��conomiste am�ricain David Birch. Pour qualifier les PME am�ricaines cr�atrices d�emploi et � forte croissance, Birch distinguait les �gazelles� d�une part, des ��l�phants �, ces grands groupes cot�s en Bourse qui ont tendance � d�truire des emplois, d�autre part des �souris�, ces tr�s petites entreprises (TPE) ayant vocation � ne pas grandir. Les d�cideurs fran�ais ont constat� une faible croissance des PME et ont pu identifier trois probl�mes 1- Pour atteindre ses objectifs de croissance, une �gazelle � doit recruter. Le march� du travail �tant en France peu flexible, l�entreprise a peur de prendre trop de risques. 2- Il n�y a pas d�encouragement fiscal pour soutenir les PME qui veulent augmenter leur taille et d�velopper leur potentiel de croissance. 3- Les banques ne suivent pas et n�assistent pas les PME en croissance qui rencontrent de nouvelles contraintes et qui souffrent de d�lais de paiement trop lents. L�objectif du �plan gazelle� en France est de travailler � faire �merger des PME innovantes et comp�titives par un accompagnement de l�Etat. Il y a alors de la part de l�Etat : 1/ Un soutien financier � l�innovation 2/ Une assistance conseils Plus concr�tement, le plan �gazelles� concerne les entreprises qui ont une croissance annuelle de leur chiffre d�affaires d�au moins 20 % pendant 4 ans en partant d�une base minimale de 100 000 dollars de chiffre d�affaires. Les mesures concr�tes d�aide � ces �gazelles� sont : 1) Gel de l�imp�t sur les soci�t�s 2) Possibilit� de d�caler le paiement des cotisations sociales des salari�s nouvellement embauch�s 3) Remboursement imm�diat du cr�dit d�imp�t recherche. De plus, un soutien financier public est accord� aux �gazelles�. Des �small business investment compagnie� (SBIC) inspir�s des mod�les am�ricains et anglais et qui rassemblent pouvoirs publics et op�rateurs priv�s, assistent financi�rement les PME dont les d�lais de paiement, trop longs, freinent consid�rablement les capacit�s de d�veloppement. Les ressources des SBIC sont constitu�es de capitaux collect�s par emprunts obligataires dont principal et int�r�ts sont garantis par l�Etat. De plus, les banques et les compagnies d�assurances font des apports. N�y a-t-il pas l� quelque source d�inspiration pour l�Alg�rie dont les PME, pourtant moteurs incontestables de croissance, d�innovation et de comp�titivit�, sont compl�tement plomb�es par manque de strat�gie des pouvoirs publics ?