Avec 49,5% pour la gauche contre 47,5% pour l�UMP et ses alli�s, les Fran�ais, appel�s aux urnes pour le 2e tour des municipales dimanche, ont confirm� et accentu� leur rejet de la politique men�e par le pouvoir en place. De notre bureau de Paris, Khadidja Baba-Ahmed La gauche a conquis, comme elle l�esp�rait, 42 villes qui passent de droite � gauche. Abstraction faite de Marseille gagn�e de tr�s peu (deux seuls si�ges de diff�rence) par le maire sortant Gaudin et de Bordeaux largement gagn�e au 1er tour par Alain Jupp�, huit des onze plus grandes villes sont depuis hier aux mains de la gauche. Des villes symbole comme Paris qui restera g�r�e par le socialiste Delano� m�me si la droite n�a pas perdu ses quelques arrondissements fiefs ; Toulouse qui vote depuis 37 ans � droite aux municipales est conquise par la gauche ; Saint-Etienne, depuis 25 ans � droite, rallie le camp gauche ; Reims, Amiens ou encore Caen et Strasbourg font de m�me et Lille renouvelle tr�s largement sa confiance � la socialiste Martine Aubry. La gauche confirme aussi sa pouss�e dans les d�partements en contr�lant dor�navant 60 d�partements sur 101. Deux interrogations capitales au lendemain de ce scrutin : que fera Sarkozy face au m�contentement exprim� ? Que fera la gauche et sera-t-elle capable de transformer cette dynamique en sa faveur en retour important sur la sc�ne politique fran�aise ? Le PS, enfin, saura-t-il d�passer les divergences entre ses nombreux pr�tendants au leadership et avancer en force unie pour pr�parer un projet alternatif ? Que va faire Sarkozy ? Quelques changements de forme La majorit� au pouvoir, comme globalement tous les t�nors de l�UMP, tente de nier l��vidence. Il ne s�agit pas d�un vote sanction ni �d�un match retour de la pr�sidentielle �, disent-ils, mais d�un vote strictement local. La cause de l��chec de la droite serait, selon cette derni�re, l�abstention qui a surtout frapp� la majorit� (35% de Fran�ais ne se sont pas pr�sent�s aux urnes, un record absolu !). Un seul discours a �t� serin� tout au long de la soir�e de dimanche : les Fran�ais n�ont pas sanctionn� Sarkozy, ne sont pas contre les r�formes, mais sont impatients d�en voir les r�sultats, et c�est pourquoi, tonnent-ils, il faut acc�l�rer les r�formes. L�argument d�velopp� suite aux consignes donn�es par Sarkozy � ses t�nors n�a pas tenu longtemps et il a bien fallu que certains dans ce camp se rendent � l��vidence. D�abord Jean- Fran�ois Cop�, pr�sident du groupe UMP � l�Assembl�e nationale, qui reconnaissait, le premier, la d�faite en d�clarant : �La d�faite enregistr�e par la droite aux �lections municipales et cantonales est due � la conjugaison des impatients et des m�contents.� D�faite, m�contentements, la r�alit� s�impose finalement. Jean-Pierre Raffarin, num�ro 2 de l�UMP et ancien Premier ministre est le premier � demander � tirer les enseignements de cet �chec : �Nous devons infl�chir un certain nombre d�axes de notre politique et rectifier le tir dans un certain nombre de points.� Pr�cisant qu��il faut parler de politique de l�emploi, cette politique qui a �t� oubli�e pendant 9 mois�. Quant au Premier ministre, Fran�ois Fillon, s�il a appel� la gauche, d�s apr�s la proclamation des r�sultats, �� ne pas instrumentaliser le vote des Fran�ais� consid�rant qu��il est malvenu de tirer des conclusions de ce scrutin qui reste local�, il a, toutefois, d�clar� que �la bataille du pouvoir d�achat va s�accentuer�, reconnaissant indirectement que le gros probl�me est l�, pr�cis�ment dans la d�t�rioration continue de ce pouvoir d�achat. Depuis la proclamation des r�sultats municipaux et pour la premi�re fois depuis qu�il est aux affaires, Nicolas Sarkozy ne s�est pas exprim�. Il l�a fait entre les deux tours en disant une chose et son contraire. Ce scrutin est municipal et pas national et qu�il allait donc �poursuivre son cap�. Il annon�a en m�me temps qu�il tirera tous les enseignements du second tour. Le fiasco est si grand pour lui et pour la droite qu�il ne peut rester attentiste ni longtemps autiste � ce que les Fran�ais ont exprim� par leur vote franchement � gauche. Pour l�heure, les seuls changements annonc�s sont plus de forme que de fond. Un petit remaniement qui devrait intervenir au plus tard demain (mercredi) et qui a balay� d�j� Martinon, son porte-parole et son conseiller, Jean-Marc Benamou qui quitte l�Elys�e et prend la direction de la Villa Medicis � Rome ; une re-pr�sidentialisation dans l�exercice de ses fonctions par l�abandon d��taler sa vie priv�e et moins d�interventions intempestives sur tous les sujets. Des changements de forme donc mais pas de fond. Sarkozy ne semble vouloir prendre aucun virage politique pour r�pondre � ce qu�attendent le plus les Fran�ais : l�am�lioration du pouvoir d�achat et le retour sur les d�cisions les plus impopulaires et les plus injustes. La gauche : parviendra-t-elle � s�unir pour un projet cr�dible ? La victoire sans conteste de la gauche aux municipales a permis aux repr�sentants de ses formations de sortir de la victoire modeste qu�ils affichaient au soir du premier tour. Dimanche, tous les acteurs de la gauche qui se sont succ�d� sur les plateaux t�l� affichaient l�espoir de voir la gauche revenir sur le devant de la sc�ne. Pour Marie-Georges Buffet (PC), �en �lisant dans tr�s nombreuses villes les candidats de la gauche, les Fran�ais nous envoient un message ; ils veulent aussi que les �lus de gauche combattent la politique politique �. Autrement dit, avoir r�ellement une politique de gauche. Si les responsables du PS qui se sont exprim�s ont eu un discours coh�rent, consistant � dire que pour l�heure, leur formation est � l�union et non aux querelles personnelles et qu�il n�y a pas urgence � ouvrir une guerre de succession (Fran�ois Hollande, le secr�taire du PS devant remettre son mandat � l�automne prochain), les t�nors commencent malgr� tout � tenter chacun de son c�t� � dire qu�il est en possession de propositions de r�novation du parti et qu�il serait, pourquoi pas, en mesure, � terme, de briguer l�investiture de son parti pour la prochaine pr�sidentielle. On en n�est pas encore l�. L��chec de la droite ne sera r�el, op�rant que si la gauche parvient enfin � opposer au programme de la droite, un contre-programme social et une strat�gie d�alliance claire � m�me de r�concilier profond�ment ses militants. Aucun maire issu de la diversit� dans les 37 000 communes fran�aises En dehors de Rachida Dati, ministre de la Justice qui a gagn� dans le 7e arrondissement, aucun autre candidat issu de l�immigration n�a �t� �lu maire d�une ville, m�me dans la plus petite qui soit. Il y a, bien s�r, quelques candidats, tr�s peu nombreux d�ailleurs, qui vont occuper le poste de maireadjoint ou de conseiller, mais rien de plus. Beaucoup de candidats issus de l�immigration ont �t� envoy�s au casse-pipe, dans des endroits o� ils n�avaient aucune chance d��tre �lus. Certains autres ont �t� parachut�s et n�ayant aucun ancrage dans les endroits o� ils se pr�sentaient ont naturellement �t� rejet�s par les �lecteurs. C�est l�, incontestablement, l��che c de toutes les formations politiques, particuli�rement de celles qui se disent de progr�s.