L'effondrement ce dimanche 16 novembre au petit matin d'un immeuble de cinq �tages � Bab-el-Oued, ayant entra�n�, une nouvelle fois, mort d'homme, vient encore sonner le rappel du rapport quasiment mal�fique qu'entretient ce populeux faubourg de la capitale avec les eaux du ciel, chaque fois que ces derni�res l'arrosent avec une g�n�rosit� inaccoutum�e. Mais l� ne semble pas r�sider la cause unique de ces drames � r�p�tition, qui endeuillent r�guli�rement les modestes familles de cet altier et authentique quartier populaire de la capitale, et ceux d'autres villes du pays, malheureusement. Longtemps limit� aux fragiles et vuln�rables �douerate� de la vieille m�dina d'Alger, le ph�nom�ne de l'effondrement du vieux b�ti semble, en effet, gagner du terrain et toucher, par un effet tache d'huile exponentiel, les immeubles de style haussmannien ayant pignon sur rue des quartiers environnants, aussi bien ceux situ�s � l'est qu'� l'ouest de la vieille ville. Les exemples, hier encore rarissimes, commencent aujourd'hui � devenir l�gion et pour certains � d�frayer carr�ment la chronique alg�roise : effondrement tragique d'un h�tel pr�s du square Port-Sa�d, menace d'effondrement de l�immeuble situ� au 8, rue Sergent-Addoun (ex-Monge) qui abritait la fameuse boulangerie �La Parisienne� au c�ur m�me de la rue Didouche-Mourad,� Pourquoi ? Malgr� l'absence de statistiques fines et fiables sur cette complexe question, quelques �l�ments de r�ponse peuvent �tre apport�s � travers le recoupement de certaines informations pr�cieusement recueillies par nos soins. Sur les quelque 400 000 logements environ que compterait aujourd'hui la capitale, plus de 25 000 habitations sont d'un niveau de v�tust� tr�s avanc�. Avec un taux d'occupation moyen par logement de 6 personnes, cela concernerait pr�s de 150 000 Alg�rois ! Un chiffre qui date d�j� d�avant le s�isme de 2003, ayant ravag� Zemmouri et Boumerd�s, qui a fragilis� de nouveaux immeubles et quartiers, notamment ceux situ�s dans la zone du Hamma. Les constructions des quartiers p�riph�riques de La Casbah comme celui de Bab-el-Oued, datent du d�but de la colonisation (p�riode de 1850 � 1890). Ce b�ti a �t� r�alis� presque exclusivement � partir de mat�riaux r�cup�r�s de la d�molition de la Basse- Casbah, op�ration datant de l��poque des grandes trou�es haussmanniennes (Ex-rue Randon, Chartres, boulevard de la Victoire). Sachant que ces mat�riaux ont �t� r�utilis�s et compte tenu de l��ge de ces constructions qui d�passe un si�cle et demi, on ne peut que se rendre � l��vidence, que leur r�habilitation est devenue aujourd'hui une n�cessit� imp�rieuse ; mieux, vitale. Historiquement, le quartier de Babel- Oued repr�sente dans l'Alger �europ�enne�, l�un des premiers, sinon le premier � �tre urbanis� et d�velopp� selon les techniques de construction en vigueur � cette �poque-l�, � savoir l'utilisation des murs porteurs en pierres avec des planchers en vo�tains, proc�d� utilis� avant le b�ton arm�. Avec les infiltrations souterraines intenses que conna�t en temps de pluie la partie de remblais de l'oued M'kessel situ�e en aval de Triolet et en amont des Trois- Horloges (lieu de tous les drames de ces derni�res ann�es), ces planchers ont tendance � c�der sous l'effet des mini-glissements de terrain qui les travaillent en profondeur. Au plan de la densit� de population enfin, la commune de Babel- Oued est plac�e en t�te des communes de la wilaya d'Alger, avec environ 750 habitants par hectare, devant celles d�Alger- Centre, La Casbah et Sidi M�hamed avec une densit� comprise respectivement entre 500 et 400 habitants. Les surcharges des immeubles y sont les plus fortes et les am�nagements sauvages portant atteinte aux �quilibres architecturaux des �carcasses� originelles des immeubles, les plus nombreux et les plus graves. Ce sont l� quelques donn�es qui nous permettent aujourd'hui d'introduire des �l�ments de lisibilit� dans l'un des probl�mes les plus graves auxquels auront � faire face � l'avenir les gestionnaires de nos grandes m�tropoles en ce d�but de troisi�me mill�naire, � c�t� de ceux, fort nombreux, d�j� r�pertori�s. D�couvrant assez tardivement cette vuln�rabilit� particuli�re du vieux b�ti de ces grandes villes, les pouvoirs publics ont fini par se r�veiller et prendre de nombreuses initiatives, propres � cerner de mani�re un peu plus pr�cise cette grave question. L'une de ces derni�res fut la tenue, en mars 2006 au si�ge du minist�re de l�Habitat et de l�Urbanisme, d'une rencontre r�unissant les walis d�Alger, Annaba, Constantine et d�Oran autour du th�me �m�thodologie sur la conduite de l�op�ration de diagnostic de l��tat de vuln�rabilit� du vieux b�ti dans ces grandes villes�. Quelques op�rations sporadiques de relogement de familles menac�es furent m�me �a et l� initi�es dans la f�brilit� de l'urgence. Sans r�sultat probant apparemment, puisque les habitants de Bab-el-Oued, encore sous le coup du traumatisme majeur du 10 novembre 2001, continuent de redouter des s�ismes provoqu�s non pas par le jeu des plaques tectoniques terrestres et souterraines, auquel leur farniente quelque peu fataliste a fini par s'habituer, mais par les caprices du ciel, chaque fois qu'un BMS est �mis par les services de m�t�o Alg�rie. Pourtant, le wali d�l�gu� actuel de Bab-el-Oued actuel semblait correspondre, au moment de sa d�signation, au profil de sauveur supr�me, lui qui fut directeur de l'urbanisme dans sa vie ant�rieure et m�me, semble-t-il,� po�te. Une r�cente �tude de microzonage du risque sismique men�e conjointement par des experts de la Japan International Cooperation Agency (JICA) et le Centre national de recherche appliqu�e en g�nie parasismique (CGS) a confirm� la vuln�rabilit� particuli�re de la ville d'Alger, tout particuli�rement son ancien site urbain colonial datant de la fin du XIXe si�cle, au risque sismique. Le premier des quartiers concern�s cit� par cette �tude est bien �videmment Bab-el-Oued ! Le danger est s�rieux, imminent� il y a p�ril en la demeure ! La t�che est immense. Tout le monde est interpell� ; mieux, concern� ! Avant que ne survienne un autre drame, d'autres drames.