C'est trop fort ! O� est-ce qu'ils vont chercher tout �a ? Au lieu de se pencher s�rieusement sur les causes de la d�faite, certains de nos m�dias cherchent par quel orifice urinent les petits poissons. C'est tellement plus confortable de vitup�rer contre la perfidie �gyptienne et de flageller l'arbitre b�ninois. Il aurait, sans doute, �t� plus profitable de s'interroger sur les myst�res de la survivance d'une certaine candeur alg�rienne, ou de s'�taler � quelle tentation dans ce verbe ! � sur nos propres turpitudes. On se risquerait m�me � s'en pr�valoir, puisque les politiciens continuent � faire tourner le ballon pour faire chavirer les foules. S'il y a bien une chose que nous partageons, en effet, avec les �gyptiens, c'est l'art de capter, et de r�cup�rer la sueur des autres. Nos hypnotiseurs nationaux ont r�ussi � nous convaincre que la d�faite contre l'�gypte n'�tait qu'une simple p�rip�tie, ce qui nous fait craindre le pire en Afrique du Sud. On r�cup�re � tous crins, puisque le gouvernement Ouyahia avait m�me mobilis� les ti�des du football de son cabinet pour l'accueil officiel. Les joueurs n'ont vu et per�u que l'enthousiasme des fans agglutin�s derri�re les barri�res, mais ce n'est pas pour rebuter des politiciens aguerris comme les n�tres. Nous voil� donc, tous unis, � d�cliner dans un bel ensemble les m�mes th�mes qui nous rassurent, et sur notre grandeur et sur la mis�rable condition des gens d'en face. Petit tour d'horizon de quelques-unes des sorties m�diatiques les plus remarquables de la semaine. Dans cette s�rie, la palme de la sagacit� et du flair revient au quotidien Al-Nahar. Il nous apprend, � surprise, que l'arbitre b�ninois, le mal-nomm�, a touch� un pot-de-vin alg�rien vers� par un �gyptien. Pour faire perdre l'Alg�rie, en d�stabilisant son syst�me de d�fense, l'arbitre honni a �t� pay� avec l'argent des Alg�riens, via une soci�t� �gyptienne op�rant en Alg�rie, selon Al-Nahar. On pense tout de suite � Orascom, mais le quotidien pr�cise qu'il s'agit d'une soci�t� de fournitures de mat�riel logistique. Le comble, ajoute-t-il, est que cette entreprise a b�n�fici� de largesses fiscales dans le cadre du march� commun arabe. Le transfert de ces fonds vers les poches de Koffi Codjia est donc un crime grave commis avec l'argent des Alg�riens. Ainsi, nous aurions nous-m�mes pay� l'arbitre pour qu'il expulse trois de nos joueurs et nous fasse perdre un match que nous n'�tions pas oblig�s de gagner d'ailleurs. C'est Sa�dane qui le dit : nous sommes arriv�s aux demi-finales par accident, car notre objectif �tait seulement de participer. Apr�s le calme olympien, apprenons � nous familiariser avec les objectifs olympiques de Sa�dane ! Faisons en sorte de figurer honorablement face � la Slov�nie en juin prochain. Quant � l'Angleterre, affaiblie par les d�m�l�s extra-conjugaux de son capitaine, elle sera � notre port�e. Il suffit que nos fins limiers d�terrent quelques bonnes histoires d'alc�ves sur les cadres de l'�quipe anglaise. Pour le travail de coulisses, il suffira de conclure une tr�ve avec les �gyptiens et d'envoyer en formation au Caire quelques comploteurs de notre r�serve. On devrait en trouver, en regardant o� il faut dans les milieux du football national. J'ai ou� dire que certains clubs poss�daient des dirigeants chevronn�s et experts dans ce type d'action. Et puis, je crois savoir, comme mes vigilants confr�res, que les �gyptiens souffrent aujourd'hui d'un grave complexe de culpabilit�, � cause de ce qu'ils nous ont fait. Ils seront d'autant plus dispos�s � nous aider qu'ils ne risqueront rien puisqu'ils ne seront pas pr�sents en Afrique du Sud. Cela dit, cet arbitre b�ninois m'a l'air de constituer un r�el danger pour ses proches. Sans nous donner le temps de souffler, Al-Naharnous ass�ne cette �tonnante nouvelle : l'arbitre Koffi Codjia a un cousin, et ledit cousin est actuellement d�tenu en Alg�rie pour immigration clandestine. Non content de nous voler la victoire, il envoie un de ses cousins pour manger notre pain, ce pain qui fait la gloire de nos boulangers dans le monde entier. C'est du moins ce qu'affirme le titre � la �Une� du quotidien, mais en parcourant l'article vis�, on apprend qu'il s'agit simplement d'un harraga b�ninois, tomb� au mauvais moment. Encore un d�g�t collat�ral � mettre au compte de cet arbitre d�cri�, supp�t du diable et de l'�gypte ! Quant au quotidien Echourouk, confront� � une saine rivalit� avec le premier nomm�, il est arriv� en retard � la chasse aux scoops, mais il nous a ramen� quelque chose dans sa besace. Selon lui, le milliardaire �gyptien Hichem Tala�t, condamn� � mort pour le meurtre, � Duba�, de la starlette libanaise Suzanne Temim, a �t� victime d'un complot ourdi par Djamel Moubarek. Ce dernier �tait en affaires avec Hichem Tala�t, ainsi qu'avec un autre Saoudien fortun� et influent en �gypte. C'est � la suite d'un diff�rend financier avec ses deux partenaires que ceux-ci auraient d�cid� de lui mettre sur le dos l'assassinat de Suzanne Temim. Ceci �tait d'autant plus ais� que Hichem Tala�t avait eu une liaison prolong�e et tumultueuse avec la victime. L'ex�cuteur suppos� du meurtre, l'ancien policier Mohsen Sukkari, faisait partie de la garde rapproch�e, et devait lui aussi �tre sacrifi�. C'est lui qui a achet� le couteau du crime avec sa carte de s�curit� sociale, mais le meurtre aurait �t� commis par un troisi�me larron, non identifi� � ce jour. Hichem Tala�t avait b�n�fici� de l'appui de Djamel Moubarek pour obtenir les terrains n�cessaires � la construction de ses h�tels et villes touristiques, note encore Echourouk. Ce que ne dit pas le quotidien, c'est que Hichem Tala�t continue de jouir de faveurs exceptionnelles, jusque dans sa cellule de condamn� � mort. Secr�taires personnelles, ordinateurs et mat�riels vid�o divers, repas somptueux servis par d'accortes soubrettes, et j'en passe. C'est le 4 mars prochain que la cour devra d�cider de la date de son ex�cution, mais ses avocats sont optimistes, selon la presse �gyptienne. Le plus � plaindre est l'homme de main Mohsen Sukkari qui pourrait bien �tre envoy� en �claireur dans l'autre monde, pour donner un nouveau sursis � Hichem Tala�t. Quant � son suppos� associ�, Djamel Moubarek, il est au c�ur d'une violente pol�mique, � cause des dividendes qu'il essaie de retirer de la victoire de l'�gypte � la CAN. �C'est l'�quipe nationale ou l'�quipe de Djamal et de Ala�, titrait le quotidien cairote Echourouk. Le journal d�nonce violemment la r�cup�ration organis�e au profit des deux fils de Moubarek et du r�gime. �C'est la seule victoire remport�e par la seule �quipe d'�gypte qui est r�ellement �lue (s�lection se dit mountakhab, qui veut dire aussi �lu), et ils veulent confisquer cette victoire � leur profit.� De fait, le courant religieux est le plus acharn� � attribuer la victoire �gyptienne � une intervention divine. Les islamistes s'emploient notamment � coller � l'�quipe le nom de Sadjidines (qui se prosternent). Ils r�cusent l'appellation de Pharaons qui renvoie, selon eux, aux temps impies o� l'Islam n'avait pas encore �clair� le ciel d'�gypte. Le chroniqueur d' Al- Ahram, Imad Al'Ariane, s'insurge ouvertement contre le fait que des joueurs se prosternent sur le terrain. �Comment peuton se prosterner, dit-il, sur un terrain pi�tin� de long en large par les pieds des joueurs, et donc non propice � cet effet ? Ajoutez les centaines de crachats et de morves qui polluent la pelouse et la rendent impropre � la pri�re. Sans compter cet autre probl�me de droit (fiqh) : est-il permis de se prosterner devant des millions de spectateurs, alors qu'on porte un short, qui n'est pas une tenue appropri�e ?� interroge notre confr�re.