Ni le Bulletin météo spécial émis pour toute la durée du week-end, ni rien d'autre n'a pu peser sur la détermination des Béjaouis en ce quatrième vendredi de protestation. Ils étaient des dizaines de milliers à battre le pavé encore mouillé par les pluies torrentielles qui se sont abattues dans la nuit de jeudi à vendredi. Comme tous les vendredis, depuis maintenant un mois, la population répond présent à l'appel pour le changement. L'offre de Bouteflika est rejetée en bloc dès le premier jour. Les manifestants tiennent obstinément à une seule revendication exprimée en langue arabe : «Yetnahaw gaâ», laquelle expression est devenue au fil des manifestations un véritable mot d'ordre. Cette exigence est exprimée avec une telle opiniâtreté qu'elle pèse depuis sur tous les défilés. Le récent ralliement du FLN au mouvement populaire et les graves insinuations du chargé de communication du RND se sont invités également à la protestation. Elles ont en effet été tournées en dérision par les manifestants lesquels ont scandé des slogans hostiles à ces deux partis qui constituent l'ossature politique du règne de Abdelaziz Bouteflika. «FLN et RND au musée» ou encore «FLN, RND dégagez !» ont fusé de la foule lorsque des manifestants ont appris que des figures locales connues pour faire partie des organisations satellites du FLN et du RND auraient rejoint la procession. Elles ont été abondamment sifflées et chahutées, mais sans plus ; les manifestants ont tenu à ce que le mouvement reste pacifique. «Ne jamais répondre aux provocations d'où qu'elles viennent», nous dira un jeune manifestant. La dernière sortie de Larbi Zitout, ancien membre du FIS dissous, qui a appelé à partir de Londres, à brûler les drapeaux de pays comme la Russie et la France, a été largement rejetée par la rue bougiotte. «Ces gens-là veulent détourner le mouvement vers l'anarchie et le chaos, comme ce fut le cas dans les années 1990. Qu'ils sachent que la jeunesse d'aujourd'hui, qui ignore jusqu'à leur existence, s'est émancipée de la chapelle terroriste», commente une étudiante.