De l'opposition qui a boycotté les consultations sur la révision constitutionnelle qu'il refuse de qualifier «d'anarchiste», mais qu'il désavoue sur sa démarche «transitionnelle» tout en l'invitant à se rendre au palais d'El Mouradia, au niet catégorique à propos du retour du FIS dissous ou l'amnistie générale en passant par le rôle de l'armée «défini par la Constitution», le chef de cabinet de la présidence de la République, Ahmed Ouyahia, s'est longuement expliqué hier sur les «objectifs de l'atelier» qu'il dirige depuis 3 semaines. Qualifiant la démarche (consultations) de «positive et utile», Ahmed Ouyahia qui s'exprimait hier dans une conférence de presse animée à Djenane El Mithak (Alger), a d'abord tenu à «éclaircir» certains points à propos des consultations sur la révision constitutionnelle et répondre par là même aux critiques de l'opposition. Pourquoi la révision maintenant ? Pour Ouyahia, les consultations «n'interviennent pas dans une conjoncture de crise comme ce fut le cas lors des précédentes révisions constitutionnelles». Aussi, a-t-il tenu à rappeler, le chantier de la révision constitutionnelle est entamé en 2011 avec Bensalah, s'est poursuivi en 2012 avec le Premier ministre Abdelmalek Sellal pour aboutir à ce nouveau round qui n'est nullement un «monologue» du pouvoir. «Les idées ont mûri et les conditions se sont améliorées», fera remarquer Ahmed Ouyahia non sans se réjouir que beaucoup d'objectifs souhaités par l'opposition sont quasi-identiques, comme le renforcement et la séparation des pouvoirs, la promotion de la démocratie, le rôle du Parlement, la consolidation des droits et des libertés des citoyens ou encore la place à l'opposition. Il invitera cette dernière à se rendre à la Présidence dont les «portes demeurent ouvertes», même après le 9 juillet, date de la fin des consultations, tout en rejetant dans la foulée l'une des exigences des partis et personnalités qui ont boycotté les consultations, à savoir une «période de transition». «L'Algérie d'aujourd'hui est un Etat aux institutions démocratiques et n'a nullement besoin de période de transition», explique Ahmed Ouyahia, rappelant que le pays avait auparavant payé un lourd tribut aux surenchères et manœuvres politiques à l'origine de plusieurs années d'une «terrible inertie». Bien qu'il affirme que les partis et personnalités ont «droit» de boycotter et de se réunir, le chef de cabinet de la Présidence estime que cette option «se veut l'une des plus dangereuses formes d'opposition à l'appel de la présidence de la République à la participation au dialogue sur la révision constitutionnelle». S'il affirme, contrairement aux détracteurs de la démarche présidentielle, que l'Algérie n'est pas «sinistrée», il considère qu'il y a «des priorités» et le chef de l'Etat «élu par le peuple il y a deux mois» n'est pas «un chef de gare». Détaillant encore ses «désaccords» avec les parties qui ont boycotté ces rencontres, Ahmed Ouyahia dans une allusion à peine voilée à l'ex-chef du gouvernement Mouloud Hamrouche qui a appelé l'armée à jouer son rôle dans la «période de transition», a tenu à souligner que «l'ANP, digne héritière de l'Armée de libération nationale (ALN), assume une responsabilité constitutionnelle clairement définie et ne saurait être au service de manœuvres politiques». Un peu plus critique envers l'opposition, l'ex-Premier ministre dit refuser que le peuple algérien «soit le carburant de manœuvres politiciennes», étayant son analyse par l'option prônée par certains de «recourir à la rue». Et de donner son point de vue sur la démarche des partis et personnalités de l'opposition. «Ma lecture est qu'ils veulent que Bouteflika parte ou bien ils font appel à la rue», dit-il, avant de qualifier la récente rencontre de Zéralda par un «dégage sans la place Tahrir», allusion au printemps arabe. Ouyahia récuse cette démarche car «le pays a besoin de concessions». Pour lui, «les défis aujourd'hui ne sont pas de parvenir au pouvoir mais résident dans les intérêts du pays». «Nous n'avons pas de pays de rechange», lance-t-il. Aussi a-t-il tenu à répondre à propos de la «campagne» sur l'état de santé du Président. Une campagne «qui s'est retournée contre ses auteurs». «L'amnistie générale est une hérésie politique» L'autre question récurrente lors de la conférence d'Ouyahia est celle relative au retour du FIS dissous sur la scène politique. Expliquant que les deux invités de l'ex-FIS, Madani Mezrag et Hachemi Sahnouni, ont été conviés aux consultations comme «personnalités nationales», le chef de cabinet de la Présidence dira que ces derniers n'ont à aucun moment évoqué le retour du FIS. «Nous avons discuté de questions d'ordre général et l'un deux a évoqué la réconciliation nationale», a ajouté Ouyahia pour qui la «charte nationale» déjà a fait «barrage contre ceux qui ont semé la violence». S'il ne nie pas que la tendance salafiste existe bel et bien en Algérie et que les islamistes en général représentent une certaine force, Ahmed Ouyahia qui affirmait que les «critères de choix» des personnalités politiques «répondent à une réalité du terrain», est néanmoins catégorique à propos d'un éventuel retour du FIS dissous sur la scène politique. «Je vous confirme qu'il n'y aura pas de retour du FIS dissous», a affirmé Ouyahia en réponse aux nombreuses questions des journalistes à ce propos, expliquant qu'il «partageait les mêmes visions politiques» avec le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, «qui a eu déjà à s'exprimer sur le sujet». Faisant valoir la loi, Ahmed Ouyahia a dans le même registre expliqué qu'il n'est nullement question d'une probable amnistie générale que d'aucuns soupçonnent le pouvoir de vouloir «manœuvrer» à propos. «L'amnistie générale est une hérésie politique», assène-t-il. «Le pouvoir a assez de défis à gérer pour ne pas s'inventer des démarches infantiles», dira-t-il encore, assurant que «le pouvoir ne fait pas dans la manipulation mais il tente de rassembler le peuple». Ahmed Ouyahia s'est par ailleurs réjoui que des partis ayant participé à la conférence nationale de l'opposition tenue à Zéralda aient également pris part aux consultations, citant le FFS qu'il dit respecter. A propos de l'officialisation de tamazight, il se contentera de dire que des propositions dans ce sens ont été faites. S'agissant de la suite à donner aux propositions des uns et des autres, Ouyahia dira qu'il y aura d'abord une synthèse et c'est par la suite la prérogative de l'Exécutif (le Président).