Onze soldats de l'ANP ont été lâchement assassinés par un groupe terroriste du côté d'Iboudrarène, une localité de la haute Kabylie. Le «contexte», comme d'autres considérations, dont la baisse de vigilance due à la conjoncture précisément ou à l'illusion de la paix retrouvée, ne peut permettre certaines conclusions un peu trop vite déclinées comme des certitudes. A l'évidence, le moment n'est pas à la lucidité. Le pays vit dans le «jour d'après» une élection présidentielle dont le moins qu'on puisse dire est qu'elle est controversée, où tous les coups sont (encore) permis et la réaction - à moins que ce ne soit le manque de réaction - officielle à ce carnage n'est pas faite pour apaiser les choses. Il y a d'abord cette évidence qu'on oublie souvent, par erreur d'appréciation ou à dessein : le terrorisme intégriste frappe quand il peut. S'il avait pu frapper quand il veut, il y a longtemps que le pays serait réduit en champ de ruines. Le mélange des genres ne peut pas produire de la pertinence politique. On peut bien évidemment ergoter sur le contexte et la manière dont il a été appréhendé par le pouvoir politique qui n'est pas, loin s'en faut, un modèle de réussite. Cela n'explique pas pour autant qu'on confonde tout. Plus prosaïquement, ce n'est pas parce que le convoi militaire qui a été attaqué était mobilisé dans le cadre de la «sécurisation de l'opération électorale» que ça en fait une opération différente du reste de l'action terroriste. Ça ne fait ne fait pas une «occasion» offerte aux terroristes de frapper. Encore moins une opération cousue de fil blanc pour on ne sait quels sombres desseins politiques. On peut être en phase d'opposition active et garder sa sérénité, surtout sur des questions aussi graves. Ce n'est même pas sûr que ce soit un cadeau fait à l'adversaire que de faire preuve de responsabilité. On peut toujours introduire ses nuances ou carrément ses différences sur la gestion de la lutte antiterroriste, ce n'est pas vendre son âme au diable que de partager avec lui une position de principe. Puis, il y a le reste. Onze soldats de l'ANP tués et cinq blessés sans la moindre réaction officielle, c'est tout simplement scandaleux. Et l'unique déclaration, venue du ministère de la Défense nationale, à défaut du donner du baume au cœur, a plutôt compliqué les choses. En mettant autant de… gravité dans son rappel à l'ordre de… la presse, «les Tagarins» ont lamentablement lâché la proie pour l'ombre. En sommant les journalistes de «vérifier leurs informations», en suggérant qu'ils font le jeu des terroristes au moment où on attendait un hommage solennel de la nation aux soldats morts dans l'exercice de leur devoir. Si quelques journaux ont annoncé 14 morts au lieu de 11, cela ne fait pas d'eux des alliés objectifs du terrorisme, un rectificatif dans les règles aurait suffi. Surtout que telle que formulée - par maladresse vraisemblablement - la déclaration peut supposer que 11 soldats assassinés, ce n'est finalement pas si grave que ça ! Et la réaction - plutôt l'absence de réaction - officielle n'est pas faite pour évacuer certaines conclusions, les plus farfelues comprises. Slimane Laouari Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.