La promiscuité fait rage à Skikda. Beaucoup de familles en souffrent depuis plusieurs décennies. Les alternatives manquent, aggravées par le déficit en logements sociaux et autres formules permettant aux citoyens aux revenus modestes de se procurer un toit décent. Vingt personnes dans un appartement de deux pièces, vingt-sept autres dans un logement de 4 pièces, quatre familles dans un appartement de 3 minuscules chambres, deux familles dans un taudis..., les exemples sont nombreux qui montrent toute l'ampleur du phénomène de la promiscuité dans une ville terrassée par l'énorme déficit en logements. Skikda demeure en effet l'une des rares wilayas du pays où le phénomène des bidonvilles, plutôt que décliner, a tendance à se généraliser à travers toutes les agglomérations qui lui sont rattachées. Outre cette «gourbisation» rampante, provoquée à la fois par le mouvement d'exode continu des campagnes sous-équipées vers les villes un peu mieux loties, et les ridicules programmes de réhabilitation du monde rural, la wilaya est confrontée à la menace que représente le vieux bâti. Des zones urbaines entières, à l'image de Houmet Etaliane, le vieux quartier napolitain, ou des Arcades, en plein centre-ville, croulent sous le poids des ans. Plusieurs immeubles construits vers la fin du 19e siècle ont disparu, d'autres risquent de s'affaisser à n'importe quel moment. Autant de raisons qui ont contraint la wilaya à prendre la décision d'affecter les 1500 logements sociaux qui lui ont été accordés à la résorption de l'habitat précaire. Ce programme s'ajoute aux 3500 logements en voie de construction qui seront implantés dans les trois sites précaires de la ville, Bouabaz, la Briqueterie et Boulekeroua. Des programmes insignifiants Deuxième solution préconisée et mise en application par la wilaya, le relogement urgent de 124 résidants de 19 immeubles considérés comme les plus exposés au risque d'effondrement. Ces quelques chiffres parlent d'eux-mêmes : la daïra de Skikda dispose, à elle seule, d'un programme de 6434 logements sociaux dont 1972 sont déjà achevés, de 3453 logements participatifs et de 645 logements ruraux. Mais sachant aussi que le nombre de demandes de logements sociaux déposées au niveau des services de la daïra dépasse les 20 000 demandes, on ne se fait pas trop d'illusions vu la disproportion entre l'offre et la demande. Et les familles vivant dans la promiscuité dans tout cela ? Rien ou presque n'a été fait en leur direction. Elles ont été oubliées depuis la nuit des temps. Quelques unes au niveau de la cité l'Abattoir, munies de décisions d'attribution datant de 1989, du temps de feu le wali Serradj, n'ont pas été admises dans les différentes listes d'attribution de logements sociaux. Elles sont toujours là où elles étaient il y a près de deux décennies, survivant dans un sombre souterrain. A 25 dans un même logement Pour l'exemple seulement, on peut citer un cas qui illustre cette situation d'une manière étonnante. Une famille de 25 membres habite dans un F4 depuis une dizaine d'années, à la cité des Oliviers. «Le petit des frères est âgé de huit ans, l'aîné à 23 ans», selon les dires de L. Z., un des membres de la famille. Le facteur temps a contribué au pourrissement de la situation, par l'augmentation du nombre des familles. Actuellement, elles sont au nombre de 4, les carnets de famille faisant foi. Les papas sont devenus entre-temps des grands-pères sans que l'attribution attendue de logements à caractère social locatif ne vienne les délivrer de leur étreinte. Pourtant, les familles ne sont pas restées les bras croisés durant ces dernières quinze années. Plusieurs demandes de logement ont été adressées aux instances compétentes, la plus ancienne est datée de juillet 1994. Un recours a été introduit par le même demandeur en mars 2000. En vain. Cette famille nombreuse constituée de 25 membres, à l'instar de plusieurs centaines d'autres vivant dans des conditions indignes, lance un ultime appel aux autorités compétentes afin qu'elles leur règlent le problème. Une situation qui n'est que la conséquence de la disproportion toujours actuelle entre l'offre et la demande, comme déjà relevé, et les innombrables dépassements enregistrés dans les opérations de distribution des logements sociaux.