«Le gouvernement syrien ne sera pas le seul à riposter en cas d'opération militaire des Etats-Unis et de leurs alliés contre la Syrie», a indiqué hier le président du pays Bachar al-Assad dans une interview à la chaîne américaine CBS. «Soyez prêt à tout en cas de frappes, et pas forcément de la part du gouvernement syrien», a prévenu M. Assad, faisant allusion aux alliés de Damas que sont l'Iran et le mouvement chiite libanais Hezbollah. Et de rappeler que le gouvernement syrien n'était pas le seul acteur dans la région. «Il y a différentes parties, différentes factions, différentes idéologies. Il y a de tout dans cette région», a souligné le président syrien. Promettant des représailles en cas de frappes, il a averti que les Syriens s'y étaient préparés du mieux qu'ils le pouvaient. Les chefs de la diplomatie syrien et russe ont affiché hier à Moscou la disposition de Damas à participer à des discussions de paix pour une solution politique à la crise syrienne, tandis que le Congrès américain débat des frappes voulues par Barack Obama contre Damas. Au moment où le président américain espère obtenir le feu vert du Congrès pour lancer une opération militaire en Syrie, les ministres des Affaires étrangères syrien, Walid Mouallem et russe Sergueï Lavrov se sont entretenus hier à Moscou sur la situation. «Une solution politique est encore possible», a déclaré M. Lavrov lors d'une conférence de presse à l'issue de ces pourparlers, affirmant que Damas était toujours «prêt à des négociations de paix». Le chef de la diplomatie syrienne a affirmé que son gouvernement était «prêt au dialogue avec toutes les forces politiques syriennes qui veulent le rétablissement de la paix dans notre pays», tout en mettant en garde que la position de Damas changerait en cas de frappes. «Nous sommes en effet prêts à participer à une rencontre à Genève sans conditions préalables», a-t-il ajouté, en allusion à l'organisation d'une nouvelle conférence internationale de paix dont l'idée avait été proposée en mai par Moscou et Washington mais qui est restée lettre morte. M. Lavrov a par ailleurs mis en garde contre «l'explosion de terrorisme» au Moyen-Orient que provoqueraient des frappes contre le gouvernement syrien. M. Al-Mouallem a également remercié, au nom du président syrien Bachar al-Assad, le chef de l'Etat russe,Vladimir Poutine, pour son soutien à un règlement politique de la crise syrienne. A Londres, dernière étape de sa tournée sur le continent européen, le secrétaire d'Etat américain John Kerry a, lui aussi, réaffirmé qu'un règlement du conflit syrien était avant tout «politique» et non «militaire». «Les Etats-Unis, le président Obama, moi-même et d'autres sont d'accord pour dire que la fin du conflit en Syrie requiert une solution politique. Il n'y a pas de solution militaire, nous n'avons aucune illusion à ce propos», a déclaré M. Kerry au côté de son homologue William Hague. Attaque chimique, «une mise en scène fabriquée» Concernant l'attaque chimique perpétrée le 21 août dans la banlieue de Damas, M. Lavrov a affirmé qu'il y a des faits qui prouvent que cette attaque est «une mise en scène fabriquée». «Il y a des évaluations professionnelles, faites par la membre de la Commission d'enquête de l'ONU, Carla del Ponte. Elle possède des informations sur l'utilisation d'armes chimiques et toxiques par des rebelles», a t-il souligné. Moscou soutient aussi l'appel du Secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon à assurer le retour en Syrie des experts internationaux des armes chimiques afin qu'ils puissent achever leur mission, a indiqué le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. «Nous jugeons opportune et très importante la déclaration du Secrétaire général de l'ONU selon laquelle les experts chargés d'enquêter sur l'emploi d'armes chimiques en Syrie doivent revenir dans ce pays pour achever leur mission conformément aux ententes en vigueur», a déclaré M. Lavrov lors d'une conférence de presse avec son homologue syrien Walid Mouallem. La semaine dernière, le chef de la diplomatie russe a proposé au Conseil de sécurité de l'ONU d'examiner les résultats de l'enquête internationale sur l'emploi présumé d'armes chimiques en Syrie avant de prendre de nouvelles décisions concernant ce pays. Moscou espère que l'opposition syrienne suivra Damas dans sa volonté de participer à la conférence internationale sur la Syrie dite Genève 2.«Pour le moment, la coalition nationale refuse de soutenir l'initiative russo-américaine du 7 mai de convoquer la conférence à Genève. Nous espérons que l'opposition finira par confirmer sa participation», a indiqué le ministre tout en appelant ses collègues américains à concentrer leurs efforts sur un règlement politique de la situation en Syrie. «Nous exhortons les collègues américains à concentrer leurs efforts uniquement dans ce domaine, et non dans la préparation d'un scénario militaire», a souligné le ministre russe des Affaires étrangères. Placer les armes chimiques sous contrôle international «Moscou a appelé la Syrie à accepter de placer ses armes chimiques sous contrôle international si cette mesure permet d'éviter une frappe militaire américaine», a déclaré le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. «Si l'établissement d'un contrôle international sur les armes chimiques dans ce pays permet d'éviter des frappes, nous entrerons immédiatement en contact avec Damas», a déclaré M. Lavrov. «Nous appelons les dirigeants syriens non seulement à accepter de placer leurs entrepôts d'armes chimiques sous contrôle international, mais aussi à les détruire et à adhérer intégralement à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques», a indiqué le ministre. Selon lui, la Russie a déjà transmis cette proposition au ministre syrien des Affaires étrangères en visite à Moscou. «Nous espérons une réponse rapide et positive», a conclu le chef de la diplomatie russe. De son côté, Téhéran espère que les efforts déployés par la Russie pour désamorcer la crise syrienne permettront d'empêcher une intervention militaire en Syrie, a indiqué hier le vice-ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian, en visite à Moscou. «Nous espérons que les efforts déployés au plus haut niveau en Russie permettront d'éviter la réalisation d'un scénario militaire», a déclaré M. Amir-Abdollahian lors d'une rencontre avec son homologue russe Mikhaïl Bogdanov. Et d'ajouter que Moscou et Téhéran adoptaient une position similaire sur la Syrie. «Nous devons réfléchir aux démarches conjointes à entreprendre pour réussir», a estimé le diplomate. «La Russie et l'Iran doivent tout mettre en œuvre pour désamorcer la crise en Syrie, a indiqué, pour sa part, le vice-ministre russe des Affaires étrangères Mikhaïl Bogdanov. «Nous devons faire tout notre possible pour parvenir à un règlement politique en Syrie», a déclaré M. Bogdanov, ajoutant que la «concentration des efforts sur la voie d'un règlement politique du conflit était une condition sine qua non de la paix et de la sécurité dans la région», a déclaré le diplomate.