Le Mouvement de la société pour la paix (MSP), traversé actuellement par une bataille de leadership, s'enfonce de plus en plus dans la crise. Conséquence première, la scission du parti déjà annoncée avec la création du Mouvement pour la prédication et le changement (MPC). Un «frère jumeau» qui aura pour ambition, selon ses animateurs, de veiller principalement au respect de la ligne du défunt Mahfoud Nahnah. L'offensive menée par Abdelmadjid Menasra pour déstabiliser le président du MSP Bouguerra Soltani, consiste à repositionner la mouvance à laquelle il appartient dans une «perspective islamique», conformément, selon ses dires, à la Constitution, en favorisant le travail sur le terrain pour «une meilleure capacité de mobilisation». La tactique de Menasra pour réunir autour de sa thèse le plus grand nombre de dissidents, de nouveaux militants et de sympathisants se trouve étrangement confortée par le comportement de son principal adversaire, Soltani. Selon les observateurs, ce dernier a fait deux grosses erreurs de stratégie qui pourraient se révéler lourdes de conséquences pour la tendance qu'il défend voire pour son avenir politique personnel. Sa démission du gouvernement, première erreur, a laissé perplexe plus d'un. Bénéficiant du statut de ministre d'Etat, certes sans portefeuille, il avait néanmoins le privilège de suivre de près les affaires gouvernementales, d'influer «d'une façon ou d'une autre» sur les grandes décisions et, pour éviter les susceptibilités de ses militants, de se positionner au sein du gouvernement pratiquement au même niveau que ses pairs dirigeants de l'Alliance présidentielle. Son départ de l'Exécutif l'affaiblit incontestablement car il intervient dansun nouveau contexte, alors que lors de la tenue du dernier congrès du MSP, le mouvement de dissidence en avait fait un préalable pour un recentrage «en commun» de la ligne politique du parti. Les mêmes observateurs soutiennent que sa seconde erreur se caractérise par sa propension à menacer d'exclusion sinon de sanctions les militants qui n'épouseraient pas totalement les thèses et les positions exprimées par son parti. En perspective du vote, mardi à l'Assemblée populaire nationale du plan d'action du gouvernement, il a du reste clairement soutenu que les députés qui ne respecteront pas les consignes de vote «seront radiés définitivement du parti». Pourtant, l'hypothèse d'un vote sanction demeure peu probable car le camp des dissidents n'a en aucun cas exprimé, du moins publiquement, son opposition à la politique gouvernementale. Abdelmadjid Menasra et ses pairs ont, faut-il le rappeler, pleinement soutenu la candidature de Abdelaziz Bouteflika à un troisième mandat présidentiel en animant plusieurs meetings électoraux à travers le pays. Il serait pour le moins suicidaire de tourner casaque l'espace de quelques semaines sitôt l'élection présidentielle achevée. De plus, ce groupe dissident veillera certainement à présenter sous les meilleurs contours les principes directeurs du parti qu'il compte créer. Menasra qui s'attelle actuellement à «la structuration et à la mobilisation des anciens militants», a indiqué qu'il déposera assez rapidement le dossier d'agrément de son parti, soulignant sa «confiance» en le ministère de l'Intérieur dans le traitement qui sera réservé à sa demande. Face à cette situation, les héritiers de Nahnah, toutes tendances confondues, comptent et recomptent leurs troupes, font dans la comptabilité pour connaître le chiffre exact de dissidents ayant effectivement opté pour le camp adverse, tandis qu'un groupe de sages tente en se démarquant de cette guerre des chiffres de réconcilier les «frères ennemis» pour préserver l'unité des rangs malgré le malaise qui semble gagner en profondeur. Les parties opposées demeurant déterminées à faire valoir leurs thèses respectives inscrites paradoxalement d'un côté comme de l'autre dans «la pure ligne» du cheikh Nahnah.