Djemila est probablement le site qui attire actuellement le plus de visiteurs dans la région de Sétif. Il existe, cependant, à quelques kilomètres au nord de cette ville antique, un site archéologique d'une grande importance, mais peu connu : Idjkane. Ikdjane est une petite agglomération située dans la commune des Béni Aziz, dans la wilaya de Sétif. La ville a joué un grand rôle dans l'histoire de l'Algérie au Moyen âge. Au IXe siècle de l'ère chrétienne, des pèlerins de la tribu berbère des Kotama, installée dans la région, ont rencontré à La Mecque le prédicateur chiite Abou Abdallah, dont la mission était persécutée en Orient, et l'ont invité à se rendre au Maghreb pour y fonder une dynastie. Les Berbères ont dû être séduits par les croyances religieuses de la secte, notamment le rôle dévolu à l'imam ou guide de la communauté, mais aussi par le fait qu'elle s'oppose au calife de Baghdad, prince des émirs qui commandaient au Maghreb. C'était pour eux une façon de plus d'affirmer leur volonté d'indépendance à l'égard de l'Orient. Le prédicateur a accepté l'offre, signant ainsi l'acte de naissance de la dynastie fatimide qui va régner au Maghreb, puis en Egypte. Abou Abdallah s'installe à Ikdjane, forteresse invincible des Kotama, où il va constituer et entraîner une armée qu'il va lancer contre les Aghlabides, les maîtres du Maghreb. Il fera venir plus tard, de Syrie, le maître de la secte, 'Ubayd Allah, qu'il installera à Raqqada, la capitale aghlabide. Les chefs fatimides quitteront Ikdjane pour rejoindre Reqqada, mais la forteresse kabyle gardera une importance symbolique pour la dynastie. Elle restera aussi un centre de propagande religieuse actif ainsi qu'en témoignent les nombreuses mosquées et zaouias qui l'entourent et qui vont, tout au long du Moyen âge, rayonner sur la région. A la fin du Xe siècle, le géographe arabe al Muqqadasi cite Ikdjane comme une grande ville de l'Ifriqya, terme qui désignait la Tunisie actuelle et l'Est algérien. Signalons qu'Ikdjane était également appelée au Moyen âge Dar al Hidjra (la demeure de l'exil) par référence aux chiites qui y avaient trouvé refuge. Signalons que le site d'Ikdjane a été classé patrimoine national en 1978. Le nom Ikdjane, qui a la forme d'un pluriel, est le nom d'une fraction des Kotama ; on l'a aussi rapproché du mot kabyle aqjun qui signifie (chien) : il pourrait s'agir dans ce cas, d'un ancien nom totémique conservé après l'islamisation de la tribu. Signalons qu'un village de la vallée de la Soummam (commune d'Akfadou), porte aussi ce nom ikjan. Enfin, pour préserver les traditions et donner de l'importance aux différentes périodes historiques, il faut préserver les sites qui sont les seuls témoins d'un passé glorieux pour la région et pour l'Afrique du Nord.