Dans un élan de désespoir, Brahim court à la recherche de la vérité, accablé par les commérages et l'ignorance de ses proches. Seul le discours scientifique, porteur de lumière à son sujet, pourra le sortir de cette obscure réalité, chargée de paradoxe autour du sida. Présentée ce samedi à la maison de la culture Ould Abderahman-Kaki, la pièce L'Opprobre, de la coopérative théâtrale Sindjab de Bordj Ménail, est la deuxième pièce écrite et mise en scène par Rafik Fetmouche, fils d'Omar Fetmouche, illustre homme de théâtre, ancien directeur du Théâtre national de Béjaïa et commissaire du Festival international du théâtre de Béjaïa. Cette pièce, d'une heure trente, entre dans la catégorie A de la compétition du 48e Festival national du théâtre amateur de Mostaganem. La pièce se penche sur la marginalisation des séropositifs dans la société algérienne. Jouée par neuf jeunes talentueux, cette pièce se veut une satire sociale dénonçant l'ignorance et les préjugés qui entourent le sida ainsi que la triste réalité de la survie de certains qui réside dans la fouille des poubelles. L'auteur nous embarque dans la descente aux enfers de Brahim, campé par Islam Rebaï, victime de la marginalisation. Un fait qui peut toucher n'importe quelle personne si elle est sujette à commérage. Ses voisins et amis du quartier redoublent de calomnies pour acculer le jeune homme dans une tragique réalité et l'accuser de tous les maux. Les actes de la pièce cheminent parfaitement bien, soutenus par un décor original imprégné du thème de la pièce qui débute dans une rue commerçiale au cœur d'un quartier «el houma». On retrouve ainsi le personnage de Ramdhane (Rafik Belhadj), cachant sa lâcheté sous des apparences de religieux. Sensé accueillir et faire passer les citoyens, il renvoie tous ces derniers dès la porte d'entrée. Un personnage comme on en voit un peu partout dans les administrations. Samia (Aïcha Issad), seul personnage féminin de la pièce, est la seule qui soutient le jeune dans cette histoire. «Samia représente le discours scientifique, seule manière de faire éclater la vérité à propos de la maladie chez le jeune garçon», explique Rafik Fetmouche. Hommage aux sidéens Ce dernier tente de démontrer comment, au sein d'un quartier populaire, un peuple peut reproduire la façon avec laquelle la société marche, une répression sur les individus les plus faibles par les plus forts, et ceux dont la position sociale est tantôt avantageuse tantôt ordinaire. La dramaturgie de la pièce prend racine par le texte et le jeu très probant des comédiens. La scénographie fonctionnelle (utilisation des éléments du décor dans l'intérêt du texte), l'écriture bien faite prend vie par la mise en scène et le jeu des comédiens. L'éclairage et la musique, signés Bazou, s'alignent bien avec la trame de l'histoire soutenue quelquefois par la voix de velours de Mounia Aït Meddour qui lâche des refrains probants écrits spécialement pour la pièce. L'Opprobre, rappelons-le, a été présentée la première fois, en 2014, à l'occasion de la Journée mondiale du sida. Un bel hommage aux sidéens, catégorie souvent marginalisée et vue d'un mauvais œil dans notre société. Rafik Fetmouche est étudiant en première année Art du spectacle à l'université de Paris 8. Le festival se poursuit jusqu'au 2 septembre prochain.